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Category: Les drapeaux

La bataille de Lens (20 août 1648)

La bataille de Lens (20 août 1648)

Après la prise d’Ypres, Condé campe à Béthune et fait sa jonction avec le corps d’Erlach (4 000 hommes). De son côté, l’archiduc Leopold, après avoir pris Courtrai, marche sur Lillers puis Lens. L’armée espagnole campe alors, bien retranchée derrière le ruisseau qui va à Arras.

Condé, « se réjouissant » de la présence des ennemis en plaine, traverse la Lys.

« Son altesse en marchant fit trois lignes de ses troupes qui faisaient tout au plus vingt mille hommes et tout au moins dix-huit  ; il mit à la première les gardes, Picardie et les régiments de l’armée d’Erlach et pour cavalerie tous les gendarmes tant du Roy que des princes et toutes les compagnies de gardes des généraux ; la seconde ligne était en pareille disposition et notre cavalerie légère commandée par Guiche ( ?), monsieur d’Erlach demeura pour troisième ligne et corps de réserve ; Mr de Cossé menait une bande d’artillerie. A la première ligne il les faisait marcher aussi vite que les troupes ; nous allâmes en cet équipage montrer notre armée à Mr l’archiduc qui était bien couvert de ses lignes devant lesquelles nous nous arrêtâmes à un jet de pierre près, et y demeurâmes tout le jour, les officiers d’infanterie de la première ligne jouant et sautant au « saut de l’allemand » toute la journée sans (être) autrement alarmé » écrit alors un gazetier, témoin anonyme de la bataille. Ce témoin ajoute par ailleurs que « Il est à remarquer que Mr le prince avait tant parlé des troupes d’Allemagne lesquelles ne tiraient jamais les premiers et obligeaient leurs ennemis à faire leur décharge puis à fuir devant eux que chaque officier s’était mis cela en tête, et bien que cela ne fut dit qu’à l’égard de la cavalerie, néanmoins l’infanterie s’y fit presque partout un point d’honneur de ne point tirer ».

Condé feint alors une retraite vers Béthune, pour tenter de déloger l’Archiduc. « Mr le Prince résolut quand le jour serait venu de se retirer en un village nommé Loo auquel touchait notre arrière garde afin de repaître et dit tout haut qu’en quelque temps que l’archiduc marchait, qu’il le combattrait assurément et ainsi il se mêla à l’affaire publiquement quoique pique qui contribua particulièrement au grand fait d’arme du jour suivant » témoigne le rédacteur de cette petite relation de la bataille avant de poursuivre un peu plus loin : « Voici ce coup de maître que fit notre héros (ndla : de Condé !), ce qu’il ne nous ai fait entendre par la comparaison du jeu d’escrime ou ne nous ai dit que durant que le moins docte bat du pied sans se débander le savant prend un temps et loge sa botte à plaisir ».

Beck tombe effectivement dans le panneau, et réussit à convaincre l’Archiduc de se lancer à la poursuite des Français. Le 20 août à 8 heures du matin, alors qu’elle franchit la crête d’un vallon, l’armée espagnole découvre les Français qui lui font face. Condé « ne fit que faire à gauche, en remarchant droit aux ennemis, lesquels étaient bien en bataille chacun en particulier mais n’étaient point en ordre de bataille mais en colonne pour s’y mettre ». Surpris, l’Archiduc range ses troupes en bataille. L’artillerie française ouvre le feu. Les Espagnols mettent en hâte leurs pièces en batterie. L’artillerie française, bien moins nombreuse (18 pièces contre 38) mais mieux préparée, fait des ravages dans les rangs ennemis.

L’aile droite française et la cavalerie de Lorraine s’avancent alors l’une contre l’autre. Les deux ailes se font face à 10 pas : les Lorrains ouvrent le feu. Les Français chargent et enfoncent la première ligne ennemie commandée par le prince de Salm. Ligneville engage alors sa seconde ligne, puis Condé en fait de même. Pendant ce temps, l’aile gauche connait le même dénouement : la cavalerie de Grammont attend la décharge ennemie, puis charge l’aile droite espagnole. Au même moment, l’infanterie des deux batailles, marchent l’une vers l’autre et s’arrêtent à portée de tir. Au centre de la ligne, les deux bataillons des Gardes Françaises et le bataillon des Gardes Suisses enfoncent trois bataillons ennemis. Mais Beck contre-attaque, avec infanterie et cavalerie, et écrase les trois bataillons des Gardes : « Là le régiment des gardes pour avoir fait sa salve le premier fut taillé en pièces, et le régiment de Picardie qui ne voulut point tirer défit sept régiments entre lesquels était celui qui avait tué le régiment des gardes ; les régiments qu’avait amené Erlach qui étaient Nettancourt, Vaubecourt et autres ne tirèrent non plus que Picardie » écrit notre témoin. Les escadrons de cavalerie français, en sous-nombre, viennent se reformer derrière Picardie entre deux charges.

Châtillon lance alors sa seconde ligne et ses gendarmes pour recueillir les bataillons décimés. Les Espagnols refluent. Voyant le centre espagnol repoussé, d’Erlach choisit de seconder Condé, prenant de flanc la seconde ligne des Lorrains. Tout le front espagnol lâche pied. Au centre, la seconde ligne de l’Archiduc ne peut changer le cours des choses : elle est entraînée dans la retraite. L’infanterie espagnole, dernier rempart, ne résistera pas longtemps : elle se joint à la retraite générale.

L’armée d’Espagne laisse 3 000 morts sur le terrain et 5 000 prisonniers. L’armée française compte 1 500 hommes hors de combat. Le corps des officiers des Gardes Françaises y payera un lourd tribu : les quinze capitaines présents sont tous morts ou blessés.

La victoire de Lens sera la plus achevée et donc probablement la plus belle des victoires de Condé durant la guerre de Trente ans. C’est la première bataille où le plan fut réellement précis, réglé par lui-même dans tous ses détails, et où il a réellement tiré parti de son artillerie.

Ordres de bataille :

Armée française (Condé) : 16 000 hommes en 12 bataillons d’infanterie (10 000 fantassins soit 833 hommes par bataillon) et 40 escadrons de cavalerie (6 000 chevaux, soit 150 chevaux par escadron), 18 canons légers.

Aile droite de cavalerie (Condé, Villequier et Noirmoutiers) :

Première ligne (Villequier et Noirmoutiers : 9 escadrons formés des régiments Gardes de Condé , Son Altesse Royale (duc d’Orléans, 2 escadrons), La Meilleraye (ou Grand-Maïtre), Saint-Simon, Bussy, Streif, Harcourt le Vieux et Beaujeu.

Seconde ligne (Arnaud) : 8 escadrons formés des régiments Chappes (2 escadrons), Coudray, Saarbrück Allemand, Vidame d’Amiens et La Vilette (ex-Gassion, 2 escadons).

Centre d’infanterie (Châtillon et Cossé-Brissac) :

Première ligne (Cossé-Brissac) : 2 batteries d’artillerie et 7 bataillons d’infanterie formés des régiments Picardie et Son Altesse Royale en un bataillon, Erlach-Allemand et Pernol en un bataillon, Gardes Suisses, Gardes françaises (en 2 bataillons), Gardes écossaises, Persan

Deuxième ligne (Châtillon) : 6 escadrons de Gendarmes (formés par les gendarmes de Condé, chevaux-légers de Condé, gendarmes de Choubert, gendarmes de la Reine, gendarmes du Roi, chevaux-légers du Roi, gendarmes d’Enghien, gendarmes S.A.R, gendarmes de Conti, chevau-légers de Conti, chevau-légers d’Enghien, gendarmes de Longueville, gendarmes de Marsillac).

Troisième ligne : 5 bataillons d’infanterie formés des régiments La Reine (y compris 300 hommes de la garnison de La Bassée), Erlach-français, Razilly, Mazarin-Italien, Conti et Condé.

Aile gauche de cavalerie (Gramont et La Ferté-Senneterre) :

Première ligne (La Ferté-Senneterre) : 9 escadrons formés des carabins d’Arnaud et gardes de la Ferté-Senneterre et de Gramont (un escadron), des régiments Cardinal Mazarin (2 escadrons), Gramont (2 escadrons), La Ferté-Senneterre (2 escadrons), et Biens (Allemand, ex-Zillart, 2 escadrons).

Seconde ligne (Plessis-Bellière) : 8 escadrons formés des régiments Roquelaure, Gesvres, Lillebonne,  Noirlieu (ex-Vatimont, 2 escadrons), Meille et Chemerault.

Réserve de cavalerie d’Erlach : 5 escadrons formés des régiments Erlach, Sirot, et Ruvigny.

 

Les régiments bataillons d’infanterie français sont des bataillons réformés modernisés (musket only). Les bataillons de Gardes françaises, Gardes suisses, Gardes écossaises et Picardie sont veterans. Les escadrons de cavalerie sont des escadrons de demi-cuirassés modern cavalry demi-cuirassiers (voir extension Kingdom) et les escadrons de gendarmes sont modern cavalry gendarmes  (voir extension Kingdom). Les 18 canons peuvent être simulés par 3 canons légers (light artillery).

 

Armée espagnole (Archiduc Leopold secondé par Fuensaldana) : 20 000 hommes en 16 bataillons/escadrons d’infanterie (12 000 fantassins soit 750h par bataillon) et 62 escadrons de cavalerie (8 000 chevaux soit 130 chevaux par escadron), 38 canons.

Aile droite de cavalerie (Prince de Ligne et Bucquoy) :

Première ligne : 12 escadrons formés des régiments Bucquoy (Allemands), Savary (Allemands), prince de Ligne (Wallons), del Brouck (Allemand) et compagnies de Ris (Wallons) et Meinssague (Wallons).

Seconde ligne : 12 escadrons formés des compagnies Sandoy (Wallons), Scandalberg (Wallons), Erland (Wallons), Gonni (Wallons), Hurc (Wallons), Scalar (Wallons).

Centre d’infanterie (Beck et Saint-Amour) :

Première ligne : 2 escadrons de croates, 3 batteries d’artillerie, 10 escadrons/bataillons d’infanterie et 4 escadrons de cuirassiers : tercio de Solis en un escadron ;  tercios de Boniface et Desa en un escadron ; 4 escadrons du régiment de cuirassés de Salm (lorrains) ; tercios de Monroy et Beck (allemands) en un escadron ; tercios de Lannoy, La Motterie et Grosbandon (wallons) en un escadron ; 3 petits escadrons de cuirassés Saint-Amour ; tercio de Vargas (espagnols) en un escadron ; tercios de Bentivoglio et Guasco (italiens) en un escadron ; 3 petits escadrons des cuirassés de Diego ; régiment de Touvenin et tercio de Silly (lorrains) en un escadron* ; régiment de Clinchcamp (lorrains) et tercio de Marais (irlandais) en un escadron* ; 4 petits escadrons de cuirassés de Miguel (wallons) ; tercios de Sinot et Plunkett (irlandais) en un escadron* ; régiments de Remion et l’Huilier (lorrains) en un escadron*.

*Les escadrons d’infanterie marqués d’une étoile n’ont pas de piquiers.

Deuxième ligne : 2 escadrons de cuirassés (gardes de Fuensaldana et de l’Archiduc, régiment de Fuensaldana).

Troisième ligne : 6 escadrons/bataillons d’infanterie : régiments Verduisant et Gondrecourt (lorrains) en un escadron ; régiments Wanghen et Arias (allemands) en un escadron ; régiments Hous et Chastelain (allemands et lorrains) en un escadron ; régiments Berlau et Anselm (allemands et anglais) en un escadron, tercio de Toledo (espagnols) en un escadron ; tercios de Bruay et Crevecoeur (wallons) en un escadron.

Aile gauche de cavalerie (Salm et ligniville) :

Première ligne : 10 escadrons formés des régiments de Luneville (wallons), prince Louis de Savoie (wallons), Garnier (wallons), Toledo (wallons) et Bastin (wallons).

Deuxième ligne 10 escadrons formés des régiments de Jaeger de Montauban (fusiliers à cheval lorrains), Ligniville (lorrains), châtelet (lorrains), Hacquefort (lorrains), Fauge (lorrains), Mondragon (lorrains) et Montmorency (lorrains).

 

Les bataillons/escadrons d’infanterie espagnols et wallons sont tercio modernised depleted (1) et classic squadron modernised musket only (pour les régiments allemands) (1). Les quatre régiments de mousquetaires (marqués d’une*) shot company musketeers. Les escadrons de cavalerie sont des escadrons de demi-cuirassés modern cavalry demi-cuirassiers (voir extension Kingdom) sauf les quelques escadrons de gardes qui sont cuirassiers. Les escadrons de croates sont  light horse. Les 38 canons peuvent être simulés par 3 canons moyens (medium artillery) et 4 canons légers (light artillery).

(1) Les bataillons/escadrons « espagnols »semblent en réalité plus petits que les français (750 hommes par bataillon contre 833 pour les français). Et il est peu probable qu’en 1648, les tercios soient encore équipés d’arquebuses. Un tercio/régiment espagnol ou allié de 1648 serait donc mieux simulé par un classic squadron modernised musket only voire un reformed battalion modernised – la principale différence entre ces deux derniers étant le facteur de défense contre l’artillerie (4 au lieu de 3) – que par un tercio. Malheureusement la règle LM Tercio ne le prévoit pas.

Pour une meilleure simulation, je vous suggère néanmoins de jouer les escadrons/bataillonsde tercios et régiments alliés comme  reformed battalion modernised, comme leurs adversaires français.

Les bataillons d’infanterie français sont moins nombreux (12 français vs 16 espagnols) et de taille équivalente (833 hommes en moyenne pour les français et espagnols, ces derniers ayant 4 bataillons sans piquiers pouvant être comptés à 500 hommes). De même, les escadrons de cavalerie français sont moins nombreux (40 français vs 62 espagnols) mais un peu plus gros (150 chevaux en moyenne pour les français et 130 chevaux pour les Espagnols). En réalité, les escadrons de cavalerie espagnols au centre sont plus petits et ceux des ailes plus importants et probablement équivalents aux français. Pour équilibrer et prendre en compte ces différences, il vous suffit d’aligner un seul escadron de Croates (et non deux), et de ne placer que 9 escadrons de cuirassiers au centre : huit en premières lignes placés deux à deux et intercalés avec les tercios et un en seconde ligne.

Ci-dessous : disposition des bataillons et escadrons pour rejouer la bataille de Lens.

Au vu des effectifs, n’hésitez pas à diviser par 2 ou 3 le nombre d’unités.

Et pour terminer, quelques drapeaux de régiments présents à la bataille :

Ci-dessus : Gardes Françaises (deux versions correspondant à 2 compagnies différentes)

Ci-dessus : Gardes Ecossaises

Picardie

 

Persan (supposé)

Condé (supposé)

Mazarin-italien (supposé)

Stéphane Thion

 

La bataille de Nieuport (2 juillet 1600)

La bataille de Nieuport (2 juillet 1600)

Bataille de Nieuport, 2 juillet 1600 lors de la Guerre de Quatre-vingt ans par Sébastien Vrancx (1573–1647)

En 1599, le conseil des États, cherchant à profiter de la faiblesse du gouverneur des Pays-Bas espagnols, l’Archiduc Albert, conséquence des mutineries qui ont éclaté dans l’armée des Flandres, demande à Maurice de Nassau d’intervenir sur la côte maritime. Le prince d’Orange débarque alors près du Sas van Ghent et marche sur Nieuport, avec une armée de 11 à 12 000 hommes. Mais   l’Archiduc Albert va réagir rapidement, menant une force équivalente, dont 1 400 mutins (800 fantassins et 600 cavaliers), et prenant des avant-postes autour d’Oostende. Maurice de Nassau, surpris, parvient à fortifier le pont de Leffigen.

Le 2 juillet à l’aube, l’avant-garde espagnole reprend le pont de Leffigen et débouche sur les dunes de Nieuport.  Maurice de Nassau accepte la bataille. Après-midi, les Espagnols attaquent l’avant-garde hollandaise, constituée des anglais de Veer, sans parvenir à les déloger. L’Archiduc Albert lance alors son corps de bataille dans l’action mais les anglais résistent toujours. La première ligne de Maurice finit par céder, après plusieurs assauts espagnols. Mais sur le flanc gauche espagnole, la cavalerie espagnole est battue. Alors que l’infanterie espagnole progresse, Maurice de Nassau lance sa réserve : 300 cuirassés vont charger avec succès, surprenant l’infanterie espagnole qui commence à reculer. L’infanterie française et hollandaise qui accompagne cette charge de cavalerie, fait alors refluer l’infanterie espagnole.

L’Archiduc perdra 3 600 tués, blessés et prisonniers dans la bataille, Maurice de Nassau perdant pour sa part près de 2 500 hommes, dont 1 000 au pont de Leffigen.


L’armée des Pays-Bas

Général en chef : Maurice de Nassau, prince d’Orange

Avant-garde (aile gauche) – comte Louis de Nassau

Cavalerie : 3 compagnies de cuirassiers en une troupe (Louis de Nassau, Maurice de Nassau & Henri Frédéric de Nassau), 3 compagnies de cuirassiers en une troupe (Marcelis Bacx, Paul Bacx & la Salle) et 2 compagnies de carabins/arquebusiers à cheval (Penny & Battenborch), pour un total de 8 cornettes ou compagnies.

Infanterie :  3 régiments d’infanterie (deux régiments anglais, Francis et Horatius Veer, de 13 & 11 compagnies, un régiment frison, Guillaume de Nassau de 17 compagnies) et 2 compagnies de gardes (prince Mauride de Nassau & comte Hohenlo), en 9 bataillons (4 Anglais, 4 Frisons & Gardes de Nassau).

Artillerie : 2 couleuvrines.

Bataille (centre) – comte George Evrard de Solms

Cavalerie :

Cavalerie : 4 compagnies de cuirassiers (George Everard de Solms, Frédéric de Solms, Jean Bacx, Cloet) en une troupe et 3 compagnies de cuirassiers en une seconde troupe (Godard de Bale, Vere, Cecilieu), le tout faisant 7 compagnies. Cloet & Cecilieu sont peut-être des compagnies de carabins.

Infanterie : un régiment wallon (comte Henri Frédéric de Nassau à 9 compagnies), un régiment suisse à 4 compagnies suisses, un régiment français (Dommerville, à 12 compagnies), le tout en 3 bataillons.

Artillerie : 1 fauconneau.

Arrière-garde – Olivier van der Tempel

Cavalerie : 3 compagnies de cuirassiers (Harangier, Hamelthon & Couteler). Les 3 compagnies sont regroupées en un escadron (cuirassiers).

Infanterie : 3 régiments d’infanterie (Ernest de Nassau à 13 compagnies, Gistelles à 8 compagnies & Huctenbrouck à 7 compagnies), le tout en 4 bataillons (2 hollandais & 2 allemands).

 

L’armée de Maurice compte 10 000 fantassins en 17 bataillons, 1 200 cavaliers en 19 cornettes et 6-8 pièces d’artillerie. Un bataillon d’infanterie comprend 50% de piques et 50% de tireurs. Les tireurs sont équipés pour 1/3 d’arquebuses et pour 2/3 de mousquets.

Les bataillons d’infanterie sont des batailllons réformés., les escadrons de cuirassiers sont cuirassiers (pistolet), les carabins/arquebusiers sont arquebusiers montés.

Echelle de réduction : Pour l’infanterie, prendre un bataillon réformé pour deux bataillons réels (8 bataillons dont 4 à l’avant-garde, 2 à la bataille et 2 à l’arrière-garde) et un escadron pour 6 compagnies/cornettes de cuirassiers/arquebusiers (3 escadrons de cavalerie soit 1 escadrons de cuirassiers à l’avant-garde, 1 escadrons de cuirassiers à la bataille et 1 escadron de cuirassiers à l’arrière garde). Pour l’artillerie, prendre deux artilleries moyenne.

 

L’armée Espagnole

Général en chef : Archiduc Albert d’Autriche

Avant-garde (aile droite) – François de Mendoza, Admirant d’Aragon

Infanterie (centre) : un escadron formé des mutins de divers tercios.

Cavalerie aile gauche : une compagnie de lanciers et une compagnie d’arquebusiers à cheval formant un escadron de lanciers.

Bataille (centre) – Archiduc Albert

Infanterie (centre) : un escadron composé des tercios de Monroy & de Villar et un escadron composé des tercios de Zapena & d’Aquino.

Cavalerie (centre) : les 3 compagnies de gardes de l’Archiduc soit 1 compagnie de cuirassiers, 1 compagnie de lanciers et 1 compagnie d’arquebusiers à cheval, formant un escadron de cuirassiers.

Artillerie : 2 couleuvrines.

Arrière-garde (aile gauche) – comte de Bucquoy

Infanterie (centre) : un escadron formé des tercios de Bostock (Irlandais), de Bucquoy et de la Bourlotte (Wallons).

Cavalerie de l’aile gauche : 4 compagnie d’arquebusiers à cheval, 4 compagnie de lanciers et 4 compagnies de cuirassiers sur 3 lignes. Soit un escadron d’arquebusiers, un de lanciers & un de cuirassiers.

 

L’armée espagnole compte 6 800 fantassins (dont 800 mutinés) en 4 escadrons de 1 600 à 1 800 hommes, 1 000 à 1 200 cavaliers (dont 600 mutinés) en 17 compagnies de 60-70 chevaux par compagnie et 4-6 pièces d’artillerie.

Les quatre escadrons espagnols sont tercios et field square (option de les passer tercios viejos field square pour équilibrer les budgets). Les cuirassiers sont cuirassiers, les lanciers sont cuirassiers avec lances, les arquebusiers montés sont arquebusiers montés.

Echelle de réduction : prendre un escadron d’infanterie (tercio) pour un réel et un escadron de cavalerie pour 6 compagnies (400 chevaux) soit 1 escadron de lanciers, 1 escadron de cuirassiers et 1 escadron d’arquebusiers montés (à répartir comme vous le souhaitez dans les différents corps). Pour l’artillerie, prendre 2 artilleries moyennes.

Pour les généraux :selon votre choix, à adapter afin d’équilibrer les budgets des deux armées.

Stéphane Thion

L’armée espagnole à Rocroi (mai 1643)

L’armée espagnole à Rocroi (mai 1643)

A Rocroi, l’armée des Flandres est commandée par don Francisco de Mello. Le duc d’Albuquerque vient d’en être nommé général de la cavalerie et Alvaro de Mello, frère de Francisco, en est le général de l’artillerie. Cette armée est scindée en plusieurs corps : l’armée de Brabant, commandée par don Andrea Cantelmo ; un corps rassemblé en Hainaut, commandé par le comte de Bucquoy ; un corps rassemblé du côté de Namur, commandé par Issembourg et un corps destiné à défendre le Luxembourg et à secourir la Bourgogne, commandé par le baron Beck. L’armée de France sera constituée à partir des corps de Bucquoy et d’Issembourg, et le comte de Fontaine sera nommé mestre de camp général de cette armée. Pour la bataille, le sergent-major de bataille, équivalent au maréchal de bataille français, sera don Jacinto de Vera.

Ci-dessus : Etat-Major espagnol à Rocroi (Aquarelle de K.A. Wilke)

L’infanterie d’Espagne

Les tercios seront, durant les guerres de Quatre-vingt et de Trente ans, le bras armé du roi d’Espagne. Et les tercios viejos en sont les unités les plus redoutées.

Un tercio compte, depuis 1632, 12 compagnies de 250 hommes, ou 15 compagnies de 200 hommes pour un tercio levé en dehors de la péninsule ibérique, soit un effectif total  de 3 000 hommes. L’ordonnance de 1632 tolère les tercios à 20 compagnies et en pratique certains auront jusqu’à 26 compagnies. Mais aucun de ces tercios n’atteindront l’effectif théorique de 3 000 hommes. Une compagnie au complet doit compter 11 officiers (un capitaine et son page, un alférez, un enseigne ou abanderado, un sergent, deux tambours, un fifre, un fourrier, un barbier et un chapelain) et 239 soldats dont 90 piquiers en cuirasse (coseletes), 89 arquebusiers et 60 mousquetaires. Dix caporaux (cabos de escuadra) font parti de ce total. La compagnie de 200 hommes doit compter, pour sa part, 70 piquiers coseletes, 90 arquebusiers et 40 mousquetaires. L’état-major permanent du tercio comprend, en plus du mestre de camp, 7 officiers supplémentaires. L’habitude prise par les fantassins de toutes nations d’alléger leur équipement, en se débarrassant de leurs cuirasses et en raccourcissant leurs piques, n’est pas du goût des autorités et l’ordonnance de 1632, modifiée l’année suivante, tente désespérément d’endiguer cette pratique. Elle prévoit cependant que les piquiers moins biens équipés soient placés dans les rangs arrières.

 

Certains tercios sont permanents, ou fixes, comme les régiment entretenus français. Les principaux tercios fixes de l’armée de terre sont (avec le nom de leur mestre de camp en 1643), les tercio viejo de los Estados de Flandes (comte de Garcies), tercio viejo de los estados de Brabante (comte de Villalba), tercio viejo de los Estados de Holanda (duc d’Albuquerque puis Baltasar Mercader), tercio fijo de Napoles (prince d’Ascoli), tercio fijo de Lombardia (Antonio de Velandia), tercio fijo de Sicilia (Francisco de Castilla), et le tercio de Saboya (Vicente Monsoriu). La Marine peut de son côté compter sur ses propres tercios stationnés en Espagne, à Naples et en Sicile.

Aux tercios purement espagnols s’ajoute l’infanterie dite des nations, levée dans les territoires dépendant de la couronne d’Espagne : Flandre, Bourgogne, Sicile, Naples et Lombardie. Les tercios italiens et bourguignons suivent la même organisation que les tercios espagnols, soit 12 compagnies de 250 hommes. Les tercios wallons suivent pour leur part l’organisation des tercios espagnols des Flandres, soit 15 compagnies de 200 hommes. Mais chaque compagnie wallonne compte théoriquement 12 officiers, 46 piquiers et 142 mousquetaires. Les règlements pour faire recrue de nation wallonne prescrivent que chaque mestre de camp doit nommer, pour chaque compagnie, un officier, deux vieux soldats et un tambour, et les envoyer aux quartiers qui leurs seront désignés. Les recrues devront être effectuées dans les pays de Hainaut, de Brabant, de Lille, de Flandre, d’Oudenarde et de Bergue. « Tous maîtres de camp soigneront sérieusement que pendant le temps de ces quarante jours, ils fassent bien ajuster les mousquets et armes à feu de leurs vieux soldats, et pour les piques ils prendront le patron de la longueur et des fers accordés avec Herscamp, marchant de Namur, dont chaque maistre de camp envoyera quérir un patron pour à l’avenant armer les piquiers de son tercio. (…) Tous les maistres de camp seront avertis qu’ils ne pourront enrôler en leurs tercios pour arquebusiers que des forts et robustes garçons, et ne soient plus jeunes que de dix-sept à dix-huit ans. » Les régiments allemands et lorrains au service de l’Espagne sont organisés sur le modèle allemand, en 10 compagnies de 250 ou 300 hommes.

Il s’agit là bien sûr d’effectifs théoriques, peut-être atteints par certains régiments nouvellement levés. En pratique, les effectifs réels s’en éloignent rapidement. En 1634, pour la campagne de Nördlingen, le tercio d’Idiaquez ne compte que 1 800 hommes pour 26 compagnies et le tercio de Fuenclara, 1 450 hommes pour 17 compagnies. De fait, les escadrons espagnols, équivalent aux bataillons français, ne dépasseront que rarement le millier d’hommes. Ils se déploient maintenant comme leurs homologues des autres nations, sur 6 à 8 rangs, les piques formant le bloc du centre, arquebuses et mousquets disposés sur leurs flancs.

Les hommes d’un tercio ne reçoivent leur solde que par tiers. Un tiers au début du mois et le second tiers quinze jours plus tard. Le troisième tiers est retenu pour l’achat de la poudre, des mèches et l’entretien ou le remplacement des équipements. Don Bernardino de Mendoza affirmait que le soldat espagnol diffère de celui des autres nations parce qu’il réclame sa solde uniquement après avoir combattu.

La cavalerie de Philippe IV

La cavalerie d’Espagne ne bénéficie pas de la même réputation que l’infanterie. Et la part des nations au sein de la cavalerie du roi d’Espagne n’en est que plus importante. La cavalerie espagnole dépend d’un capitaine général, assisté d’un lieutenant général, de quatre adjudants, et d’un fourrier-major. Mais, jusqu’à 1642, elle ne bénéficie d’aucune organisation régimentaire. Les compagnies de 25 à 40 chevaux sont regroupées de façon temporaire par des commissaires généraux. Pour combattre, elles sont réunies en escadrons commandés par le plus ancien des capitaines. La cavalerie des nations est pour sa part organisée en régiments regroupant de 5 à 10 compagnies, commandés par un colonel assisté d’un lieutenant-colonel, d’un sergent-major et d’adjudants. La cavalerie espagnole sera aussi organisée en régiments à partir de 1642, apparemment en régiments de 6 compagnies de 100 chevaux.

Les caballos corazas, similaires aux chevaux légers français, forment le corps de cette cavalerie. Comme pour leurs homologues français, l’équipement des cavaliers s’est allégé durant les années 1630, ne consistant plus qu’en une cuirasse à l’épreuve du pistolet, portée sur un buffle, deux pistolets d’arçon et une salade (ou pot). En 1648, Grammont rapporte dans ses Mémoires que les escadrons espagnols, qui s’apprêtent à recevoir la charge de la cavalerie française, « n’avaient point l’épée à la main, mais comme tous les cuirassiers espagnols portent en Flandre des mousquetons, ils les tenaient en arrêt sur la cuisse, de même que si c’eut été des lances ». Rien ne semble donc maintenant les distinguer des arquebusiers à cheval. Les compagnies de gardes, que ce soient celles du gouverneur, du général de la cavalerie ou du lieutenant général, sont probablement mieux équipées, à l’image des gendarmes français. Le gouverneur des Flandres possède deux compagnies particulières de gardes, une compagnie d’arquebusiers et une compagnie de lanciers. Les Espagnols resteront en effet la dernière nation d’Europe occidentale à utiliser des lanciers, même si on ne les trouve plus, en 1643, qu’au sein de cette compagnie de gardes.

L’artillerie

Selon Diego Ufano Velasco, l’artillerie espagnole ne compte plus, depuis 1609, que quatre calibres : le canon tirant 40 livres de balles, le demi-canon tirant 24 livres de balles, le quart de canon tirant 10 livres de balles et le quint de canon – auquel on peut substituer la quart de couleuvrine – tirant 5 livres de balles. Cette artillerie se révélera mieux servie que celle de son adversaire.

Ci-dessus et ci-dessous : 2 variantes du drapeau du tercio d’Albuquerque.

Stéphane Thion

(Illustrations de Daniel Cabrera-Pena).

La bataille de Rocroi (19 mai 1643)

La bataille de Rocroi (19 mai 1643)

Prélude à la bataille

Louis XIII, alors très affaibli, rassemble son conseil le 20 avril,  pour annoncer qu’à sa mort, la Reine prendrait la régence du Royaume. Gaston d’Orléans, son frère, sera lieutenant général de l’État et des armées ; le prince de Condé, chef du Conseil ; le cardinal Mazarin, ministre non destituable. Alors que cette décision entraîne de nombreuses intrigues à la cour, les  Espagnols vont essayer de profiter de la situation.

Le duc d’Enghien – futur Grand Condé – vient d’être nommé général de l’armée de Picardie par le Roi. Le jeune duc est à Amiens le 20 avril où il rassemble ses troupes estimées à 25 000 hommes dont 7 000 chevaux. Il prend alors les affaires en main, logeant toutes ses troupes dans des places fermées pour éviter qu’elles ne se débandent tout en se réservant la possibilité de les concentrer rapidement. Le lendemain, il reçoit une première estimation des forces ennemies, évaluées à 15 à 16 000 hommes de pied et 6 à 7 000 chevaux. Le maréchal de Guiche, qui est à Arras, lui écrit qu’il a du mal à pénétrer le dessein de l’ennemi, mais que les troupes de Bucquoy viennent de joindre celles de Francisco de Melo. Le 25 avril, Enghien apprend que l’ennemi semble vouloir prendre l’offensive sur Arras. Le 9 mai, Enghien donne rendez-vous à toute la cavalerie sur l’Oise et à son infanterie sur la rivière Authie. Puis, ayant appris que don Francisco de Melo marchait sur Valenciennes, il décide de reporter le rendez-vous de l’armée à Ancre, ordonnant à Espenan et au marquis de Gesvres de tenir prêts leurs corps d’armée respectifs.

Le 12 mai, les événements se précipitent : alors que le jeune duc est à Moislains, sept kilomètres au nord de Péronne, il apprend que les ennemis se dirigent vers Landrecies et que le comte d’Issembourg s’est présenté sous les murs de Rocroi, avec toute sa cavalerie et 1 200 fantassins. Celui-ci sera rejoint le lendemain par don Francisco de Melo. Enghien envoie aussitôt des partis en reconnaissance au-delà de l’Escaut. Il arrive le 14 mai à Fervaques, près de Saint-Quentin, sur la Somme, où il apprend la mort du Roi. Il écrit à son père, le prince de Condé, que « les ennemis ne sont qu’à une journée de moi, et que demain nous serons en présence ». Il situe les Espagnols à Hirson et leur prête l’intention d’entrer en France par Vervins. Enghien part alors pour Foigny, au nord-est de Vervins, où il dresse le camp le 16 mai. Il assure à Mazarin qu’il marchera le lendemain sur Rocroi, assiégée depuis la veille, pensant y être le 18. Il donne alors l’ordre à Gassion et à ses 1 500 chevaux d’aller camper à Bossu dès le lendemain, lieu où il a donné rendez-vous à l’armée de Champagne du marquis de Gesvres. Gassion s’exécute, repoussant devant lui les postes avancés ennemis, et parvient à jeter un secours de 100 fusiliers du Roi et 25 ou 30 de ses gardes dans Rocroi. Enghien fait sa jonction avec Espenan et Gesvres le 17, à Brunchamel, et arrive le soir même à Bossu où il retrouve Gassion.

La place de Rocroi a été fortifiée de cinq bastions et protégée de quelques demi-lunes, c’est à dire des ouvrages avancés en forme de croissant. Le tout, défendu par un peu plus de 500 soldats, parait trop fragile aux Français qui craignent que sa prise n’ouvre la route de Paris.

Gassion avait reconnu deux défilés traversant le bois de Fors et permettant de déboucher dans la plaine au sud de Rocroi. Ces défilés qui permettent d’accéder au plateau de Rocroi sont étroits et tortueux. Le 18 mai, la voie est libre et Enghien envoie Gassion avec les Croates et les fusiliers du Roi prendre pied dans la plaine. Puis, il envoie, vers 13 heures, l’aile droite de son avant-garde, c’est à dire les régiments de cavalerie Royal, Gassion (ou mestre de camp général), Lenoncourt, Coislin et Sully pour passer le défilé. Cette avant-garde sera suivie des autres corps. Dès 14 heures, la cavalerie commence l’escarmouche avec l’ennemi pour protéger le déploiement de l’armée. Ces combats d’avant-garde dureront près de 3 heures, durant lesquelles les différents corps se mettent en bataille, au fur et à mesure de leur arrivée. Cette facilité avec laquelle l’armée française parvient à déboucher des défilés est déconcertante. Enghien a tenté sa chance et le destin lui sourit déjà.

Cependant Melo ne reste pas inactif. Il part reconnaître les meilleures positions pour recevoir l’ennemi. Il considère alors qu’il ne peut rester derrière le marais, n’ayant pas assez de place pour déployer ses bataillons d’infanterie et ses escadrons de cavalerie. Il décide donc de déployer ses troupes en rase campagne pour y retenir l’ennemi tout en continuant le siège de Rocroi. Il passe le marais et gagne une éminence qui dominait la campagne. Mais le temps lui manque, et il confie le déploiement du corps de bataille au comte Fontaine. Il est probablement entre 16 et 17 heures lorsque que La Ferté-Seneterre qui commande la gauche française, prend une malheureuse initiative : il fait traverser le marais à toute son aile cavalerie et  5 bataillons d’infanterie dans le but de jeter du secours dans Rocroi, sans en avertir le duc d’Enghien. Celui-ci stoppe alors à ses troupes, et fait combler les espaces laissés vides. L’ennemi ne se serait pas aperçu de cette fausse manœuvre. L’armée espagnole  qui progressait alors vers les lignes françaises, s’arrête à 400 pas mais ne semble pas vouloir engager le combat. Il est maintenant 17 heures. Alors que toute l’armée française se déploie, Melo place ses troupes en hauteur. Les deux armées sont à portée de mousquet et l’artillerie espagnole ouvre le feu. Un quart d’heure plus tard, l’artillerie française lui répond. Enfin, entre 18 et 19 heures, le dernier corps français, la réserve du baron de Sirot, débouche et se déploie. Il est probablement 21 heures lorsque la nuit tombe, faisant cesser la canonnade.

La bataille

Gassion commande l’aile droite avec le duc d’Enghien, la Ferté Seneterre l’aile gauche, d’Espenan l’infanterie du centre et Sirot la réserve. L’infanterie d’Espenan se retrouve donc partagée entre les deux ailes, Picardie, La Marine, Persan, les deux bataillons de Molondin, et les bataillons de seconde ligne dans les intervalles font partie de l’aile droite du duc d’Enghien.

La bataille s’engage à quatre heures du matin.  Les deux ailes marchent alors de concert. L’aile droite commandée par le duc se heurte aux mousquetaires tapis dans un repli de terrain à la lisière d’un bois : ils sont entre 500 et 1000 selon les sources. Gassion les met en fuite.

Sur l’autre aile, la cavalerie de l’Hôpital a mal préparé sa charge : la première ligne de cavalerie de La Ferté-Seneterre s’est avancée vers celle d’Issembourg mais, ayant lancé sa charge de trop loin, et malgré quelques succès ponctuels, est fermement ramenée dans ses lignes, son chef blessé et prisonnier. L’infanterie de d’Espenan aurait suivi le mouvement mais fut aussi repoussée. Les Lorrains, poursuivant les Français, tombent sur l’artillerie laissée sans protection, l’infanterie l’ayant probablement traversée pour se porter en avant. De la Barre, en charge de cette artillerie, trouve la mort en défendant ses canons, et sa batterie est prise. Le maréchal de l’Hôpital tente de rallier les fuyards, sans succès. Il se serait alors mis à la tête de la seconde ligne de cavalerie, et aurait repris en main la situation. C’est à ce moment là que le maréchal de l’Hôpital aurait envoyé l’ordre à Sirot de s’avancer avec sa réserve. Celui-ci parvient à repousser la cavalerie ennemie.

C’est sur l’autre aile que va se décider le sort de la bataille. La première ligne de l’aile droite de Gassion aligne la fleur de la cavalerie française. Les régiments Royal et Mestre-de-camp général en forment la tête, c’est à dire l’extrême droite, juste avant les Croates. Le régiment Royal, sous les ordres de François Barton vicomte de Montbas, sera un des héros de la journée. Ce régiment est l’ancien Cardinal-duc, un des douze premiers régiments organisés par le cardinal de Richelieu le 16 mai 1635. Ce 19 mai, Royal est épaulé à sa gauche par le second régiment d’élite de la cavalerie française, celui de Gassion, levé en 1633, qui a pris le titre de Mestre de camp général. Les gardes de Condé et trois régiments de cavalerie (Lenoncourt, Coislin et Sully) complètent cette première ligne, qui compte, avec les Croates de l’extrême gauche, 1 500 chevaux. La seconde ligne est composée de régiments français, liégeois et weimariens qui ont l’habitude de combattre avec le mestre de camp général. Comme à son habitude, Gassion a intercalé entre ses régiments de cavalerie des pelotons de mousquetaires.

Enghien donne l’ordre à Gassion de faire le tour du bois, avec sa première ligne de cavalerie, ce qu’il fait en s’étendant sur sa droite. C’est donc Enghien qui, à la tête de la seconde ligne, va affronter la plus grande partie de la cavalerie espagnole. Mais la manœuvre à effectuer est compliquée : les escadrons de seconde ligne doivent pendre la place de la première ligne entre les pelotons de mousquetaires. Puis c’est le choc entre Albuquerque et Enghien, avec un résultat contrasté. Deux ou trois escadrons français et deux pelotons de mousquetaires semblent rompus. Dans leur poursuite, les escadrons espagnols atteignent quelques pièces d’artillerie, les prenant pour un temps. Mais la droite de l’infanterie française est occupée par le régiment de Picardie qui repousse la cavalerie espagnole. Il semble que le futur Grand Condé a choisi de recevoir la cavalerie espagnole avec la moitié de ses escadrons, pour donner le temps à Gassion de la déborder. Et ce sont donc les escadrons de première ligne qui prirent de flanc leurs adversaires flamands, espagnols et italiens. Quelques escadrons du duc d’Albuquerque refluent entre les lignes de l’infanterie, à l’abri derrière les réconfortantes citadelles que forment les tercios, d’autres prennent la fuite. Les escadrons de Gassion chargent alors les bataillons espagnols, wallons et italiens, sans succès. Pendant ce temps, les Croates de Raab contournent la gauche d’Albuquerque, harcelant les escadrons qui se replient ou pillant les camps espagnols.

Pendant que les deux ailes de cavalerie s’affrontent, l’infanterie française s’avance vers la première ligne espagnole. Mais Espenan, inquiet du reflue français sur sa gauche, se contente d’escarmoucher avec la première ligne espagnole.

À l’aile gauche,  Sirot, après avoir réorganisé sa réserve, reçoit une nouvelle charge de la cavalerie allemande. Mais celle-ci, non soutenue par son infanterie, a perdu son entrain. D’autant plus qu’à ce moment là, Issembourg n’est plus avec ses escadrons : il tente de reformer les régiments d’infanterie allemands, les faisant pivoter pour faire face à la cavalerie de Gassion. Prise de flanc par les escadrons de Gassion, l’infanterie wallonne et allemande part en déroute. De leur côté, les trois tercios italiens préfèrent prendre la fuite, se repliant à travers les bois.

Il est 9 heures passé. « Restait cette redoutable infanterie de l’armée d’Espagne » écrira Bossuet. Alors que quelques escadrons de Gassion, ayant chassé les Wallons, les Italiens et les Allemands du champs de bataille aborde les derniers escadrons d’Issembourg, il ne reste plus que l’infanterie espagnole, resserrée en un seul corps auprès du canon. Mais Enghien sait que Beck n’est pas loin, avec 4 000 hommes en renfort. Il va donc lancer plusieurs attaques pour venir à bout de cette muraille de piques. Trois assauts s’enchaînent, avec des succès contrastés. Ces premiers assauts vont venir à bout des deux plus anciens tercios viejos, ceux de Villalba et de Velandia, dont la résistance fut exemplaire. Il ne reste alors que trois tercios, ceux de Garcies, d’Albuquerque et de Castelvi. Leur résistance va être d’autant plus héroïque. Pour en venir à bout, les attaques d’infanterie et de cavalerie sont combinées de tous côtés.  Les escadrons français viendront « 5 ou 6 fois à la décharge » sur l’infanterie espagnole « sans qu’ils la pussent rompre ». Face à cette muraille invulnérable, Enghien propose alors aux Espagnols de se rendre, en échange de sa grâce. Si cette proposition est refusée, il détruira l’escadron espagnol, qui compte alors 3 000 hommes, avec l’artillerie chargée à mitraille. Mais des trois mestres de camp restants, deux répondirent « qu’ils ne se rendaient pas et qu’ils préféraient mourir en se battant ». Les assauts reprennent donc, sans succès. Enghien, toujours inquiet d’une arrivée de Beck, fait alors une seconde offre. Et cette fois-ci, il leur « offre quartier, c’est à dire la vie sauve, et en somme une capitulation comme une place forte. Et ce qu’il leur fut demandé (ce ne pouvait être moins) est qu’abandonnant leurs armes, ils conservaient leurs vies et leurs biens » écrira un historien espagnol du XVIIe siècle. Les mestres de camp du dernier escadron vont accepter, ayant été assuré qu’ils pourront traverser la France pour retourner en Espagne « avec leurs bannières au vent, leur équipage et leurs armes ». Deux mille cinq cents Espagnols traverseront ainsi le pays jusqu’à Fontarabie. Il est probablement 10 heures. Le comte de Fontaine et les mestres de camp des deux plus anciens tercios, Villalba et Velandia, sont morts. Garcies, Castelvi et le sergent-major Peralta ont capitulé. Tout est fini.

Alors, selon Bessé, « le duc d’Enghien, voyant sa victoire entièrement assurée, se met à genoux au milieu du champ de bataille et commande à tous les siens de faire la même chose pour remercier Dieu d’un succès si avantageux. »

 

L’armée espagnole de Francisco de Melo

Aile droite espagnole : Issembourg

Cavalerie allemande : 14 escadrons pour 3000 chevaux (dont le régiment de cuirassiers de Rittburg et probablement les Gardes d’Issembourg, les régiments Savary, Vera et Donquel) soit 210-220 chevaux par escadron.

Première ligne : 6 escadrons lorrains plus un escadron de Croates.

Seconde ligne : 6 escadrons allemands plus un escadron de compagnies franches.

Centre : comte de Fontaine

Première ligne : 5 tercios Espagnols formant un bataillon chacun en première ligne avec deux pièces d’artillerie entre chaque bataillon (tercio du duc d’Albuquerque, tercio de don Antonio de Velandia, tercio du comte de Villalba, tercio du comte de Garcies et tercio sarde de Georges Castelvi), pour un effectif estimé de 5500 h

Seconde ligne : 4 tercios italiens et bourguignon formant chacun un bataillon (Strozzi, Visconti, Delli Ponti  et Philippe de la Baume, comte de Saint-Amour), pour un effectif estimé de 6500 h

Troisième ligne : 5 tercios wallons formant chacun un bataillon (prince de Ligne, Ribaucourt, la Grange, Meghem et Bassigny) pour un effectif estimé de 2500 h

Quatrième ligne : 5 régiments allemands formant chacun un bataillon (Ritberg, Frangipani, Hembise, Guasco et Rouvroy) pour un effectif estimé de 2500 h

L’ensemble de l’infanterie est estimée à 17 000 homme et 18 canons.

Aile gauche espagnole : duc d’Albuquerque

Cavalerie wallonne : 5-6 régiments en 15 escadrons pour 2000 chevaux soit 130-135 chevaux par escadron (régiments non connus, les Gardes d’Albuquerque sont probablement présents).

Première ligne : 8 escadrons wallons.

Seconde ligne : 6 escadrons wallons.

En embuscade dans le bois : 500-1000 mousquetaires.

L’armée espagnole à LM Tercios :

Les 5 tercios espagnols sont Tercios viejos modernised. Les tercios bourguignons et italiens sont tercios modernised. Les 5 tercios wallons et les 5 tercios allemands sont tercios modernised & depleted.

Les 500-1000 mousquetaires seront représentés par 2 compagnies de tireurs (shot companies, musket).

Les escadrons espagnols, allemands et de compagnies franches sont cuirassiers modern cavalry (modern cavalry demi-cuirassiers si vous avez le supplément Kingdom). L’escadron de Croates est light horse, pistol. Passer les gardes d’Issembourg et d’Albuquerque (1 escadron sur chaque aile) en elite.

Représenter l’artillerie par de l’artillerie moyenne (un canon pour 3 pièces réelles par exemple).

 

 

L’armée française du duc d’Enghien

Aile droite : Duc d’Enghien et Gassion

Premier échelon, de droite à gauche (Gassion, 10 escadrons de cavalerie avec 6 manches de mousquetaires commandés) : Gardes d’Enghien, Croates de Raab, Croates de Chack, régiments Royal, Mestre-de-Camp Général, Lenoncourt, Coislin, Sully, 6 unités de 200-300 mousquetaires commandés.

Second échelon, de droite à gauche (Enghien, 5 escadrons) : régiments Roquelaure, Menneville, Sillart, Leschelle et Vamberg.

Au total : autour de 3300 chevaux (220 chevaux par escadron) et 1500 mousquetaires.

Centre : d’Espenan

Première ligne, de droite à gauche (d’Espenan, 8 bataillons) : Picardie, La Marine, Persan, 1er bataillon de Molondin, 2nd bataillon de Molondin, Bourdonné-Biscarras, Rambures et Piémont, 12 canons (pièces de 4 à 8 livres).

Seconde ligne, de droite à gauche (La Vallière, 7 bataillons) : Vervin-La Prée, Vidame, 1er bataillon de Wateville, Gardes Ecossaises, Roll, Brézé-Langeron, et Bussy-Guiche.

Troisième ligne (Sirot, 3 bataillons et 4 escadrons) : 1 bataillon formé de Harcourt, Aubeterre et Gesvres, 2nd bataillon de Wateville, Les Royaux. 4 escadrons de chevau-légers (Charost, 3 companies de Gendarmes, 3 compagnies et Sirot) sont intercalés entre ces 3 bataillons d’infanterie. Les compagnies de gendarmes réunies en deux escadrons sont La Reine, Écossais, de Longueville, d’Angoulême, de Guiche et de Vaubecourt.

Infanterie : 13 000 fantassins pour 18 bataillons et 4 escadrons de cavalerie faisant 800 à 900 chevaux.

Aile Gauche : L’Hôpital

Premier échelon, de droite à gauche (La Ferté, 8 escadrons de cavalerie avec 6 manches de mousquetaires commandés) : régiments La Clavière, Beauvau, La Ferté, Guiche, Fusiliers à cheval, 6 unités de 200-300 mousquetaires commandés.

Second échelon, de droite à gauche (l’Hôpital, 5 escadrons de cavalerie) : régiments Netaf, Coislin, Marolles, Heudicourt et Harcourt.

Au total : autour de 2800 chevaux (220 chevaux par escadron) et 1500 mousquetaires.

L’armée française à LM Tercios :

Les bataillons d’infanterie sont des bataillons réformés (reformed battalion). Les bataillons de Piémont, Picardie, La Marine, Rambures, les Gardes Ecossaises (ancien régiment écossais d’Hepburn, alors au service de la Suède) et les Royaux sont veteran.

Les escadrons de cavalerie sont cuirassiers modern cavalry (modern cavalry demi-cuirassiers si vous avez le supplément Kingdom). L’escadron de Croates est light horse, pistol. Passer les gardes d’Enghien en elite et les escadrons des régiments Royal et Mestre-de-Camp Général en veteran. Les 2 escadrons de gendarmes sont cuirassiers veteran ou modern cavalry gendarmes, si vous avez l’extension Kingdom. L’escadron de Croates est light horse, pistol.

Les compagnies de mousquetaires sont shot company musketeers & commanded shot.  Prendre 6 de ces compagnies (3 sur chaque aile, en première ligne, intercalées avec des escadrons de cavalerie).

Représenter l’artillerie par de l’artillerie moyenne (un canon pour 3 pièces réelles par exemple). Un quart de cette artillerie peut être passée artillerie légère.

Pour les deux armées :

Si vous n’avez pas assez de figurines, n’hésitez pas à diviser tous les effectifs par 2 ou plus.

Déploiement

 

Drapeaux et banderas

Pour les drapeaux français et banderas de tercios, voir l’article sur le sujet ici.

 

Stéphane Thion

Source : Stéphane Thion, La bataille de Rocroi, Editions Histoire & Collections.

L’armée transylvaine de Gábor Bethlen (1618-1628)

L’armée transylvaine de Gábor Bethlen (1618-1628)

Gábor Bethlen succéda à Gábor  Bathory comme prince de Transylvanie. Calviniste, il mettra tout en oeuvre pour faire prospérer la nation hongroise et la protéger à la fois contre les Turcs et l’Empire des Habsbourg. Il interviendra ainsi dans la première phase de la Guerre de Trente Ans, jusqu’à sa mort, en 1629. Il combattra notamment au côté des états protestants révoltés contre Ferdinand II, empereur germanique mais aussi roi de Hongrie. Gábor Bethlen commencera ainsi à assiéger Vienne en 1619, avant de lever le camp par manque de soutien protestant. Il repartira en campagne en 1622, guerroyant en Haute-Hongrie, jusqu’à la paix de Presbourg, en 1626.

L’armée de Gábor Bethlen consistait en de la cavalerie, de l’infanterie et de l’artillerie mais avec une forte dominante de cavalerie. La cavalerie était armée de la lance, de l’épée, du poignard et du pistolet. L’arme principale de l’infanterie était le mousquet et le sabre. L’infanterie transylvaine de Bethlen n’était pas armée de piques. Ses troupes légères, cavaliers et piétons, étaient recrutées parmi les Hongrois (haiduks, hadjùs et Hussars), mais aussi les Turcs, Tartares, Moldaves et Valaques. Les mercenaires turques, tatares, moldaves et valaques pouvaient être nombreux. Ainsi, en 1623, Gábor Bethlen, ayant négocié avec la Porte, reçu le renfort des Turcs, qui joint avec ses troupes hongroises, transylvaines et valaques, faisait une armée de 40 000 hommes.

Les hadjùs libres étaient des bergers hongrois équipés et armés, recrutés comme mercenaires. Il servaient comme cavalerie ou infanterie légère. L’infanterie légère hadjù, privilégiait les embuscades. Leur armement était composé d’un mousquet court ou d’une carabine, d’un sabre et d’une hache. Les cavaliers hadjùs ajoutaient la lance à cette armement. Les haiduks étaient des arquebusiers hongrois. Les Hussars étaient des cavaliers hongrois réputés pour leur habileté. Les hussards hongrois privilégiait la lance et le sabre ou la hache au combat. Les hussards les mieux équipés étaient équipés d’un casque de type capeline, d’une cuirasse, d’un haubert de maille et de protège-bras.

Le prince de Transylvanie avait aussi accès au recrutement de troupes hongroises, de cosaques polonais, ainsi que de mercenaires occidentaux, notamment allemands, tchèques, moraves et silésiens. Ce sont ces derniers qui fournissaient les régiments de piquiers et mousquetaires, de dragons ou mousquetaires montés et de cuirassiers. Gábor Bethlen avait aussi l’habitude de recruter les mercenaires de son adversaire. Ce fut notamment le cas avec les troupes hongroises de Ferdinand, qui sont volontairement passées au service du prince de Transylvanie à plusieurs reprises. Les mercenaires allemands étaient les plus réputés. Lors de ses premières campagnes, ceux-ci étaient néanmoins peu nombreux, ne comptant que 4000 fantassins et 2000 cavaliers.

 

Les mercenaires de Gábor Bethlen était suppléés par le recrutement de nobles hongrois et de levées transylvaines du Comté, notamment des Székely. Les Székely formaient une grande part des armées transylvaines. Les plus riches servaient comme cavaliers alors que l’homme commun servait dans l’infanterie comme mousquetaire. Cette infanterie était vêtue de rouge, ce qui les faisaient désignés comme Trabants rouges. Les Trabants rouges devaient répondre à l’appel aux armes de leur prince et se présenter avec un mousquet et un sabre.

En termes d’organisation, les soldats transylvains étaient regroupés en  század. Mais à l’époque,  les  unités et les subdivisions n’avaient pas d’effectif stable pour l’infanterie comme pour la cavalerie. Un corps ou régiment d’infanterie pouvait compter de 2 à 3000 hommes, et était composé de 8 à 24 század. Les corps de cavalerie pouvaient compter de 5 à 8 000 cavaliers,  divisés en század de 50 à 100 hommes. Les termes század et zászló (Compagnie, Fähnlein) désignaient ainsi les subdivisions des régiments, l’équivalent de nos compagnies. Des unités de 300 et 500 hommes pour la cavalerie, et de 500 hommes pour l’infanterie, semblent constituer l’échelon supérieur au század . Le terme banderi, issu de l’ancienne noblesse, semblait encore utilisé. Il désignait peut-être des unités de cavalerie lourde. Les unités de mercenaires et les troupes permanentes du Comté étaient périodiquement soumises à des « monstres» mensuelles, au cours desquels la tenue, l’armement, et l’entrainement, étaient contrôlés.

Ci-dessus et ci-dessous : gardes de Gábor Bethlen et hadjùs hongrois/transylvaniens

En Hongrie, la cavalerie dominait largement en termes d’effectifs : le rapport entre cavaliers et fantassins était souvent de 3 ou 2 pour 1, exceptionnellement 1 pour 2.  Gábor Bethlen se reposait donc principalement sur sa cavalerie, et c’est avec elle qu’il connaitra ses plus beaux succès. Contre des positions défensives, il faisait démonter sa cavalerie lorsque nécessaire pour combattre par le feu. Mais le manque d’infanterie se faisait souvent ressentir. Ce qui lui faisait dire : S’il y a des centaines de milliers de cavaliers dans une guerre, mais pas de piétons, on ne peut faire que peu de choses, quand l’ennemi se retranche. Il reconnaissait ainsi que le fantassin pouvait combattre là où la cavalerie ne le pouvait.

Ci-dessous : cavalerie légère hongroise et croate

L’artillerie était peu nombreuse au sein de l’armée transylvaine. Les canons lourds suivaient l’armée, leur présence étant indispensable lors des sièges de places fortes. En 1623, le prince Transylvain alignera tout de même quatre batteries de 16 canons pour un siège. L’artillerie de campagne se limitait cependant en général à une vingtaine de canons. Les canons étaient tractés par des chevaux, ou par des bœufs.

L’approvisionnement des troupes était assuré grâce aux chariots du train. Ces chariots étaient tractés par des bœufs, ce qui ralentissait l’armée. Gábor Bethlen demandait à ce qu’il y ait 50 charrettes à bœufs pour 1000 hommes. Il fallait donc compter un énorme train de 1000 chariots pour une armée de 20000 hommes.

Stéphane Thion

(Aquarelles de K.A. Wilke)

 

Les armées de l’Union Protestante (1618-1628)

Les armées de l’Union Protestante (1618-1628)

En 1608, furieux de la nouvelle interprétation des stipulations d’Augsbourg proposée par le parti catholique au Reichstag, les représentants des états protestants quittent l’assemblée. Ils constituent alors, le 14 mai 1608, une union défensive, appelée Union protestante, ou Union évangélique. Christian d’Anhalt pousse alors un calviniste, l’électeur palatin Frédéric V, à prendre la tête de cette Union. Suite à la défaite de l’Union protestante à la bataille de la Montagne Blanche, en 1620, Frédéric V sera surnommé le Roi d’un hiver.

En réalité, il n’existait pas une mais plusieurs armées protestantes. Matthias Thurn commanda la première armée, en 1619, mais Frédéric V en confia le commandement à son favori, Christian d’Anhalt, début 1620. Après la Montagne Blanche, Ernst von Mansfeld prit le commandement de l’armée de Frédéric V alors que Christian de Brunswick vint renforcer l’Union avec une nouvelle armée.

L’armée du Roi d’un Hiver en 1620

Les régiments bohémiens sont théoriquement à 2 000 hommes, en 10 compagnies de 200 hommes et les régiments de cavalerie à 4-5 compagnies de 100 chevaux. À la bataille de la Montagne Blanche, l’armée bohémienne de Christian d’Anhalt compte de l’ordre de 11 600 fantassins en 14 bataillons, 11 400 cavaliers en 28 escadrons et 10 canons. Cette armée a été réorganisée sur les principes hollandais, en bataillons de 1 000 hommes sur 10 rangs de profondeur et en escadrons de 400 chevaux.

Armée bohémienne de Christian d’Anhalt à la bataille de la Montagne Blanche (1620) :

Avant-Garde (1ère ligne)                  (5 bataillons et 6 escadrons)

Sthrum                                                 4 compagnies en 1 escadron

Infanterie mährisches (morave)     4 enseignes en 1 bataillon (Bierek)

Cavalerie silésienne                           4 compagnies en 1 escadron

Infanterie mährisches                       4 enseignes en 1 bataillon (Bierek)

Cavalerie autrichienne                      8 compagnies en 1 escadron

Infanterie d’Hohenlohe                    4 enseignes en 1 bataillon

Cavalerie d’Hohenlohe                     5 compagnies en 1 escadron

Infanterie d’Hohenlohe                    4 enseignes en 1 bataillon

Cavalerie bohémienne                      3 compagnies plus 1 compagnie royale en 1 escadron

Cavalerie de Bubna & Solms            9 compagnies en 1 escadron

Infanterie de Thurn                           6 enseignes en 1 bataillon

Bataille (2nd ligne), dans les intervalles     (6 bataillons et 6 escadrons)

Cavalerie hongroise                            300 cavaliers en 1 escadron

Cavalerie de Stubenvolls märische   5 compagnies en 1 escadron

Infanterie oberennsisches                 2 enseignes en 1 bataillon

Cavalerie du prince d’Anhalt             4 compagnies en 1 escadron

Infanterie oberennsisches                 3 enseignes en 1 bataillon

Cavalerie du prince d’Anhalt             3 compagnies en 1 escadron

Infanterie de Capliers                         3 enseignes en 1 bataillon

Cavalerie mährische de Borsida       4 compagnies en 1 escadron

Infanterie de Capliers                        3 enseignes en 1 bataillon

Cavalerie mährische de Künen        4 compagnies en 1 escadron

Infanterie de Capliers                        3 enseignes en 1 bataillon

Infanterie de Thurn                           4 enseignes en 1 bataillon

La 3e ligne, 1000 pas derrière

Réserve :                                             6000 Hongrois en 9 escadrons

Aile gauche :                                      1600 Hongrois

En 6 unités en avant du front (à 5 “sauts”) disposés en trois échelons.

Au milieu de la première ligne sont disposées 4 compagnies “extraordinaires” de cavaliers de l’avant-garde.

La relation officielle bavaroise donne 4 bataillons et 12 escadrons en première ligne, 3 bataillons et 5 escadrons en seconde ligne et 6000 hongrois en réserve, sur les ailes, pour un total de 21 000 hommes.

Ci-dessus : couleurs de frédéric de Bohême ; ci-dessous : arquebusier à cheval et infanterie (régiment du margrave de Jagendorf)

Ci-dessus : infanterie morave ; ci-dessous : cuirassiers d’Anhalt, bourguignottes et cabassets

Ci-dessous : infanterie de la ligue protestante.

Ci-dessous : étendards de compagnies d’un régiment de Frédéric de Palatinat, roi de Bohême, en 1616

L’armée de Ernst von Mansfeldt de 1620 à 1626

L’infanterie et la cavalerie de Mansfeld suivent la même organisation que celle d’Anhalt & de Thurn. Certains régiments de cavalerie, comme le Leib régiment, étaient à 1000 chevaux, en 10 compagnies de 100 chevaux, formant probablement 2 escadrons. En 1625, les escadrons ne sont plus qu’à 300 chevaux. Certains régiments d’infanterie de Mansfeld avaient des couleurs distinctives (principalement l’étendard) : en 1622, il y a ainsi les régiments blanc, bleu & blanc, rouge, bleu, jaune, et vert.

Armée de Ernest de Mansfeld en 1620 :

Régiment                                      Infanterie         Cavalerie

Ernest de Mansfeldt                      2,000

Guillaume de Saxe-Weimar         3,000                     1,000

Casimir de Loewenstein                2,000

Joachim Carpezan                          2,000

Poeblitz                                            2,000

Balthazar de Schlammersdorf      2,000

Sigismond de Brandebourg                                         1,000

Frédéric de Saxe-Altenbourg                                       500

______            ______

13,000                  2,500

Source : document des archives de Vienne cité par hurter (Ferd.III, t.IX, page 52).

En mars 1622, le comte Ernest de Mansfeldt offre à l’Infante « de conduire douze régiments d’infanterie et 5,000 chevaux, le régiment à 3,000 hommes, selon le traitement des Pays-Bas. » L’Infante répond à Mansfeldt qu’il consent « à accepter au service de Sa Majesté outre les 6,000 hommes de pied et les 1,000 chevaux, déjà précédemment agréés, encore 4,000 hommes de pied et 1,000 chevaux, soit en tout 10,000 hommes de pied et 2,000 chevaux. »

Vers 1610, jean-Jacques Walhausen prescrivait effectivement des régiments d’infanterie de 3,000 hommes, en 10 compagnies de 300 hommes.

Ci-dessous : cornette de cuirassier de Mansfeldt

Ci-dessus : infanterie de Mansfeldt (anglais, écossais, allemands)

 

L’armée de Georg Friederich von Baden-Durlach de 1620 à 1622

L’infanterie du Margrave de Bade en 1622 (bataille de Wimpfen) est organisée sur le modèle hollandais. Les régiments d’infanterie sont à 10 compagnies de 200 hommes et les régiments de cavalerie en 3-10 compagnies de 100 chevaux. À Wimpfen, les bataillons étaient de 1 400 hommes sur 10 rangs de profondeur, deux seulement étant à 800 hommes. Sa cavalerie combat en escadrons de 3 à 600 chevaux sur 6 rangs de profondeur. La spécificité de cette armée repose sur ses 70 wagons de combats, à l’image de ceux des hussites, équipés de mortiers tirant à mitraille.

L’armée du Margrave comptait, à Wimpfen (1622), 13 000 fantassins et 3000 cavaliers. L’armée de Tilly prendra à l’armée protestante de Baden-Durlach, à l’issue de la bataille de Wimpfen (1622), plus de 1200 chariots et charrettes (dont 4 chariots chargés d’échelles), 2 grands canons de 60 livres, 20 canons moyens (dont 15 de 40 livres), et 85 pièces de plus petit calibre.

Ci-dessous : infanterie et arquebusier à cheval badois

Drapeaux

Pour compléter, une série d’étendards de compagnies de l’Union Protestante (armées de Mansfeldt, Brunswick et Baden-Durlach) :

Stéphane Thion

(Aquarelles de K.A. Wilke)

Les armées françaises de la guerre de Trente Ans (1610-1648)

Les armées françaises de la guerre de Trente Ans (1610-1648)

 

Henri IV, père de Louis XIII, avait utilisé toute son énergie à rétablir la paix à l’intérieur et à l’extérieur du royaume. Les conséquences s’en feront lourdement sentir : en 1600, la France est ruinée. Mais l’énergie conjuguée du Roi et de Sully, son surintendant des finances, va relever le pays. Depuis 1599, l’Europe est en paix, à l’exception de la guerre entre les Provinces-Unies et l’Espagne, mais celle-ci est fragile. En Allemagne et en France, l’équilibre entre catholiques et protestants est précaire. Alors que les Habsbourg règnent de Madrid à Vienne, les principautés protestantes tissent un réseau d’alliance, recherchant le soutien de la Hollande, de l’Angleterre ou de la France d’Henri IV.

C’est durant la première décennie du XVIIe siècle qu’entre en scène un jeune évêque, Armand-Jean du Plessis de Richelieu. Il a 25 ans en 1610, lorsque Henri IV est assassiné. C’est Concini, favori de Marie de Médicis qui le fait entrer au conseil du Roi, en 1616, comme ministre chargé des affaires étrangères. Luynes succède à Concini, assassiné le 24 avril 1617. À la mort de ce favori, le 15 décembre 1621, les entreprises espagnoles aux Provinces-Unies et l’occupation du Palatinat par les Impériaux en 1622 vont marquer le retour à une politique anti-Habsbourg de la France. Car Richelieu, voulant préserver les frontières du pays, va se révéler un ennemi implacable de l’Espagne et de l’Empire.

La bataille de Lützen, le 16 novembre 1632, voit la victoire de Gustave Adolphe sur le généralissime impérial. Cette seconde victoire sera chèrement payée puisque le « lion du nord » y trouve la mort. Poussés par la France et le chancelier suédois Oxenstierna, les généraux suédois Baner, Horn, Torstensson et l’allemand Bernard de Saxe Weimar continuent la guerre, malgré la lassitude des populations. Mais la défaite des Suédois à Nördlingen (1634) va redistribuer les cartes. Le 30 mai 1635, l’Empereur et l’Electeur de Saxe signent un traité de paix avec l’Empereur Ferdinand II  qui sera bientôt étendu à tous les princes allemands qui le souhaitent. La coalition montée par la Suède de Gustave Adolphe et la France de Richelieu mise à mal, l’Allemagne est maintenant sur le point de retrouver la paix, même si de nombreux princes protestants et villes libres d’Empire y restent hostiles. Mais le chancelier Oxenstierra n’a pas intérêt à une paix en Allemagne : son objectif est de prendre le contrôle de la côte continentale de la Baltique en instaurant un protectorat sur les états protestants d’Allemagne du nord. Le cardinal Richelieu, craignant que l’Espagne de Philippe IV puisse utiliser les troupes impériales ainsi libérées par la fin du conflit pour menacer les intérêts français, n’a pas plus d’intérêt à une fin des hostilités.

La situation est pourtant plus compliquée qu’elle n’y parait. L’Alsace était occupée depuis août 1632 par les suédois de Horn. Les cités Alsaciennes, lasses des déprédations, demandent alors l’aide de Louis XIII. Une convention négociée le 9 octobre 1634 entre Français et Suédois, suivie par un traité, autorise la France à occuper la région. Alors que les maréchaux Brézé et de La Force y affrontent les Impériaux, le Prince Thomas de Savoie, à la tête d’une armée espagnole, envahit l’Electorat de Trèves en mars 1635, faisant prisonnier l’Archevêque Electeur, protégé de Louis XIII. Les dés sont jetés. Le 8 février 1635, Richelieu, sentant la guerre inévitable, avait renforcé son alliance avec les Provinces Unies et avec la Suède. Le 19 mai, il déclare la guerre à l’Espagne. Cette entrée en guerre est suivie d’une première victoire française à Avins, en Wallonie, le lendemain même.

L’infanterie française avant 1635

A la mort d’Henri IV, la France est une des rares nations d’Europe à disposer d’une armée permanente. En 1613, l’infanterie française se constitue ainsi de cinq vieux régiments de 20 compagnies (Gardes Françaises, Picardie, Piémont, Champagne, Navarre) – Normandie ne sera créé qu’en 1616 – et deux petits-vieux, Bourg et Chappes (ancien Nerestang), de 10 compagnies chacun, le tout faisant 15 000 hommes.

De 1600 à 1615, les compagnies d’infanterie comptent, en temps de guerre, une centaine d’hommes, et la moitié en temps de paix. Les Gardes-françaises ont des compagnies plus importantes. Ses 20 compagnies sont à 300 hommes chacune en 1600, puis 120 hommes en 1606. Elles seront à 200 hommes en 1614 et enfin à 300 hommes en 1629. Les autres vieux corps sont à 20 compagnies de 100 hommes, ou 50 hommes les années de paix. En 1613, le régiment Bourg de l’Espinasse, envoyé pour secourir le duc de Mantoue contre le duc de Savoie, a ordre lui ai fait de faire recrue pour passer à 200 hommes par compagnie. L’effectif des compagnies des régiments étrangers au service de la France diffère notablement, 300 hommes pour les compagnies suisses et 200 hommes pour les compagnies liégeoises ou irlandaises. En pratique, les régiments français, autres que les vieux corps, dépasseront rarement 1 000 hommes, en dix compagnies de 100 hommes. Ainsi, des 14 régiments à la disposition de Lesdiguières, en Savoie, seulement deux ont 10 compagnies, les autres en ayant de 2 à 9.

Les troubles religieux reprennent en 1615. Les vieilles bandes qui forment les garnisons sont alors enrégimentées et des commissions sont données pour lever de nouveaux régiments. Mais pour différencier anciens et nouveaux régiments, le colonel général de l’infanterie ne possédera une compagnie colonelle, celle au drapeau blanc, que dans les anciens régiments. Début 1616, la régente à 16 régiments d’infanterie à son service, dont 3 étrangers : les Gardes françaises et Gardes suisses, les 4 vieux corps (Picardie, Piémont, Navarre et Champagne), les 5 petits-vieux (Nerestang, Rambures, Portes, Vaubecourt et Sault), Boniface, Ancre, Chastellier-Barlot, Ornano-Corse et Nesmond-Lorrain. Les Gardes-Suisses ont aussi été rétablis et resteront entretenues. En 1622, pour la campagne de Languedoc contre les rebelles protestants, les compagnies des petits vieux sont à 100 hommes, dont 36 piquiers. Mais  l’ordonnance royale du 14 août 1623 augmente dorénavant les compagnies des vieux régiments à 200 hommes. Ce sera le cas pour les régiments de Normandie, de Vaubecourt et de Coeuvres qui sont envoyés en Valteline.

Une compagnie d’infanterie française comprend vers 1600-1610, un capitaine, un commissaire, un lieutenant, un enseigne, deux sergents, des caporaux, ou cap d’escadre, des lanspessades et appointés pour soulager le camp d’escadre, et des soldats. Le caporal doit avoir un rôle (ou liste d’enrôlement) de ses soldats et il doit leur répartir les vivres, les balles, la mèche et la poudre. Le sergent doit savoir écrire, lire et compter, pour tenir compte de ses soldats, combien de piquiers & combien de mousquetaires, & mettre au premier rang les mieux armés, & les plus courageux. Au sein de sa compagnie, il doit faire observer la discipline aux soldats et les instruire à se tenir en rang et en file. C’est lui qui distribue la mèche & la poudre aux caporaux et qui pose postes de gardes et sentinelles. L’enseigne porte le drapeau de la compagnie partout où est son capitaine et il commande la compagnie en l’absence des deux autres officiers. Le lieutenant commande la compagnie en l’absence du capitaine. On trouve aussi, dans chaque compagnie, un ou deux tambours, un fourrier et un barbier, qui fait office de chirurgien.

L’état-major de chaque régiment compte un prévôt, un maréchal des logis et un sergent major. C’est ce dernier qui organise la marche du régiment, l’informe de sa place au sein du dispositif (à l’avant-garde, à la bataille ou à l’arrière-garde). C’est à lui que revient la tâche délicate d’ordonner le bataillon : former un bataillon parfait, est une préoccupation majeure des officiers du parti catholique. Et s’il se trouve des sergents majors qui ignorent la mathématique bien qu’elle leur soit du tout nécessaire – de nombreux traités possèdent des tables de racines carrées toutes prêtes ! Le sergent major doit aussi être équipé d’un bâton de trois pied qui lui permettra de former un bataillon carré de piques, pour lequel chaque soldat doit occuper un espace de trois pied par trois pieds.

Quant à l’apparence d’un régiment, voilà ce que nous dit Souvigny, de son régiment : Environ la fin de juin de l’année 1613, ledit régiment de Bourg (de l’Espinasse) partit de Sainte-Colombe en fort bon état : les mousquetaires armés de beaux mousquets avec des bandoulières de velours, moitié couvertes de clinquants ; les piquiers, de piques de Biscaye, fer doré et le bout de bâton, avec des corselets de Milan, bourguignotte, hausse-col, tassette et brassal. L’infanterie n’est pas encore, à cette époque, habillée d’uniformes. Mai en 1627, Louis XIII demandera à plusieurs villes de lui fournir une grande quantité d’habits complets pour vêtir tous les soldats de son armée. L’armée reçoit ainsi, le 11 janvier 1628, 5 329 habits et 5 198 paires de souliers envoyés par l’un des échevins de Paris dont 2 400 habits de bure grise (une étoffe grossière et de peu de prix, faite de laine), et 100 autres de serge (la serge est une étoffe de laine légère) rouge cramoisi. Déjà, le 27 octobre 1627, Louis XIII avait frappé les parisiens d’une réquisition d’habits pour les Gardes françaises. Ces habits consistent alors en un pourpoint, jupe à longues basques, haut & bas-de-chausses, de bure minime, teinte en laine. Les moines de l’ordre des Minimes portaient une bure de couleur noire mais l’habit est ici teint en laine donc probablement de couleur écru ou gris. Début décembre 1629, le cardinal de Richelieu aura soin de faire partir avec lui, en Italie, 20 000 habits que le roy a ordonné de faire faire pour vêtir les soldats de son armée cet hiver.

L’infanterie française à partir de 1635

En 1635, un régiment d’infanterie française nouvellement levé compte 10 à 12 compagnies de 120 hommes,  parfois 200 hommes pour quelques régiments étrangers. Les vieux corps, régiments permanents sont à 20 compagnies, voire 30 compagnies pour les Gardes françaises. Au sein de la compagnie, les hommes sont 60% de mousquets et 40% de piques. Ainsi, le 16 février 1635, une capitulation, équivalent aux commissions données pour la levée des régiments français, est signée avec le colonel Batilly pour la levée d’un régiment allemand à 8 enseignes, qu’il sera par la suite possible d’augmenter à 10 compagnies, de 100 hommes chacune. L’État-Major devra être composé d’un Colonel, d’un Lieutenant Colonel, d’un Commissaire, d’un Sergent-Major, d’un Adjudant ou Aide-Major, d’un Maréchal des Logis, d’un Secrétaire du régiment, d’un Aumônier, d’un Prévôt, d’un Chirurgien et d’un Tambour Major. Chaque compagnie devra compter un capitaine, un lieutenant, un enseigne, deux sergents, un capitaine d’armes, un caporal des appointés, un secrétaire, un fourrier, un chirurgien, un tambour et 89 hommes dont il y aura 3 caporaux, 3 anspessades, 36 piquiers armés de corselets, et 43 mousquetaires. L’ordonnance du 14 juillet 1636 oblige les gens de guerre à prendre leurs armes allants au combat savoir pour l’infanterie le corset. Ce n’est qu’à partir de 1642 que les ordonnances préciseront que les capitaines d’infanterie seront obligés d’avoir les deux tiers de leurs soldats armés de mousquets & le tiers de piques. Les piquiers, tout au moins ceux des vieux corps, garderont leurs cuirasses avec tassettes jusque vers 1641. C’est en tous cas ce que rapporte Puysegur dans ses Mémoires : En l’année 1636, l’armée du Roy venant de Hollande, débarqua à Calais dans le mois de mai. On la fit marcher dans des quartiers de rafraîchissement. Le régiment de Piémont qui était beau & fort, eut les deux Andilly dans la Généralité de Rouen, & était payé par les Èlections. Il n’y en avait point de compagnie au-dessous de 90 hommes, & j’en avais 130 dans la mienne. Ils étaient armés de bons mousquets & bandoulières de Hollande, les piquiers avaient des corselets de même que les Gardes, & dans tout le régiment, aussi bien que dans les autres vieux corps, on en a porté jusqu’après la bataille de Sedan. Mais dès juin 1639, le maréchal de Châtillon note que pour l’infanterie, il y a d’assez bons hommes, mais mal armés : car excepté le régiment des Gardes, tous les piquiers sont sans corselet. Par contre, les mousquetaires sont bien armés, ils ont de bons mousquets & de bonnes bandoulières.

L’équipement de cette infanterie s’use rapidement et Richelieu devra continuellement veiller à son remplacement. Nos Français sont tous nuds, il y a un an qu’ils roulent ; ils ne peuvent (vu leur nécessité) s’habiller, écrit le duc de Rohan à Servien, en octobre 1635. Si on les veut conserver, il faudrait envoyer quatre mille paires d’habits pour habiller les plus mal vêtus. Servien lui répond alors qu’il a donné ordre de délivrer à Lyon tous les habits qui y sont, pour être distribués dans votre armée. Cette pratique semble être courante. Ainsi, en 1644, alors qu’il prenait en charge le commandement de  l’armée d’Allemagne, le vicomte de Turenne fit remonter à ses dépends 5 000 cavaliers & habiller 4 000 fantassins (Histoire du Vicomte de Turenne par Ramsay).

En 1635, Louis XIII et Richelieu ont 118 régiments d’infanterie à leur service, dont 16 étrangers, pour un effectif supposé de 156 000 hommes. Mais Richelieu doute de ce chiffre lorsqu’il écrit à son intendant Servien, le 23 mars 1635 : Quand je considère les troupes que le Roy doit avoir sur le papier j’en trouve plus qu’il ne faut pour composer les armées qu’il fait état de mettre en campagne dans un mois ; mais tant plus je pense à ce qu’il a d’effectif, et ce qu’il  aura sur pied dans un mois, je ne vois point comme de tout cela on peut composer 25 000 hommes pour l’Allemagne, 25 000 pour la Flandre, 6 000 auprès du Roy, 10 000 pour la Lorraine, 8 000 pour la Valteline et 12 000 pour l’Italie. D’ailleurs, il écrit un mois plus tard à ce même Servien que le régiment de La Bloquerie, qui devait avoir 2 400 hommes, n’en ayant que 700, il ne faut plus faire état, à mon avis, de compter les compagnies qu’à 100 hommes chacune, tant parce que nous ne le donnons que pour cela, que par ce aussi je ne crois pas qu’il en puisse avoir davantage. Dans ses hypothèses, Richelieu ne compte donc pas systématiquement les compagnies au chiffre théorique de 120 hommes par compagnie, comme il le fait en janvier 1636 : 86 compagnies faisant 80 hommes à quoi je les réduis, y compris les 10 pour 100, 6 880 hommes. Mais il s’efforcera, entre deux campagnes, à porter ces compagnies à 100 hommes. Dans les années 1640, l’effectif théorique de la compagnie passera à des chiffres compris entre 50 et 70 hommes, selon l’année.

À côté des six prestigieux vieux corps que sont les Gardes françaises, Piémont, Picardie, Champagne, Navarre, Normandie puis, à partir de 1636, La Marine, sept régiments permanents appelés petits vieux, bénéficient aussi du drapeau blanc de la compagnie colonelle : Rambure, Maugiron, Nerestang, Sault, Vaubecourt, Chamblay et Bellenave. Les régiments à drapeau blanc sont alors tenus de compter 20 compagnies. Mais le Roi propose par ailleurs, le 11 juillet 1636, que l’on donne le drapeau blanc à tous les régiments qui ont 20 compagnies, augmentant de ce fait le nombre des régiments permanents. Ce sera par exemple le cas du régiment Hebron, régiment écossais ayant combattu sous Gustave Adolphe. Quelques mois plutôt (décembre 1635), Louis XIII avait souhaité que cinq des vieux régiments soient transformés en régiments de provinces : Nettancourt, Turenne, Rebé, Tonneins et Castelmoron deviennent les régiments des Trois-Évêchés, de Quercy, de Foix, de Vivarais et d’Armagnac. Puis, en janvier 1636, le Cardinal demande la création des régiments de Guyenne, de Béarn, de Bourbonnais, de Poitou, de Beauce, de Bourgogne, du Maine, et de Berry à partir de ceux de la Valette, Toulonjon, La Baume, Chastelier-Barlot, Aluye, Chalancé, Lavardin et Courtenay, ainsi que celui de Bretagne. Puis les régiments de Maugiron, de Chamblay, d’Alincourt, de Montausier et de Saint-Ossange sont transformés en régiments d’Auvergne, de Lorraine, de Lyonnais, d’Angoumois et de Touraine. Enfin, le 10 juillet 1636, le duc d’Halluin reçoit commission pour lever le régiment de Languedoc et, le 27 novembre de cette même année, Richelieu demande à la Valette de lever le régiment de Guyenne.

Lorsque Louis XIII disparaît, le 14 mai 1643, l’infanterie française compte 166 régiments dont 25 étrangers pour un total de 192 860 hommes, hors garnisons : les Gardes françaises sont à 30 compagnies de 200 hommes, 16 vieux régiments sont à 30 compagnies de 50 hommes, et 106 régiments sont à 20 compagnies de 50 hommes. Mais on compte aussi un régiment à 18 compagnies de 50 hommes, un régiment à 15 compagnies et 6 régiments à 12 compagnies de 80 hommes, 10 régiments à 10 compagnies de 80 hommes. L’infanterie étrangère comprend 7 régiments suisses en 83 compagnies de 200 hommes, 4 régiments irlandais en 50 compagnies de 100 hommes, 4 régiments écossais en 62 compagnies de 100 hommes, 8 régiments allemands en 107 compagnies de 100 hommes, un régiment liégeois à 20 compagnies de 100 hommes, et un régiment italien à 10 compagnies de 50 hommes. Sur le champ de bataille, chaque régiment à 30 compagnies forme 2 bataillons de 8 à 900 hommes et chaque régiment de 20 compagnies forme un bataillon de 1 000 à 1 200 hommes. Les régiments de 10 et 12 compagnies sont réunis ensemble pour former un bataillon.

Au début des années 1630, selon le duc de Rohan, les bataillons sont sur 10 rangs de profondeur et les escadrons sur 5 de profondeur. Selon Gamaliel de la Tour, qui écrit à la même époque, le bataillon ordinaire doit être sur 10 ou 12 rangs, les demi-files en auront 5 ou 6. Les bataillons ne doivent plus surpasser 400 ou 600 hommes, et rarement viennent jusqu’à 800 ou 1 000 hommes. Chaque homme tient environ 2 pieds de front en largeur et un pied et demi d’épaisseur. En réalité, en 1635, le bataillon français ne se déploie plus que sur 8 rangs, et ce probablement depuis 1632 ou 1633. En 1638, Louis XIII demandera à son régiment des Gardes, dans un règlement du mois d’avril, que les bataillons se forment sur 6 ou 8 de hauteur, car s’ils sont davantage, il y a la moitié des hommes inutiles, et le roi affectionne le plus la hauteur de 6. La Vallière, qui écrit vers 1644-45, prescrit des bataillons de 1 000 hommes à 6 de hauteur pour toute l’infanterie, mais les vieux corps avaient suivis les pratiques des Gardes françaises bien avant, tout au moins lorsque l’effectif du bataillon était réduit à moins de 1 000 hommes. C’est ce que témoigne Henri Campion, évoquant des files de 6 hommes au régiment de Normandie, lors de cette terrible attaque des lignes espagnoles, en 1639, du côté de Salces : Notre bataillon était de huit cents bons soldats et de trente-cinq officiers, desquels on commanda les deux capitaines, lieutenants et enseignes de tour pour la garde de fatigue de se tenir à la queue de la troupe pour empêcher que nul soldat se débandât. L’on détacha deux capitaines, deux lieutenants et deux enseignes, pour donner à notre gauche et à notre droite un peu avant nous, avec chacun cent hommes. En cet ordre nous descendîmes la montagne, et les autres régiments à peu-près de même. (…) Sitôt que nous fûmes au bas de la montagne, les Espagnols commencèrent à tirer et nous à marcher droit à eux, dans un terrain uni comme une salle. Ils nous tuèrent quelques soldats pendant cette marche, que nous exécutâmes, ainsi que le virent et le dirent après le Prince et toute l’armée, avec le même calme que s’il eût été question de faire l’exercice, observant les distances des rangs des files, enfin d’une manière qui marquait la résolution de tout le corps, quoiqu’il tombât toujours du monde. Quand nous fûmes au milieu de la plaine, quasi à la portée du pistolet, les ennemis tirèrent tous leurs canons chargés à balles, et firent en même temps une salve du premier rang de leurs mousquetaires. Un de leurs boulets donna dans le milieu de notre bataillon, et le coup, joint aux mousquetades, nous emporta six files ou trente-six hommes. Les autres régiments reçurent aussi un grand échec, et prirent tellement l’épouvante, qu’ils firent demi-tour à droite, et regagnèrent la montagne, malgré les efforts des officiers, dont la plupart de ceux qui combattaient près de notre régiment se vinrent mettre avec nous.

De 1629 à 1645, les ordonnances s’enchaînent pour réglementer le comportement des gens de guerre. Il y eut le code Michau de 1629, très complet mais qui ne suffira pas. Le règlement du cardinal de la Valette, datant d’avril 1638, codifie pour sa part les intervalles entre bataillons et escadrons lorsqu’ils marchent, ainsi que la place des officiers. Il précise aussi la taille des camps, chaque compagnie devant occuper une rangée de huttes et sera séparée par une rue de la compagnie voisine, ou encore que chaque régiment doit avoir son bagage réuni et indiqué par une banderole à sa couleur. Une ordonnance de mai 1639 ordonne que les capitaines d’infanterie qui n’ont amené à l’armée que des compagnies de trente hommes seront cassés à la tête de leur régiment, dégradés des armes et poursuivis en restitution des sommes qu’ils ont reçues pour faire les recrues. Les capitaines qui n’ont amené que des compagnies de quarante hommes devront compléter à leurs dépens leur compagnie pour la campagne prochaine. Chaque année, une ordonnance publiée au mois d’octobre ou de novembre précise les dispositions des quartiers d’hivers, comme celle du 24 novembre 1639 qui précise que les officiers et soldats seront logés avec place au feu et à la chandelle. Celle du 18 octobre 1640 demande que les régiments de 20 compagnies seront payés, pendant l’hiver, sur le pied de 600 hommes et que les anciens régiments, qui ont plus de 20 compagnies, seront payés pour tous leurs soldats effectifs. Cette ordonnance prescrit par ailleurs une augmentation de l’effectif de l’infanterie, pour la campagne de 1641 en portant toutes compagnies de 50 à 60 hommes.  Au mois d’octobre 1641 apparaît un nouveau règlement sur les étapes : On cherchera dans chaque localité dix ou douze granges, halles ou autres lieux couverts pouvant loger un régiment de 1 000 hommes. Il faudra que l’on puisse y faire du feu, et l’entrepreneur fournira deux fagots et six bûches par feu, du 1er novembre au 1er avril. On fournira la paille pour coucher les soldats qui ne pourront loger ailleurs qu’aux halles et bâtiments où il seront distribués compagnie par compagnie. (…) L’entrepreneur fournira la viande cuite. Le vin sera mis dans des seaux. Il donnera par quatre soldats une écuelle en bois pour manger et un pot en bois pour boire. Cette ordonnance sera bien sûr suivie par une sur les quartiers d’hivers. Celle d’octobre 1642 ordonne que les compagnies complètes des régiments d’infanterie seront payées à la première montre sur le pied de 56 hommes chacune, et que les capitaines d’infanterie seront obligés d’avoir les deux tiers de leurs soldats armés de mousquets & le tiers de piques.

Le 15 janvier 1643, le roi écrit à Le Tellier, alors intendant de l’armée d’Italie : Ayant considéré que la plupart des régiments d’infanterie que j’ai mis à 30 compagnies ne sont guère plus forts qu’ils n’étaient quand ils en avaient moins, j’ai décidé de les réduire à 20 compagnies, sauf les vieux corps, les petits vieux et ceux considérés comme tels. Dans chaque régiment, on ne conservera que les 20 compagnies les plus fortes et on y incorporera les soldats des compagnies supprimées. Comme je trouve que les enseignes sont inutiles dans l’infanterie, je ne conserve par régiment que deux enseignes, un à la compagnie mestre de camp, et un à celle du premier capitaine. On licenciera de suite les enseignes des régiments de 20 compagnies. Dans les vieux régiments qui restent à 30 compagnies, les enseignes qui existent seront conservés, mais on ne remplira pas les vacantes jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus que deux par régiment. L’ordonnance du 18 octobre 1643, sur les quartiers d’hiver, prescrit de licencier les compagnies ayant moins de 20 hommes à la fin de la campagne et que les compagnies complètes seront de 70 hommes chacune, l’infanterie étant armée pour les deux tiers de mousquets & le tiers de piques. Puis celle du 10 novembre 1644 ordonne que les compagnies soient payées pendant l’hiver à 30 hommes, alors qu’elles seront à 60 hommes en campagne. L’ordonnance du 6 avril 1645 évoque une gratification de 300 livres au capitaine qui aurait une compagnie de 60 hommes, y compris les officiers, et 600 livres à celui qui aurait 70 hommes. Les capitaines qui ne présenteraient que les 30 hommes entretenus durant l’hiver devaient être cassés, leurs soldats répartis entre les autres compagnies du régiment. Les ordonnances de novembre 1645 et 1646 ne modifient pas les précédentes sur les quartiers d’hiver, et laissent la compagnie à 60 hommes. Enfin de nombreuses ordonnances, comme celle du 20 janvier 1641, rappellent et ordonnent que les appointements des officiers majors des régiments tant de cavalerie que d’infanterie français & étrangers ne seront payés tant aux monstres qu’aux prêts, qu’à proportion de la force desdits régiments, & des compagnies dont ils seront composés.

Ci-dessus : Étendards et infanterie française (Aquarelles de K.A Wilke)

 

La cavalerie

Il existe encore, en France, comme en Espagne ou en Savoie, des compagnies de gendarmes. Mais il ne s’agit plus des anciennes compagnies d’ordonnance, qui disparaissent dans les années 1590. Au début du XVIIe siècle, selon Du Praissac, les compagnies de gendarmes ou d’hommes d’armes, sont divisées en compagnies de cent hommes d’armes, au moins celles du Roy, des Princes, du Connétable & des Maréchaux de France. Louis de Montgommery nous décrit des compagnies de gendarmerie plus fortes sous Henri IV (vers 1603) : nous laisserons les compagnies de gendarmes complètes de 200 maîtres pour les princes, officiers de la couronne et gouverneurs de provinces ; et les autres de 100 pour les seigneurs, et ceux auxquels il plaira au roi d’entretenir, effectif confirmé par l’ordonnance du 29 avril 1611.

Les chevaux légers sont plus légèrement armés que les gendarmes : une cuirasse, un pistolet à l’arçon et leur casque ou chapeau. Avant 1635, la seule unité permanente, en France, reste la compagnie franche d’une centaine de chevaux. En 1621, les troupes de carabins sont séparées des compagnies de chevaux légers, et forment un corps particulier sous un mestre de camp des carabins, Arnaud de Corbeville.

En 1634, alors que Louis XIII et le cardinal-duc de Richelieu préparent leur entrée en guerre, celui-ci ne cache pas son admiration pour la cavalerie étrangère : J’ai pensé cette nuit qu’il valait mieux lever de la cavalerie étrangère que française, parce que, bien que la dernière soit plus excellente pour les combats, elle est moins bonne pour les fatigues, qui est ce dont on a à faire. Cette cavalerie, principalement allemande et liégeoise, est équipée plus légèrement que nos chevaux légers, à tel point que le Roi les assimile à des carabins.  Jusqu’en 1636, les carabins seront la véritable cavalerie légère de Louis XIII, équipée uniquement d’une cuirasse et d’une bourguignotte, comme le répond Louis XIII au sieur de Ferron qui en veut lever un régiment de 500 chevaux : il faut des carabins bien montés avec cuirasses. En plus des compagnies de carabins, il existe alors quelques compagnies de mousquetaires à cheval. La première – la plus célèbre puisqu’il s’agit des mousquetaires du Roi – est apparue en 1622, après la prise de Montpellier. Mais en mars 1635, dans un de ses mémoires au Roi, Richelieu se prononce contre la levée de nouvelles compagnies de ces mousquetaires montés, craignant que cela porte préjudice à l’infanterie, dont on a besoin. En pratique, rien ne distingue le mousquetaire à cheval du dragon et le cardinal Richelieu changera d’avis lorsque le Roi lui donnera, en mai 1635, commission de lever son propre régiment de mousquetaires à cheval, dits dragons. Six régiments de dragons seront ensuite levés à partir de compagnies de carabins que le Cardinal fait dissoudre : Cardinal-duc, Alègre, Bruslon, Bernieult, Mahé et Saint-Rémy, régiments qui seront prêt le 30 juillet.

Il faudra attendre la fin de l’été 1635 pour que l’on voit la cavalerie française, c’est à dire les chevau-légers qui forment le corps de cette cavalerie, réellement alléger son équipement, comme nous le montre cette lettre du 11 août 1635, de Richelieu au cardinal de la Valette : nous levons 20 régiments & 4 000 chevaux, comme je vous ai mandé, & outre cela nous allons maintenant faire 2 000 chevaux de la nouvelle cavalerie, dont vous m’avez écrit, qui n’aura que la cuirasse, une bourguignotte qui couvre les joues, & une barre sur le nez, une carabine & un pistolet. Louis XIII et Richelieu donneront alors le nom de hongroise à ce type de cavalerie. Car jusqu’en 1636, la majorité de la cavalerie française est composée de chevaux légers qui sont, comme l’écrit Puysegur dans ses mémoires, tous gens bien armés de bonnes cuirasses, de bonnes tassettes, & le casque en tête. Dès 1636, les cavaliers semblent ne plus vouloir porter la cuirasse. L’ordonnance du 14 juillet 1636 insiste donc pour que les gens de cheval aient la cuirasse pour le moins. Et cette habitude va se poursuivre puisque l’ordonnance du 27 mars 1639, enjoint à tous mestres de camp, colonels, & capitaines de cavalerie, tant française qu’étrangère, de faire armer leurs cavaliers de la cuirasse devant et derrière, du pot, de deux pistolets, et de l’épée. Quant à la tenue, seuls les Gardes, tels que les mousquetaires du Roi ou les Gardes du Cardinal, portaient un semblant d’uniforme, sous la forme d’une casaque.  En voici un exemple, évoqué par Henri Campion dans ces mémoires : en 1635, le Maréchal (de la Force) reçut un renfort de quinze cents gentilshommes de Normandie bien montés et fort dorés, de deux mille dragons, tous vêtus de casaques aux couleurs du cardinal de Richelieu.

La cavalerie française ne sera formée en esquadres qu’en juillet 1635. Toute la cavalerie se forme jusqu’alors en compagnies. Mais, face à la résistance de la noblesse, le cardinal de Richelieu doit abandonner son concept d’esquadre dès 1636. Il n’abandonne cependant pas son idée et ordonne, en janvier 1638, la formation de 36 régiments de cavalerie française. Ces régiments sont tous à 9 compagnies, 8 de chevau-légers et une de mousquetaires. S’ajoutent à ce total 25 régiments étrangers, dont 10 régiments weimariens à 8 compagnies. Comme pour l’infanterie, le nombre de régiments de cavalerie augmentera d’année en année. Il reste quelques compagnies dites franches, aux côtés de ces régiments : il s’agit des compagnies de gendarmes et de gardes des maréchaux. La Maison du roi en compte quatre : les compagnies des gardes du corps, des gendarmes de la garde, des chevau-légers de la garde et des mousquetaires du roi.

Les compagnies de carabins sont théoriquement, en 1635, de 80 maîtres, celles de chevaux légers de 90, celles de gendarmes de 100 maîtres et 200 pour les compagnies du roi et des princes. Comme pour l’infanterie, l’effectif théorique des compagnies diminuera avec les années. En 1642, une nouvelle ordonnance rappelle que les capitaines de cavalerie seront obligés d’avoir leurs soldats armés chacun d’une cuirasse, d’un pot, & deux pistolets, le tout en bon état, et que les compagnies de gendarmes & chevaux-légers seront payées à la première montre sur le pied de 60 hommes chacune, & celles de carabins pour 50 chacune, le tout officiers compris. Puis l’ordonnance du 20 décembre 1643 prescrit des compagnies à 70 hommes et que chaque cavalier soit armé du pot, de la cuirasse devant & derrière & de deux pistolets. (…) Chaque compagnie de cavalerie qui aura moins de 30 hommes ne pourra avoir de cornette.

Selon Gamaliel de la Tour (1634), chaque cornette de cavalerie se dispose sur 5 rangs et les escadrons sont de 200, 300 ou 400 chevaux au plus haut, lesquels coutumièrement doivent être quadruples de front, comme de 20 à 5 pour être presque carrés de terrain. Dix ans plus tard, La Vallière prescrit des escadrons de 120 chevaux, 40 de front sur 3 de hauteur. Puysegur confirme que les escadrons se déploient alors sur 3 de hauteur. Héritière des « meuniers » huguenots, La cavalerie française semble avoir abandonnée relativement tôt le combat à la caracole. Ainsi à Leucate, en 1637, le duc d’Halluin suivi de Boissac & de Sainte-Croix donna sur cette cavalerie avec tant de vigueur qu’il la renversa & la contraignit de se retirer en désordre au galop. La cavalerie de l’armée d’Allemagne, sous Guébriant puis Turenne, privilégiera aussi clairement le choc à la caracole, suivant l’exemple des régiments de Saxe-Weimar. Face à des escadrons tenant fermes, la majorité des escadrons privilégie donc le choc à l’épée précédé une salve des pistolets, comme en témoigne cet exemple lors de la bataille de Lens, le 20 août 1648 : « Le prince de Salm s’avance au trot, avec sa première ligne de Wallons et de Lorrains contre celle de Condé, qui marche au pas pour le recevoir. Les deux lignes se joignent tête contre tête de cheval, bouche contre bouche de pistolet, et demeurent en cette posture assez longtemps, attendant, sans branler des deux côtés, qui tirerait le premier. Les ennemis plus impatients commencent la décharge ; on dirait que l’Enfer s’ouvre ! Tous nos officiers du premier rang sont tués, blessés ou démontés. Condé donne alors le signal du feu puis, l’épée haute, à la tête du régiment de Gassion, il enfonce l’escadron qui lui est opposé. Ses six autres escadrons le suivent et, à son exemple, chargent si rudement la première ligne ennemie qu’ils la renversent. »

Ci-dessus : Etat-Major et cavalerie française ; ci-dessous : Artillerie (Aquarelles de K.A Wilke)

Stéphane Thion

L’armée de la Ligue Catholique (1610-1632)

L’armée de la Ligue Catholique (1610-1632)

 

La Ligue Catholique a été constituée le 10 juillet 1609 par les États Allemands du Saint-Empire, à l’instigation du duc Maximilien de Bavière pour contrer l’Union Protestante. La majorité des troupes de la Ligue seront fournies par les Bavarois et les Wallons, avec l’appui de l’Espagne qui s’engageait à financer deux régiments d’infanterie et un de cavalerie. Le duc Maximilien de Bavière en était le chef ; il nomma Jean Tserclaes, Comte de Tilly, lieutenant-général des forces armées de la Ligue Catholique en avril 1610. Selon l’historien Villermont, « l’appel du trentième et du dixième donna 14 000 hommes qui furent classés par régiments, habillés et armés d’une manière uniforme. Ils devaient former le noyau d’une armée toujours prête à entrer en campagne. Ce fut le premier essai d’une véritable armée permanente en Allemagne. (…) La noblesse équipa 2 000 cavaliers, auxquels on donna des instructeurs capables et habiles. Le chiffre de 20 000 hommes, indiqué par l’assemblée de Munich, fut complété par l’enrôlement de régiments étrangers. » À ces troupes s’ajoutaient, pour artillerie, 6 gros canons de 40, 12 canons de 24, 8 canons de 8 et 14 fauconneaux d’un calibre inférieur ou égal à 4.

Le 27 août 1619, les États de Bohême déclarent la déchéance de Ferdinand II : les princes Catholiques demandent alors à Maximilien de reprendre la direction de la Ligue et ordonnent la mobilisation d’une armée de 21 000 fantassins et 4000 cavaliers, ainsi que l’organisation d’une milice. Tilly en reprend la charge de lieutenant-général.

C’est avec cette armée que Tilly aligne une série impressionnante de victoires : face à l’électeur palatin Frédéric V, en 1620 à la Montagne Blanche ; face au margrave de Bade-Durlach, renforcé par les Espagnols du duc Gonzalo de Cordoba, à Wimpfen en 1622 ; face à Christian de Brunswick à Höcht, en 1622, et à Stadtlohn, en 1623 ; enfin, face aux Danois de Christian IV à Dessau et à Lutter am Barenberg en 1626. Mais il finira par connaître la défaite face à Gustave-Adolphe de Suède à Breitenfeld en 1631.

Jusqu’à la mort de Tilly, les régiments impériaux sont le plus souvent au service de l’armée de la Ligue. Ainsi, une armée type de la ligue catholique alignera des unités de recrutement varié : unités italiennes, wallonnes, espagnoles, allemandes de haute-Allemagne, bavaroises, saxonnes, westphaliennes ou du Wurzburg se côtoient.

Jusqu’en 1631, les régiments d’infanterie comptent théoriquement 3 000 hommes en 10 compagnies de 300 hommes. Mais en réalité, la plupart des régiments comptent à peine 2000 hommes. Ces régiments se forment en tercios ou battalia sur 20 à 30 rangs de profondeurs. Ainsi, un régiment de 2 000 hommes se forme en un bataillon de 78 files sur 26 rangs avec un bloc de piquiers, au milieu, en 44 files sur 22 rangs. Les mousquetaires forment deux manches de 17 files sur 26 rangs et un rideau de 44 files sur 4 rangs sur le front des piquiers. En pratique, entre 1622 et 1631, les régiments atteignent rarement 1000 hommes. Les compagnies sont alors regroupées pour former de gros bataillons ou tercios. A la montagne blanche, il y aura ainsi un bataillon wallon regroupant trois régiments (Bucquoy et Verdugo , 45 compagnies pour un total estimé de 3000 hommes), un bataillon napolitain (Brigata Spinelli, 31 compagnies regroupant 2500 hommes), un bataillon regroupant de régiments allemands (régiments Tiefenbach et Breuner, 20 compagnies totalisant 1700 hommes), le bataillon allemand formé par le régiment Fugger (8 compagnies totalisant 1400 hommes), un bataillon Saxon et wallon (régiments Saxon et Nassau, 20 compagnies totalisant 2200 hommes), un bataillon lorrain (régiment Florinville ,10 compagnies totalisant 3000 hommes), un bataillon du Wurzburg (régiment Bauer, 8 compagnies totalisant 2000 hommes), un bataillon autrichien et bavarois (régiments Schmidt et Rouville, 10 à 20 compagnies totalisant 2000 hommes), et deux bataillons bavarois (le premier composé du régiment  Herliberg de 10 compagnies totalisant 1250 hommes, le second composé des régiments Hasslang et Sulz regroupant 20 compagnies pour un total de 2000 hommes). A partir des années 1625-28, les régiments de vétérans dépasseront rarement les 1000 hommes (comme les régiments Reinach et Comargo en 1631), alors que la plupart des nouveaux régiments comptent toujours de 2 à 3000 hommes. À Breitenfeld (1631), les régiments de la Ligue comptaient en moyenne de l’ordre de 2 000 hommes.

Ci-dessus : officier saxon du régiment Löser, arquebusier de la ligue et chasseur bavarois (Aquarelle de K.A. Wilke)

Ci-dessous : piquiers, mousquetaires et double-soldes de la Ligue et/ou de l’Empire(Aquarelles de K.A. Wilke)

Les régiments de cavalerie comptent de 250 à 1000 chevaux, en 5-10 compagnies, celles-ci étant théoriquement à 50-100 chevaux. Ces régiments se déploient sur 10 rangs de profondeurs, pour adopter la tactique de la caracole, cuirassiers devant et arquebusiers derrière.  Entre 1610 et 1630, la doctrine d’utilisation des arquebusiers à cheval était de préparer la charge des cuirassiers en joignant leur feu à celui de la cavalerie lourde. Les régiments de cuirassiers impériaux, qu’ils soient allemands ou wallons, comptaient ainsi un certain nombre de compagnies d’arquebusiers à cheval (en général, 2 compagnies d’arquebusiers à cheval pour 3 compagnies de cuirassiers).  Ainsi, un régiment de cavalerie de 1000 chevaux se composent habituellement de 600 cuirassiers et 400 arquebusiers montés. En pratique, les arquebusiers pouvaient être regroupés en escadrons séparés. Ainsi, lors de la bataille de la Montagne Blanche, la cavalerie de la ligue aurait aligné 3 régiments de cuirassiers (Marradas, Wallenstein et Eynatten de 4-6 escadrons chacun), 8 régiments d’arquebusiers (Dampierre, Gauchier, La Croix, Meggau, Lobel, Histerle, Areyzaga et Montecuccoli, de 2-10 escadrons chacun) et 5 régiments mixtes ou non apparentés à un de ces deux groupes (Cratz, Marcossay, Pappenheim, Bonninghausen et Herzelles, de 5-6 escadrons chacun). A ces types de cavalerie s’ajoutent quelques Cosaques polonais (400 à La Montagne Blanche) ou Croates (de l’ordre de 200 à Wimpfen et à Wiesloch en 1622 et à Stadtlohn en 1625),

Les vieux régiments de cavalerie sont théoriquement à 1000 chevaux, 800-900 chevaux en pratique, comme les régiments de Schoenbourg et de Cronenbourg en 1631, mais les régiments nouvellement levés sont souvent à 500 chevaux (Erwitte, Bongars, Merode et Gehoy) voire à 800 (Eynaten). Les escadrons comptent 250 à 500 chevaux.

Ci-dessous : cuirassiers en armure 3/4, tambour et arquebusier (Aquarelles de K.A. Wilke)

L’artillerie se scinde en batteries de canons légers ou lourds. La ligue aligne ainsi 12 canons, à la Montagne Blanche, en 6 batteries de 2 pièces. Ces canons sont de calibre 12-24 livres et seront nommées, ce jour-là, les « 12 apôtres ».

Ci-dessous : étendards de la Ligue Catholique (Bavarois, en haut, régiment de Tilly)

Stéphane Thion

L’armée danoise de Christian IV (1624-29)

L’armée danoise de Christian IV (1624-29)

Christian IV du Danemark a initié des réformes comparables à celles de Gustave Adolphe mais en restant plus proche du modèle hollandais. Son infanterie est organisée en régiments de théoriquement  12 compagnies de 200 hommes, soit 2 400 hommes, . Au combat, ces régiments doivent idéalement former deux bataillons de 1 200 hommes avec une proportion de deux mousquets pour une pique. Les régiments danois, comme ceux de l’Union protestante, étaient colorés. On distingue ainsi le régiment rouge et le régiment bleu.

La cavalerie danoise du roi Christian IV est organisée en régiments. Chaque régiment compte théoriquement 6 compagnies de 106 chevaux. Une compagnie se divise en quatre troupes, trois de 27 cuirassiers et une de 25 arquebusiers. Les régiments comptent donc  3/4 de cuirassiers et 1/4 d’arquebusiers qui se forment derrière les cuirassiers. La cavalerie se déploie en escadrons de 300 chevaux sur 6 rangs de profondeur et 50 chevaux de front.

L’artillerie est composée de canons, de demi-canons, de couleuvrines, de faucons, de fauconneaux et de petits mortiers de 8 livres, avec une proportion théorique de un à deux pièces pour 1 000 hommes.

Le déploiement souvent adopté par les armées danoises est celui en forme de losange (ou diamant), comme représenté par le sieur du Praissac : deux bataillons en première ligne, puis deux couples de deux bataillons, décalés à gauche et à droite en seconde ligne, et enfin un couple de deux bataillons, derrière les deux premiers, en troisième ligne. Ces huit bataillons sont flanqués d’escadrons de cavalerie, ceux-ci pouvant aussi être déployés en losange, et plusieurs de ces brigades peuvent être déployées côté à côté. C’est la forme déployée par l’armée danoise à Lutter am Barenberg en 1626.

Ainsi, l’armée se déploie théoriquement sur 3 lignes de 3 régiments d’infanterie, ces régiments disposés par paires de bataillons  avec des intervalles entre chaque paire de bataillon. Le second échelon couvrira les intervalles du premier échelon. Le troisième échelon sera déployé comme le premier échelon avec des régiments de cavalerie comblant les intervalles. Le gros de cavalerie sera disposé sur chaque aile, en échiquier. Comme l’infanterie, les régiments de cavalerie seront scindés et alignés en paires d’escadrons.

 

Ci-dessus : déploiement d’une armée selon Du Praissac (in Discours Militaires)

Ci-dessous : déploiement de l’armée de Christian IV à Lutter am Barenberge, 1626 (en bleu, à droite)

Christian IV, de même que Gustave Adolphe, conduira des expérimentations en ce qui concerne l’artillerie. Il rationalisera les calibres en les limitant à 5 calibres différents : fauconneau de 3 livres, double-fauconneau de 6 livres, demi-couleuvrine de 12 livres, demi-canon de 24 livres et canon de 48 livres.

L’armée « idéale » de Christian IV totaliserait 32000 hommes dont 25000 fantassins et 6000 cavaliers, 6 canons, 12 demi-canons, 6 demi-couleuvrines, 6 double-fauconneaux, 6 fauconneaux et 3 mortiers de 8 livres

Les danois ne composaient qu’une part de l’armée du roi Christian. La majorité des troupes étaient des mercenaires allemands, anciens régiments de Mansfeld et de Brunswick. En réalité, après que Christian IV déclara la guerre, il ne put emmener que  régiments danois avec lui. Le reste de son armée était composée principalement de protestants allemands, aux côtés d’écossais, anglais, français et hollandais.

Unités danoises de l’armée de Christian IV de Danemark (1625-26) :

Compagnie d’infanterie de la Garde (Leib) :                           1 compagnie estimée à 400 hommes

Régiment d’infanterie de la garde (Leib, régiment bleu) :  20 compagnies pour un total estimé de 2800 hommes

Régiment d’infanterie Kruse (régiment rouge) :                  20 compagnies pour un total estimé de 3000 hommes (3 bataillons)

Compagnie de cavalerie de la Garde (Leib) :                          1 compagnie estimée à 300 hommes en 1 escadron

Régiment de cavalerie de la Garde (Leib) :                           10 compagnies pour un total estimé de 1000 hommes en 2 escadrons

A ces unités, s’ajoutent les régiments des armées de Mansfeld, de Christian de Brunswick du Landgrave de Hesse-Cassel, du Rhingrave (…).

Source principale : Battles of the Thirty Years War, from White Mountain to Nördlingen 1618-1635  de W.P. Guthrie

 

Ci-dessus et ci-dessous : Arquebusier à cheval et drapeaux danois (Aquarelles de K.A. Wilke)

Ci-dessous : drapeau danois (Armémuseum de Stockholm, taille : 100x100cm)

 

Ci-dessous : cornette de cavalerie

 

Stéphane Thion

L’armée espagnole à la bataille d’Avins (1635)

L’armée espagnole à la bataille d’Avins (1635)

Selon le Mercure Français, l’armée espagnole de Flandre comptait, à la mi-1634, 23 000 hommes de pied et 7 000 chevaux. L’infanterie était composée de quatre régiments d’Espagnols des Maîtres de camp Alonso Ladron, Marquis de Celade, Dom Francisco Capate, et dix compagnies d’Espagnols nouvellement venus d’Espagne, comptés pour un quatrième régiment ; trois régiments d’Italiens des Maîtres de camp duc Doria, marquis Sfondrato, dom Andrea Cantelmo ; sept régiments de Wallons des Maîtres de camp les comtes de Fresin et de Fontaine, le sieur de Ribaucourt, le baron de Wesemal, les sieurs de Triest, de Custrines & de Crequy ; quatre régiments de hauts Allemands des comtes d’Isembourg, de Hoochstrate, du colonel Rouvrois (ou Rouvroy) & du prince de Barbançon ; deux régiments de bas Allemands du marquis de Lede et du colonel Brion ; un régiment d’Anglais du Maître de camp Tresan ; et deux régiments d’Irlandais du comte de Tirconel et de dom Eugenio Onel, qui faisaient en tout vingt- trois régiments. La cavalerie qui était sous la charge du comte de Nassau, était composée de soixante huit compagnies, & des cinq régiments des comtes Buquoy, d’Isembourg, de Salms, du marquis de Celade et du prince Barbançon. En juillet 1634, le marquis d’Aytonne demande au prince Thomas de lever de l’infanterie et de la cavalerie.

Le corps du prince Thomas de Savoie qui va affronter l’armée française ne comptait qu’une partie de ces forces : 10 000 fantassins en 120 enseignes, 3 000 chevaux en 45 cornettes et 16 canons selon Richelieu, 8 000 fantassins et 2 000 chevaux selon Gualdo Priorato. Le comte de Feira en était maître de camp général, le comte de Buquoy y commandait la cavalerie et le comte d’Hoochstrate, l’infanterie. Si on en croit le Mercure Français, les meilleurs régiments ne faisaient pas partie de ce corps puisque, après la bataille, le Cardinal Infant s’était retranché le long du Demer vers Tillemont, avec une armée composée des restes de celle du Prince Thomas, et de ses autres forces où étaient les meilleurs et plus vieux régiments.

La relation du Mercure Français évoque le tercio espagnol d’Alfonso de Ladron de Guevara, le tercio italien de Sfondrato, le régiment anglais de Brons, le régiment allemand d’Hoochstrate et le régiment du prince Thomas. Ce dernier régiment est probablement celui levé fin 1634 et était probablement Lorrain, le Prince ayant été colonel d’un régiment de cette origine lorsqu’il était en Savoie. J.L Sanchez, cité par Pierre Picouet, évoque aussi le régiment wallon de Frezin. Le tercio espagnol d’Alfonso de Ladron de Guevara est un vieux corps puisqu’il s’agit du tercio viejo de los Estados de Brabante.

En 1635, un tercio espagnol compte en pratique rarement plus de 1 500 hommes, même si l’effectif théorique est de 3 000 hommes. Ainsi, la montre de mai 1636 donne 166 officiers et 946 soldats pour le tercio de Ladron de Guevara. La carte de Melchior Tavernier montre 7 escadrons espagnols ce qui donnerait bien 7 à 10 000 hommes pour l’infanterie. Le tercio de Ladron de Guevara et celui de Sfondrato ont peut-être formé 3 ou 4 escadrons à eux deux.

La cavalerie comptait 45 cornettes selon Richelieu, jusqu’à 40 compagnies selon Pontis. En ne comptant ces compagnies qu’à 50 chevaux, cela nous donne un minimum de 2 000 chevaux. Tavernier a représenté 17 gros escadrons sur sa carte, ces escadrons faisant au moins le double de la taille des escadrons français. L’estimation de Richelieu, soit 3 000 chevaux, parait donc tout aussi plausible. Une bonne partie de cette cavalerie était formée par le régiment de Bucquoy. Il s’agissait probablement d’un régiment de cuirassiers à dix compagnies, faisant de 700 à 1 000 chevaux.

L’infanterie espagnole en 1635

L’Espagne dispose, à l’aube de la guerre de Trente ans, d’une infanterie qui inspire le plus grand respect. Bien commandée, solide et disciplinée, cela fait un siècle et demi qu’elle s’impose sur les champs de bataille d’Europe. Sa force principale repose sur les terribles tercios viejos.

Le tercio compte, depuis 1632, 12 compagnies de 250 hommes, ou 15 compagnies de 200 hommes pour un tercio levé en dehors de la péninsule ibérique, soit un effectif théorique de 3 000 hommes par tercio. L’ordonnance de 1632, légèrement modifiée en 1633, ne souhaite pas, sans l’interdire, que les tercios soient à 20 compagnies. En pratique certains auront jusqu’à 26 compagnies. Une compagnie au complet doit compter, selon cette ordonnance, 11 officiers (un capitaine et son page, un alférez, un enseigne ou abanderado, un sergent, deux tambours, un fifre, un fourrier, un barbier et un chapelain) et 239 soldats dont 90 coseletes (piquiers en cuirasse), 89 arquebusiers et 60 mousquetaires. Parmi les soldats, on compte 10 cabos de escuadra, c’est à dire chefs d’escadre ou caporaux. La compagnie de 200 hommes doit compter, pour sa part, 70 coseletes, 90 arquebusiers et 40 mousquetaires. Cette ordonnance prévoit aussi, pour l’état-major des compagnies, un alferez et deux sargentos (sergents) réformés, c’est à dire de remplacement. L’état-major permanent du tercio comprend 8 officiers supplémentaires : le mestre de camp, le sergent major, le capitaine de campagne, le tambour major, l’auditeur militaire, le fourrier principal, le chapelain principal et le chirurgien principal. L’ordonnance de 1632 tente par ailleurs d’endiguer la mauvaise habitude prise par les coseletes de se débarrasser de leurs cuirasses et de raccourcir leurs piques. Elle prévoit cependant que les piquiers moins biens armés ne soient pas placés aux deux premiers rangs. Cette tendance à allègement se retrouve bien sûr chez toutes les nations d’Europe.

Certains tercios sont permanents, ou fixes, comme les régiment entretenus français. Et parmi eux, les plus redoutés sont les tercios viejos. Les principaux tercios fixes de l’armée de terre sont (avec le nom de leur mestre de camp en 1635), les tercio viejo de los Estados de Flandes (Villalobos), ter-cio viejo de los estados de Brabante ( Ladron de Guevara), tercio viejo de los Estados de Holanda (marquis de Celada), tercio fijo de Napoles (Ascoli), tercio fijo de Lombardia (Aragon y Tafalla), tercio fijo de Sicilia (Toledo), tercio de Saboya (Coronado y Mendoza), et la Coronelia de la Guardia del Rey. À ces unités s’ajoutent les tercios de la Marine répartis en Espagne, à Naples et en Sicile.

Les tercios espagnols sont par ailleurs épaulés par l’infanterie des nations, provenant des territoires appartenant à la couronne d’Espagne : Flandre, Bourgogne (qui se limite, à cette époque, à la Franche-Comté), Sicile, Naples et Lombardie (limitée au Milanais). Si l’infanterie italienne et bourguignonne est organisée sur le même pied que l’infanterie espagnole, en tercios de 12 compagnies totalisant 3 000 hommes, les tercios wallons sont organisés comme les tercios espagnols des Flandres, en 15 compagnies de 200 hommes, totalisant aussi 3000 hommes. Mais chaque compagnie compte, sur le papier, 12 officiers, 46 piquiers et 142 mousquetaires. Les régiments allemands ou lorrains au service de l’Espagne comptent pour leur part 10 compagnies de 250 ou 300 hommes.

Bien sûr, il s’agit d’effectifs théoriques, correspondant à un régiment nouvellement levé ou ayant fait recrue. En pratique, les effectifs fondaient rapidement. Ainsi, pour la bataille de Nördlingen, en 1634, le tercio d’Idiaquez compte 1 800 hommes en 26 compagnies et le tercio de Fuenclara, 1 450 hommes en 17 compagnies. Le tercio napolitain de San Sivero compte 1 900 hommes en 24 compagnies, celui de Toralto, 750 hommes en 10 compagnies et celui de Cardenas, 950 hommes en 13 compagnies. Enfin le tercio lombard du prince Doria compte 1 000 hommes en 12 compagnies alors que celui de Lunato en compte 1 300 en 15 compagnies.

 (Aquarelles de K.A. Wilke)

Face à l’ennemi, les tercios se forment en escadrons (escuadrones), équivalent des bataillons français. L’escadron, qui se forme maintenant couramment à partir d’un seul tercio, se déploie dans les années 1630 sur un maximum de 12 rangs, probablement 8 ou 10 comme les bataillons français. Les piquiers forment le bloc du centre alors que les arquebusiers forment les garnisons sur les deux flancs de ce bloc. Des manches (mangas) de mousquetaires viennent alors se déployer sur les ailes de l’escadron, mais peuvent aussi opérer indépendamment. Contrairement à une idée reçue, à partir de 1635, un escadron comptera rarement plus de 1 000 hommes. Sur le terrain, rien ne le distingue donc de son homologue français, hollandais ou allemand.

La cavalerie espagnole en 1635

Si l’infanterie espagnole bénéficie d’une forte réputation, il n’en est pas de même pour la cavalerie. Et de fait, le roi d’Espagne recrutera une grande partie de sa cavalerie en Lombardie, à Naples, en Wallonie, en Franche-Comté, en Lorraine, ou encore en Allemagne. Ainsi, l’armée du Cardinal-Infante qui se dirige vers Nördlingen, en 1634, compte 700 cavaliers napolitains, 590 cavaliers bourguignons et 500 cavaliers lombards pour seulement 230 gardes à cheval espagnols, en deux compagnies.

Il existe alors trois grands types de cavaliers au service du royaume d’Espagne : le lancier (caballo-lanza), le cuirassé (caballo coraza qui a remplacé le reître ou herreruelo) et l’arquebusier à cheval (arcabucero a caballo).

La cavalerie l’espagnole est la dernière à utiliser des lanciers, en Europe, mais ceux-ci ne sont plus qu’en faible nombre, formant principalement des compagnies de Gardes. Ludovic Melzo, dont les Règles militaires pour le gouvernement et le service de la cavalerie furent publiées en 1619, affirmait que la principale utilisation de ces lances consiste à suivre les arquebusiers, lesquels, après avoir délivrer leur charge sur les troupes ennemies de face et par les côtés, les ayant décomposées et mises en confusion, seront suivies par la charge des lances par le côté ou de face en fonction de l’occasion ou de l’opportunité qui se présente. Mais il soulignait déjà qu’il fallait quatre conditions pour bien utiliser des lanciers : un terrain favorable, un cheval de qualité, un cavalier bien entraîné et une formation de combat adaptée, c’est à dire de petites troupes d’une trentaine de lances. Enfin, l’auteur espagnol liste l’équipement théorique du lancier : la cuirasse (plastron et dossière) à l’épreuve des balles, les cuissards (quixotes), les garde-reins, les brassards, la salade (celada, un casque à visière) et un gantelet à l’allemande à la main gauche. La lance du capitaine devra porter sa banderole de manière bien voyante. Les soldats peuvent remplacer les cuissards par des tassettes, plus pratiques pour le travail de la lance. Ils devront porter un pistolet d’un côté de l’arçon et la salade ou bourguignotte de l’autre.

(Aquarelles de K.A. Wilke)

Les caballos corazas sont, en cette première moitié du XVIIe siècle, similaires aux chevaux légers français. Ils forment à cet égard la plus grande part de la cavalerie espagnole. Melzo décrit ainsi leur équipement : les soldats des cuirasses doivent être armés d’un plastron et d’une dossière à l’épreuve du pistolet, et des autres armes que portent les soldats des lances, et de plus ils doivent porter des cuissards (quixotes). Ils doivent porter des pistolets d’arçon, et derrière, à droite, ils attachent d’ordinaire la salade (celada). Comme pour la cavalerie française, sous l’influence des Suédois et des Hongrois, cet équipement va progressivement s’alléger, à partir des années 1634-36, pour ne garder que la demi-armure et un casque de type bourguignotte ou capeline.

L’arquebusier à cheval est l’équivalent du carabin français. Melzo affirme que les arquebusiers à cheval furent inventés par les français, lors des dernières guerres du Piémont qui les appelèrent dragons, nom qu’ils gardent encore. Ayant appris l’avantage et l’utilité de cette nouvelle sorte de soldatesque, les Espagnols commencèrent aussi à les utiliser au sein de leur armée. Et lorsque le duc d’Albe passa dans les Flandres, il amena avec lui quelques une de ces compagnies. Elles servirent d’abord à pied, puis elles servirent à cheval, avez des arquebuses à rouet, et elles continuèrent à servir ainsi. Quand à son équipement, il écrit qu’il serait convenable d’armer les arquebusiers à cheval d’un plastron et d’une dossière (cuirasse), mais cela reste à prouver ; parce que embarrassés de ces armes, ils ne peuvent servir en les oc- casions où il est nécessaire de mettre pied à terre. (…) En aucun cas ils ne doivent mettre des cuissards, ni des garde-reins, parce qu’ils sont excessivement embarrassants lorsqu’il faut mettre pied à terre. Ils doivent porter une arquebuse légère… Les soldats devront porter un mousquet à rouet, de onze livres et demi de balle, le canon long de quatre palmes, qu’ils devront porter du côté droit avec la bandoulière ; et y ajouter un morion de même qualité et forme que celui du capitaine.

Dragons espagnols (Aquarelle de Wilke)

Enfin, les généraux possèdent fréquemment deux compagnies de gardes, une de lanciers et une autre d’arquebusiers à cheval. Les deux compagnies de gardes du Cardinal-Infante seront ainsi présentes à la bataille de Nördlingen. Melzo les évoquait déjà dans son traité, vers 1615.

La cavalerie espagnole est organisée en compagnies de théoriquement 100 chevaux. Chaque compagnie, commandée par un capitaine, doit aussi comprendre deux trompettes, un maréchal des logis, un fourrier, un chapelain, un armurier et un barbier. Melzo précise que les cuirassiers devront toujours se déplacer au trot, pour ne pas se désunir, et qu’ils devront être ordonnés en gros escadrons de 200 à 400 chevaux. Plus l’escadron sera renforcé, mieux ce sera, et la rencontre plus galante, et on pourra en attendre le meilleur effet, ajoute t-il.

L’Artillerie

Depuis 1609, selon Diego Ufano Velasco, l’artillerie espagnole n’utilise plus, théoriquement, que quatre calibres : le canon tirant 40 livres de balles, le demi-canon tirant 24 livres de balles, le quart de canon tirant 10 livres de balles et le quint de canon – ou octave et auquel on peut substituer la quart de couleuvrine – tirant 5 livres de bal- les. Seuls les deux derniers sont utilisés en campagne, les deux premiers étant réservés aux sièges.

Le déploiement de l’armée

Selon Brancaccio, une armée espagnole des années 1620 dispose sa cavalerie de chaque côté de l’infanterie, les troupes d’arquebusiers à l’extérieur, et les troupes de cuirassiers entre l’infanterie et les arquebusiers à cheval. Une troupe de près de 200 cuirassiers sera placée en avant, suivie de deux troupes de 300 cuirassiers de chaque côté et à 60 pas derrière, suivies de trois autres troupes à 60 pas derrière, dans les intervalles, puis enfin, un dernier échelon de deux troupes à 60 pas derrière, dans les intervalles. Au centre, l’infanterie est aussi disposée en échiquier, chaque escadron à 200 pas l’un de l’autre, pour laisser au second échelon la place de passer dans les intervalles. Le second échelon se positionne 20 pas derrière leur premier et les manches de mousquetaires et arquebusiers se dispo- sent entre les troupes de cavalerie et entre les escadrons d’infanterie.

Une relation du voyage du Cardinal- Infante en 1633-34, nous précise le déploiement réel d’une l’armée espagnole : début septembre 1634, peu avant la bataille de Nördlingen, toute l’infanterie se mit en escadrons, chaque tercio à côté l’un de l’autre, ainsi bien fixés, occupant un front de plus d’un quart de grande lieue (soit 1,5 kilomètre), ils étaient neuf tercios en tout, deux d’Espagnols, quatre de Napolitains, trois de Lombards et deux régiments d’Allemands. Chaque tercio constituait alors un escadron occupant un front de près de 170 mètres.

À Avins, le prince Thomas déploiera son infanterie sur deux lignes, les sept escadrons d’infanterie disposés en échiquiers. La cavalerie, dans un premier temps placée en un rideau pour masquer les lignes espagnoles, sera ensuite déployée sur les ailes et en seconde ligne.

Drapeaux espagnols (Aquarelle de K.A. Wilke)

Stéphane Thion