Archives de
Category: Histoire

Les 10 meilleurs généraux de la Guerre de Trente ans, par Stéphane Thion

Les 10 meilleurs généraux de la Guerre de Trente ans, par Stéphane Thion

Jérémy de la Taverne d’Imrahil reçoit Stéphane Thion pour évoquer les 10 meilleurs généraux de la Guerre de Trente ans.

* Deux erreurs à modifier sur la fin de l’émission. C’est Mélo et non Piccolomini qui remporte la belle victoire d’Honnecourt sur les français en 1642. Avant de subir une défaite à Rocroi l’année suivante. Et pour Piccolomini, il fut un excellent général de cavalerie et c’est à Thionville qu’il remporta sa seule victoire comme général d’armée.

Lucien Rousselot

Lucien Rousselot

Lucien Rousselot (1900-1992)

« Peintre et illustrateur de sujets militaires, au cours de sa carrière, il a produit une abondante iconographie traitant des uniformes portés au sein de l’Armée française sur une vaste période allant du XVIe siècle à la fin du XIXe siècle. Il collabora à partir des années 1920 comme illustrateur et uniformologue à la revue le Passepoil dirigée par Eugène-Louis Bucquoy, pour qui il illustra aussi certaines des séries de cartes consacrés aux uniformes du Premier Empire. Membre de la société La Sabretache il collabora aussi pour la revue de la société Le Carnet de la Sabretache et ce jusqu’aux années 1990. Son œuvre considéré comme majeure est la série de 106 planches uniformologiques traitant, pour plus de la moitié d’entre elles, des uniformes français portés durant le Premier Empire L’Armée française, ses uniformes, son armement, son équipement qu’il réalisa de 1943 à 1970. Pour la réalisation de ses peintures et ses planches il utilisait des mannequins articulés de soldats et de chevaux miniature qu’il avait fabriqué à l’échelle 1/7e, accompagnés d’accessoires. Il est inhumé à Marles en brie (Seine et Marne) ». ( Source Wikipedia).

Bien que surtout connu pour ses peintures portant sur le I°Empire, Lucien Rousselot a également proposé de superbes planches portant sur la Guerre de Trente ans.

 

Faire campagne durant la guerre de Trente Ans par Hervé Drévillon

Faire campagne durant la guerre de Trente Ans par Hervé Drévillon

« Faire campagne au XVIIe siècle, pendant la guerre de Trente Ans » par le professeur Hervé Drévillon, de l’université Paris I, directeur du domaine « Histoire de la défense et de l’armement » à l’IRSEM. Conférence enregistrée mardi 18 décembre 2012 à l’École militaire et publiée par Theatrum Belli.

La Guerre de 30 ans : 1648 – La paix de Westphalie, un documentaire d’ARTE

La Guerre de 30 ans : 1648 – La paix de Westphalie, un documentaire d’ARTE

https://youtu.be/NSXFVtZ8ke0

Entre 1618 et 1648, une grande partie de l’Europe est dévastée par une guerre opposant catholiques et protestants, mais qui implique également les grandes puissances du continent, qui toutes cherchent à protéger leurs territoires. Voici les derniers jours des négociations qui ont mis fin à la guerre de Trente Ans, racontés à la manière d’un film d’action.

Pour la première fois dans l’histoire, l’issue d’un long conflit se joue à la table des diplomates.

Concentrée sur les derniers jours des négociations qui se sont déroulées à Münster et Osnabrück, ce documentaire-fiction met en scène les tractations d’une paix qui, en scellant la fin de la guerre de Trente Ans, a posé les bases d’un nouvel équilibre entre les puissances européennes.

1648 – La paix de Westphalie Documentaire-fiction de Holger Preuße (Allemagne, 2018, 1h30mn)

Présentation d’une liste d’armée française pour Tercios: l’Armée des protestants français devant Montauban en 1621

Présentation d’une liste d’armée française pour Tercios: l’Armée des protestants français devant Montauban en 1621

Présentation d’une liste d’armée française pour Tercios :

l’Armée des protestants français devant Montauban en 1621

Cette armée correspond à la liste qui a été jouée pour la Convention Tercios du 2 et 3 avril 2022. Elle se base sur la liste d’armée française mais exploite certaines possibilités afin de restituer les particularités des armées huguenotes (nom donné aux protestants français). Ces troupes furent placées sous le commandement en chef du duc Henri de Rohan lors des trois « guerres de Rohan » de 1621 à 1629 que les historiens nomment aussi les « révoltes huguenotes » . Elle sont en fait de véritables guerres, tout à fait comparables en effectifs combattants et moyens à la guerre civile anglaise sur laquelle nous somme plus que largement documentés par la littérature militaire anglo-saxonne.

Les troupes protestantes au siège de Montauban 

Milices montalbanaises au combat à Villebourbon lors du siège, lors de la sortie où fut tué Mayenne, commandant des troupes royalistes, détail d’une gravure (BNF)

Nous avons pas mal de documents d’archives et de sources concernant les troupes protestantes au siège de Montauban. Etienne Joly donne une ordre de bataille pour les troupes de Montauban, de l’infanterie, la cavalerie et l’artillerie (40 pièces dont 6 canons, 15 couleuvrines et d’autres pièces légères) :

Le comte d’Orval, François de Béthune fils de l’ancien ministre d’Henri IV, Sully, est le véritable chef durant le siège, Rohan ayant quitté la ville en août pour Castres.

Il a personnellement recruté une compagnie de 50 gendarmes et 30 gardes à cheval (mousquetaires ou carabins) portant, selon l’usage, des casaques aux armes de leur maître. (blanches barrées de rouge).

– Son régiment à 10 enseignes ,

-Le régiment de Quercy

-Le régiment de Montpouillan (Fils du Duc de la Force) futur régiment de Belsunce en 1653

150  gentilshommes volontaires

3 cornettes de chevaux légers (formation incomplète) soit environ 300 cavaliers

30 compagnies bourgeoises (200h chacune en théorie) soit 4000 hommes en tout.

Le recrutement est principalement local, les villes, les seigneurs lèvent , équipent et habillent des compagnies auprès d’une population directement concernée par la défense de ses croyances. Les assemblées donnent « commission d’y lever 4000 hommes », comme par exemple en Cévennes « tant de peiz que de cheval » pour Châtillon en 1621.  Les places de sureté comme Montauban, La Rochelle, Nîmes et Montpellier entretiennent un état de défense quasi permanent au sein des populations, ainsi Montauban,  le récit des guerres de Louis XIII indique qu’elle comporte« grande quantité de gens aguerris , tant par le naturel de la nation, que pour le long usage et pratiques ordinaires des armes, qu’ils ont maniées durant les troubles et les guerres civiles ».

Comme on le verra plus tard dans la New Model Army de 1642, ces troupes sont fortement disciplinées et endoctrinées. Le règlement, influencé par la rigueur calviniste, veille particulièrement à la discipline et à la moralité des soldats, le choix des pasteurs , donne défense de jurer et de mener une vie licencieuse. Les soldats et capitaines devront donner l’exemple et « seront exhortez d’avoir des pasteurs ordinaires » dans les compagnies (Mercure 1621). On précise bien l’interdiction de piller les paysans et de payer le logement (art 18 les capitaines répondront des excès et malversations de leurs soldats.). Les pasteurs jouent un rôle important et souvent paient de leur personne au sein des compagnies. Le comte Chastenet de Puységur nous l’atteste dans ses mémoires « Rohan et le comte d’Orval, son beau frère deuxième fils de Sully avaient recruté pour son compte un régiment fort de 10 compagnies, ils organisent la défense et nomment le marquis de la Force en commandant de la Place. Il divisa les habitants valides en 30 bataillons assistés de pasteurs comme Chamier, commandés par de bons officiers, continuellement exercés et soumis à une discipline vigilante et rigoureuse ». Ce même pasteur Chamier  meurt , coupé en deux par un boulet , alors qu’il repousse un assaut «  lequel estant armé de cuirasse et d‘une pique, s’étant levé sur le terrain près le bastion du Moustier, fut frappé du canon à l’endroit du ventre duquel sortirent les boyaux » [1]  . Les catholiques firent de sa mort spectaculaire un poème peu élogieux…En Cévennes, lors de la 2e guerre , Rohan fait précéder son entrée de pasteurs lisant les écritures. Nous sont parvenus les textes des prières des soldats protestants, dont celle du matin :

«Notre père… puisqu’il t’a plu nous faire la grâce de passer la nuit … pour ce que notre fragilité pourrait être cause sans ton aide spéciale, de nous faire facilement abuser des armes que tu nous as mises à la main, nous te supplions … que suivant l’enseignement de la Sainte Parole, en nous contenant de nos gages, et vivant en toute sobriété et modestie, sans noise, mutinerie, batteries, pilleries, blasphèmes, paillardise ni autre excès, tu nous fasses la grâce de cheminer en ta crainte, et nous employer saintement  en cette vocation des armes, à la quelle tu nous as appelés »

Toutefois, la motivation des ces troupes est locale. Envoyées trop loin, elle peuvent se débander comme ce régiment Cévenol envoyé en Ariège qui n’atteint jamais le Mas d’Azil, les deux tiers des hommes s’en étant retournés. De  même, Les Cévenols du capitaine Durfort, s’en retournant de Montauban, qu’il venaient de secourir seront pris en embuscade en annihilés près de la Lavaur au début de l’année 1622. On s’appuie aussi sur des troupes soldées « permanentes » , ainsi que des mercenaires.  Ceux-ci sont présents  à la Rochelle, Montpellier et Montauban. Ils sont Escossois ou anglais, comme les 600 anglais défendant la Rochelle, mais aussi hollandais, tels ces 200 hommes venus de Montélimar au siège de Lune et une compagnie de « chevaux légers écossais » commandés par un Stuart à Montpellier. Selon l’Histoire de la province du Languedoc de Dom Vayssette, un chargement d’armes venu des Pays bas s’échoue vers Aigues -mortes en 1621, puis un deuxième est saisi à Sète . Donc les protestants reçoivent bien des secours de Hollande, en matériel, mais aussi en hommes. 

Milices « règlées » de Montauban (détail d’un gravure du siège, BNF)

Certains mercenaires sont même des catholiques, risquant la condamnation à mort en cas de capture, et tous ont les mêmes défauts inhérents à ce type de troupe : pillage, indiscipline. En moyenne, les troupes protestantes, défendant leurs terres et leurs communautés sont notoirement moins pillardes que celles du roi qui « font le dégast », ne s’en prenant qu’aux bien des églises. Le règlement prévoit aussi la question des rançons puisque cette coutume perdure.

A Montauban, Montpellier et la Rochelle on trouve aussi la présence d’au moins une compagnie de « femmes desquisées en hommes et armées et furieuses »[1]  qui participent activement à la défense et galvanisent les troupes. Beaucoup de femmes servent aussi lors des sièges, apportant les fascines lors des sorties et des assauts. Les plus nombreux témoignages sont ceux de Montauban où le consul Natalis évoque jusqu’à « 300 femmes avec armes, cailloux et pelles lesquelles Dieu arma d’un si merveilleux courage que jaçoit , après que la mine eut joué …. Elles auraient accouru, non seulement jusque ladite brêche mais encore aucunes d’elles sortirent avec nos dits soldats jusques aux dites gabionnades combattant nos dits ennemis à grands coups de cailloux »

Natalis, 1er consul de Montauban raconte qu’au 4e jour de septembre , contre ville-bourbon : «Monsieur du Mayne fit donner un assaut au dit Ville-Bourdon avec environ deux mille hommes, les premiers desquels gagnèrent la demi-lune qui était au-devant du portal et seraient entrés dans les fossés des basions, contre lesquels avoient mis six eschelles faites de telle façon que deux hommes pouvoient aisement y monter de front….aucuns estoient parvenus jusques au bout et se seroient prins avec leurs mains d’autant que lesdictes eschelles estoient courtes aux barricades pour grimper dessus mais une jeune  fille avec une desdictes faux leur coupa les doigts au oremier et le fit tomber dans le fossé….Il y eut au dit assaut quelques femmes si courageuses qu’elle s’y présentèrent, tirèrent de mousquetades, et repoussant nos dits ennemis avec autres long bois en tuèrent plusieurs. Nous eûmes une marque spéciale de l’assistance du seigneur, lequel , à même heure, fit paraître l’arc en ciel, ores il fut net et clerc précise encore plus loin sur ce même assaut : «  se présenta une aussi grand multitude d’elles armées les aucunes de piques ou de demi-piques, autres de hallebardes, autres de faux à faucher près , manchées à rebours, autres avec des cailloux et autres des haches , avec les quelles armes sans craindre furie du canon qui jouait , ni les coups de mousquetades, même et qui… sans s’étonner de celles qui tombèrent mortes à leurs pieds des dits coups,  elles rompaient des piques des dits ennemis, en blessaient plusieurs et les culbutaient des échelles dans les fossés, voire jusques à être descendues dans iceux par les casemates et là à aider à en tuer plusieurs. En somme plusieurs attestèrent qu’elles n’avaient guère moins combattues que nos soldats même »[2]

Le 28 octobre, une autre femme s’illustre : « Où était le canon au faubourg du Moustier, s’étant trouvé une fille chambrière agée d’environ 22 ou 23 ans, appelée Marthe de Carnus, fille de forgeron, laquelle s’est montrée si courageuse qu’elle n’a point fait de difficulté de sortir hors de la ville, se mêler avec nos dits soldats et être allée sans crainte des arquebuzades jusques au dite canons desquels elle en a encloué un et eut continué d’en faire autant aux autres sans l’empêchement du dit feu, ce que plusieurs soldats n’avoient osé faire. Gloire en soit à l’éternel … Plus loin il complète son récit exemplaire [3]: « Ne se trouvant aucun capitaine ni soldat qui voulut monter jusques ausx dits canons pour les enclouer,… elle se présenta pour ce faire et au dit effet se fit bailler un marteu et des clous à un  des capitaines et… elle commença à enclouer un comme elle fit… Mais elle fut empêchée, tant à cause du feu, que par les chefs de nos dits ennemis… et vue la coïonnerie de leurs soldats de garde… de sorte que les voyant près elle se soit retiré avec nos dits soldats, sans craindre des mousquetades qu’on faisoit pleuvoir autour d’elle »

Tallemand des Réaux , dans ses truculentes historiettes, cite deux montalbanaises : « Une vendeuse de pomes, nommée la Salissote, présenta à la brèche, y eut le bras emporté , prend ce bras, le met dans son tablier et va chez le chirurgien. Comme on la pançoit, elledisoit, « coupez encore cela ». Elle vivoit encore en 1650 »

« A Montauban, comme un jeune soldat s’alloit s’exposer au péril qu’il y avait à mettre le feu à la galerie, une vieille femme luy osta le flambeau de la main en disant « mon enfant, tu pourras rendre de bons services à la Patri ; pour moy , je luy suis inutile ; j’ay assez vécut » et elle s’en alla mettre le feu à la galerie »

Autre particularité, on remarque  que ces milices « réglées » sont habillées par leurs propriétaires , des nobles ou des consuls, mais armées par les villes. Si  l’armement des compagnies urbaines « non réglées » est plus hétéroclite et uniquement adapté à la défense des remparts (faux, hallebardes , demi-piques, cailloux, quelques mousquets…), comme on en trouvera à Montauban (les compagnies de femmes) ou à Privas en 1629,  ce n’est pas le cas des compagnies bourgeoises et des régiments levés, bien équipés de piques, armures , mousquets et au moins d’arquebuses. Ainsi en est-il de la compagnie colonelle d’un des deux régiments de la ville de Castres formé par le Consul Bouffard Madiane en 1621. Son régiment de 4 compagnies de 100 « mousquetaires »[4] est doté d’un étendard dont la description, rarissime chez les protestants, nous est donnée dans ses Mémoires :  « Madiane fist le drapeau de son petit régiment (sa compagnie) en eschiquier, de blanc et bleu, avec une et bande blanche d’un bout à l’autre ».  Les armées sont confiées contre billet et son restituées après la guerre. Les compagnies bourgeoises sont armées par les villes qui fournissent les armes contre reçu. Les vitraux de Troyes nous montrent des régiments, dotés du même armement que les troupes royales, mais arborant les couleurs de Soubise (blanc rayé de rouge). D’autres gravures allemandes des sièges de 1621-1628 montrent des étendards rayés , comme au temps des guerres de Religion et la Hollande.

Les troupes issues des campagnes devaient avoir un habillement plus hétéroclite, chaque seigneur essayant de donner les couleurs de sa livrée à ses troupes ou au moins des signes distinctifs.  Cette mesure semble avoir été davantage pratiquée dans les cornettes de cavalerie que dans l’infanterie. Mais à Montauban, les compagnies ont des « accoutrements » c’est-à-dire des tenues uniformes et ceci est déjà attesté vers  1588, où selon Agrippa d’Aubigné, les Protestants du Languedoc avaient décider de se vêtir de même manière. D’autres sources indiquent que ceux de Montauban étaient tous « vestus de Jaune » en 1586, mais on trouve aussi le gris et noir dans les vêtements communs des habitant de cette ville ce qui est confirmé par les témoignages du siège qui évoquent les « couleurs » des régiments de la ville . Hector Joly, dans son journal du siège, y fait une référence explicite : « Donna l’occasion aux conseils de guerre de s’assembler et de créer extraordinairement ces cinq proconsuls… pour assister et ordonner aux conseil, ordonner des commissaires, et faire habiller les soldats venus au secours, ce qui tourna à telle conséquence, qu’en  fin , il fallut donner des accoutrements à toute la garnison, et même à la plupart des volontaires. » (p99) . En effet, Les troupes Cévénoles venues secourir Montauban en octobre 1621 n’en ont visiblement pas d’autre que les chemises blanches passées par-dessus leurs vêtements en signe de reconnaissance. Le chef Camisard, Jean Cavalier dans ses mémoires expliquera que la coutume des camisards de se vêtir de blanc « vient du temps des guerres de Rohan ».

[1] Chastenet de Puységur

[2] Natalis  p 52

[4]Attention, le terme signifie qu’il n’y a pas d’arquebusiers, mais il comporte, comme tous les régiments de l’époque, au moins un tiers de piquiers !

Note: Pour l’organisation de la cavalerie je vous renvoie à l’article (le combat de Fauch)

La liste d’armée

La Thématique est donc celle des troupes alignées devant Montauban à l’été 1621, lors du siège victorieusement remporté sur les troupes de Louis XIII. C’est une armée composée de régiments réguliers entraînés et par les compagnies de milices montalbanaises dont ses deux compagnies de femmes qui s’illustrèrent durant les sorties. L’armée représente un « parti » détaché pour une sortie en masse  composé de bataillons d’appui, de compagnies d’assaut supportées par des tirailleurs et d’un peu de cavalerie « légère » (chevaux légers et carabins) et pas d’artillerie (même si , au départ ma liste en comportait)

Ce qui donne ceci:

PROTESTANTS Français 1620-1629       
TYPES   NIVEAU POINTS VERTUS TRAITS ARMES ETC
COMMANDANT EN CHEF  3 50 drill (vertu) coordonnateur, préparé
Bataillon cévenol réformé 135 vétéran    
Régiment d’infanterie 0 5 Aucun    
bataillon réformé réformé 135 (vétéran) ou mousquets  
bataillon réformé réformé 135 (vétéran) ou mousquets  
Compagnie de mousquetiers 35 tirailleurs mercenaires arquebuses
 Milices montalbanaises 1 10 zélé    
Compagnie de mêlée LARGE 100 braves milices hallebardes
Compagnie de mêlée LARGE 100 braves milices hallebardes
Compagnie de mousquetiers 35 tirailleurs mercenaires arquebuses
Compagnie de mousquetiers 35 tirailleurs mercenaires arquebuses
Régiment de cavalerie 1 10 Agressif    
Chevaux légers   105 demi cuirasse vétérans
Chevaux légers   95 demi cuirasse  
Chevaux légers   95 demi cuirasse  
Régiment de cavalerie 1 10 infatigable    
Carabins (arquebusiers à cheval)   LARGE 90 Arquebuse caracole pistolets
Carabins     70 Arquebuse caracole pistolets

La liste présente plusieurs originalités par rapport à une lise française « classique »

Les compagnies de mousquetiers en grand nombre et au coût minimum (tirailleurs, mercenaires, armes obsolètes)

Pour le tournoi j’ai joué les régiments de ligne en Mousquets plutôt qu’en tant que vétérans. En effet j’ai considéré que les compagnies de mousquetiers représentaient les compagnies d’arquebusiers détachés. A la pratique, ces compagnies de mousquetiers se sont révélées très fragiles au tir comme en mêlée et n’ont pas joué pleinement leur rôle désorganisateur sur l’adversaire. Mis à part celles bien protégées par des couverts, elles ont donné des points à l’adversaire. 

Les compagnies de mêlées montalbanaises gonflées à bloc (large, brave, hallebardes)

Je voulais tester les compagnies de mêlées et représenter le fanatisme des milices protestantes menées au combat par les pasteurs en armes qui se sont faits tuer sur la brèche comme le pasteur Chamier. C’était aussi l’occasion , rare à Tercios, d’aligner un bataillon de femmes armées, des groupes d’assaut de gentilshommes volontaires, des pétardiers, bref de faire de belles unités. Avec une stamina , un combat et un courage  de 4, elles ont parfaitement joué leur rôle de béliers. De plus elles ont causé pas mal de soucis aux unités adverses (Tercios et plastuns cosaques protégés par leurs chariots). Leur vitesse de déplacement (5″) combiné au run (10″) créait une masse mobile, procurant les mêmes sensations qu’une armée de highlanders… mais Français ! Le seul regret fut de n’avoir pas rentabilisé les hallebardes puisque les adversaires n’ont pas été mis en désordre au bon moment lorsque les milices sont arrivées au contact. Toutefois, je pense qu’elles restent très utiles et

Le trait « zélé » du commandant permet de faire face à des imprévus (passer en « defend ») , mais résulte avant tout d’un choix de fluff. Un trait augmentant la mêlée pouvait être tout aussi efficace.

Une cavalerie française « légère » mais efficace.

La cavalerie protestante aligne très peu de gendarmes mais surtout des compagnie de « maîtres » , c’est à dire de chevaux légers, mal cuirassés selon les mots d’Henri de Rohan. De ce fait, ils n’ont comme seule option que la demi-cuirasse . Les unités sont peu coûteuses mais assez efficaces pour soutenir l’infanterie.

Le reste de la cavalerie est composé de deux unités d’arquebusiers à cheval ou plutôt « carabins » selon la terminologie française, armés de pistolets pour augmenter leur efficacité . L’unité « large » permet , avec l’option « infatigable » du commandant , de donner à ce régiment plus de résistance, puisque son rôle majeur est de retenir une aile ou de supporter par le feu les autres troupes.

Une infanterie réformée austère et classique

Les trois bataillons d’infanterie réformés ont joué efficacement leur rôle face aux unités d’infanterie de même acabit ou plus légères comme les plastuns. Ils souffraient de la faible qualité (0) du commandant qui n’était qu’en partie compensée par le général en chef. L’option mousquet donne l’allonge nécessaire, mais finalement ils se sont bien comportés en corps à corps, même si, sur le long terme, ils n’étaient pas de taille face aux  terribles tercios viejos. Les jouer tous en vétérans pouvait augmenter leur capacités. 

Pas d’artillerie !

Dans la première mouture, une batterie large avec mortier était censée représenter le « canon de Montauban ». J’y ai renoncé au profit d’un peu plus de cavalerie et d’un groupe de mêlée supplémentaire. Une batterie , même légère, aurait pu apporter l’effet désorganisant qui m’a manqué.

Conclusion:

Je n’ai pas eu le temps de « tester » cette armée. Je l’ai donc, comme mes adversaire (Espagnols, Cosaques), découverte « sur le tas » avec ses défauts et ses avantages. Elle fut toujours très « fun » de par sa composition inhabituelle. Ce qui prouve qu’il est possible de sortir des sentiers battus et de constituer des armées plus variées que ce que l’on peut imaginer à priori. Elle ouvre des possibilités pour des armées plus typées.. Imaginons ce que donnera une armée espagnole de tercios, soutenus par des milices catalanes énervées…. Comme en 1637 en Roussillon ou lors de la guerre des « Seguadores » en 1644 ? Ce n’est finalement pas si différent des listes anglaises qui sont multiples alors qu’il ne s’agit au départ que de la même armée…

ps: Merci aux photographes de la convention dont j’ai emprunté les images, notamment Jeremy Fedusky.

Le combat de Fauch, une bataille des guerres de Rohan en Languedoc , septembre 1621

Le combat de Fauch, une bataille des guerres de Rohan en Languedoc , septembre 1621

« A FAUCH, A FAUCH ! »

Un épisode de la première guerre de Rohan,

le combat de Fauch, le 3 septembre 1621

Henri de Rohan

 

« De toutes les actions de la guerre, la plus glorieuse et la plus importante est de donner bataille, le gain ou la perte d’une ou deux bouleverse des Empires entiers. »[1]

Le contexte : le grand siège de Montauban :

Depuis Mai 1621, l’armée royale, commandée par le Connétable de Luynes, en présence du jeune Roi Louis XIII, assiège la place de sûreté de Montauban, défendue par les protestants français, fidèles à l’appel à la révolte lancé par l’Assemblée de la Rochelle, l’an dernier. Après avoir pris quelques places en Béarn, l’armée royale bute sur les solides fortifications et la détermination de sa garnison et de ses habitants. Commence alors une «On fait maintenant une  guerre plutôt de Renard que le lions »[2] où chaque camp essaie d’affaiblir l’autre sur les théatres périphériques. Une guerre de coups de mains et de combats plutôt que de grandes batailles.

Pour leur compliquer la tâche, l’âme de cette révolte, Henri de Rohan, gendre du fameux Duc de Béthune Sully, général des troupes protestantes en Bas-Languedoc a quitté la ville avant son encerclement pour organiser un « renfort » destiné à harceler les troupes assiégeantes et à couper leurs lignes de ravitaillement. Il s’établit à Castres après un périlleux voyage où il manque de peu, au passage du Tarn, vers L’Isle sur Tarn, d’être pris par les royaux aux ordres du baron d’Ambres, louis de Voisins, vétéran des guerres de religion[3]. De cette ville, par les vallées du Sidobre et Millau, il peut aller recruter de solides volontaires Cévenols prêts à défendre leur foi les armes à la main, ainsi que des mercenaires qu’il fait entretenir sur sa cassette et les fonds octroyés par l’Assemblée. Il peut aussi compter sur le soutien des villes protestantes du Tarn et du Quercy : Castres, Réalmont, Puylaurens, Lombers, Briatexte, Roquecourbe, Tonneins, Saint Antonin, Monestiés, Cordes, Nègrepelisse, Tanus, Millau parmi d’autres.  Les milices locales s’arment et sont prêtes à en découdre, tout comme la noblesse des environs qui lève à ses frais des volontaires. Castres forme un régiment de quatre compagnies que le duc entretiendra jusqu’en 1622, ce qui double ses forces. On répare ou on fond des canons pour les opérations de siège. Ce sont davantage des couleuvrines, plus mobiles que des « canons », pièces lourdes, qu’on préfère emprunter aux villes proches, comme on le fera à Réalmont.

Pour contrer cette menace sérieuse sur son flanc droit, et garantir les voies stratégiques de la vallée du Tarn et de la Garonne, vitales pour l’approvisionnement de l’armée royale, il dépêche le Duc d’Angoulême commandant de la cavalerie légère de France, la tête d’un fort contingent de cavalerie (1500 à 1200 cavaliers en 17 à 18 compagnies, selon Dom Vaysette ) , point fort des armées royales et de régiments royaux (au total 4000 hommes de pied , probablement les régiments de Cornusson , Montmorency, du Piémont (de passage en 1622), de Pibrac (1622), afin de consolider les défenses des villes de la vallée du Tarn (estimées à 1500 cavaliers (dont la compagnie de chevaux légers d’Ambres, celle du comte d’Aubijoux, de Grandval), 500 fantassins du régiment d’Albi commandés par Lescure, le régiment d’Aubijoux ( 4 cies Grauhlet) , celui D’Ambres dirigé par le sieur de Gachapel, 1er consul de Lavaur (10 cies Lavaur) : Albi, Rabastens, Gaillac et Lavaur et Saint Sulpice, menacées directement par le parti protestant . Il leur demande une levée exceptionnelle de troupes et de fonds. On renforce le régiment d’Albi et on fait lever par le marquis de Lescure un second régiment.

Le contrôle de la vallée est le meilleur moyen d’empêcher l’arrivée du renfort. On craint aussi qu’emportées par le mouvement général de la révolte, d’autres villes et seigneuries locales passent sous le contrôle de Rohan, ce qui décuplerait ses moyens militaires. Angoulême estime que Rohan ne peut secourir Montauban qu’en suivant trois voies possibles : Par le sud, en passant par Caraman, puis en descendant vers la vallée de la Garonne par le fertile et riche Lauragais, qui est le chemin le plus aisé, mais celui-où Rohan sera constamment menacé par des troupes venant de Toulouse, des villes catholiques, et les meilleurs régiments de cavalerie de l’armée royale. Par le sud de la vallée du Tarn, il devra, s’il veut faire passer bagages et artillerie, contester le passage du Tarn en s’emparant d’un gué ou d’un pont à Rabastens, Gaillac (le consul Séguy y dispose d’un détachement de 400 hommes, soit un régiment à 4 compagnies (ADT C877)) ou L’Isle sur Tarn, qu’Angoulême pourra facilement secourir. Par le nord de la vallée du Tarn, Cordes et Saint Antonin et à travers ses collines, chemin « inaccessible à la cavalerie », mais limitant la taille des contingents envoyés à des troupes d’infanterie équipées légèrement et sans aucune artillerie.

Rohan n’a donc pas le choix, il doit recruter des troupes et donc tenter de faire basculer la vallée du Tarn dans son camp protestant mais sans « gaspiller » ses maigres forces. Angoulême décide de faire de même afin d’obliger Rohan à disperser ses troupes en menaçant les places protestantes de Lombers et Réalmont en septembre. Mais en réalité, ces attaques sont feintes, Angoulême garde avec lui une « force de frappe » principalement composée de cavalerie, afin de surprendre les forces protestantes qui en ont peu.

C’est le récit qu’en fait le Mercure François de 1621 :

« Toutes ces raisons balancées le Duc d’Angoulême conclut que le Duc de Rohan feroit de deux choses l’une, assavoir, qu’il viendrait à Castre faire son gros, & avec des pieces attaquer quelques petits forts, tant pour donner réputation à ses armes, que pour raire vivre ses troupes du butin, seul moyen qu’il avait de les maintenir : ou que prenant la teste (le nord) du Tarn, il s’écouleroit vers Cordes et Monestiés, & delà audit S. Antonin. Sur cela ledit sieur Duc d’Angoulême résolut de passer la rivière, & venir se loger à la tête de trois petites villes qui tiennent pour les rebelles reformés (Lombers, Réalmont, Briatexte), et ce pour deux desseins : que s’avançant vers l’ennemi, il jugera mieux de ses desseins et, en cas qu’il voulust passer, son chemin estant plus long, les attaques que le duc d’Angoulême leur ferait le rendrait quasi-impossible. »

La confrontation de ces deux stratégies va aboutir, sur ce front, à l’épisode local, mais très violent et décisif du combat de Fauch, le 3 septembre 1621. Le lieutenant principal de Rohan, le marquis de Malauze, ainsi que d’autres chefs y sont battus et contraints à la reddition par les troupes d’Angoulême soutenues par celles de l’évêché d’Albi.  Fauch est un village entre Albi et Castres défendu par un « fort », c’est-à-dire une fortification bastionnée assez simple établie autour de son église sur une petite éminence. Les fermes en contrebas constituent des éléments de la fortification dont on peut encore voir certains vestiges sur place (meurtrières et trous ronds pour mousquet en angle des certaines maisons proches de l’église. Le Mercure de France la qualifie de « bicoque », mais les vestiges actuels montrent que ses murs n’étaient pas faits de levées de terre, comme l’immense majorité des fortifications rurales de la région[4] et constituaient un bastion refuge pour les paysans des environs, héritage des guerres de religion « garantie » contre les coups de main. Déjà, du 12 au 31 mars 1616, lors de la première prise d’armes de Rohan, des combats avaient eu lieu à Fauch entre le vicomte de Castelpers, Panat et le Baron louis de Lescure, qui avait « délivré » Fauch de sa garnison protestante placée là par le Vicomte depuis le 12. Le capitaine Arnaud du Portal des milices de Dénat y avait été tué (ADT4 EDT GG69 Gras).

Les deux forces en présence :

«Que si la guerre se faisoit en un pays serré, ou de montagnes, ou de forests, ou de marez, ou de hayes et fossez,  & qui aye force places fortifiées ; pour ce que la guerre se reduit plustôt en sièges, qu’en batailles et combats de campagne, alors il faut fortifier son infanterie. & ces deux corps sont si nécessaires l’un à l’autre qu’une armée ne peut s’estimer bonne ny subsister s’ils ne sont également et bien entretenus …. (Je ferai mon armée) En un pays serré d’uns sixième part de cavalerie sur cinq d’infanterie , comme sur vingt mille homme de pied quatre mille chevaux »[5]

Rohan charge le marquis de Malauze, son lieutenant, de former « son gros » et à partir de Réalmont, protéger et soulager Lombers. Il établit son camp à Réalmont, vers laquelle affluent les renforts locaux de Saint Rome et Sénégas. Les milices et la noblesse veulent en découdre et « régler l’affaire » rapidement. En effet, contrairement aux rares régiments soldés, ces troupes, quoique motivées et exercées, doivent laisser leurs activités pour combattre. Or à cette saison, nous sommes en période de pleine activité agricole. Cet aspect sera déterminant dans les choix de Malauze. Il est rejoint par Boyer, venu de Castres avec son régiment de 1000 hommes, soit dix compagnies. Il dispose déjà du régiment de Mazaribal (5 compagnies), de celui de Saint Amans (500h soit 5 autres compagnies), la Nougarède et des cornettes de cavalerie volontaire. En effet, chaque noble commande généralement une cornette de 50 maîtres plus ou moins cuirassés, auxquels s’ajoutent des mousquetaires à cheval , des carabins ou des volontaires , légèrement armés.

Le Mercure dresse « l’estat des troupes du marquis de Malauze qu’il surestime probablement afin d’accentuer la défaite des Protestants :

« Le Duc de Rohan pour contenir ce peuple, lequel d’ordinaire ne voit les choses que par les yeux de la passion, d’envoyer deux de ses meilleurs régiments (cévenols) qu’il eut, à savoir des Sieurs de Boyer et de Mazaribal composés de quinze enseignes complètes (soit des régiments avec des compagnies à effectif complet), pour se joindre à la cavallerie du Marquis de Malose & de S. Rome, -de plus de quatre cents chevaux. & aux Régiments du Baron de Sainct Amans, La Nougarède, Baron de Sénégas, et plusieurs autres volontaires, le tout faisant trois mille hommes de pied, & quatre cent cinquante chevaux. »

Rohan précise que ces troupes étaient de 3000, mais une autre source, proche de Rohan indique un contingent de 2500 hommes, correspondant un peu plus à la réalité. Selon l’ordonnance de la Rochelle de 1621, l’art 19 fixe la taille des compagnies d’infanterie à 100h et des cornettes à 50. En théorie les régiments étaient de 500 hommes en cinq compagnies, mais la moyenne réelle se situant autour de 80 , la plupart étaient autour de 400h. On retrouve ces chiffres dans les effectifs énoncés par les sources, ce qui fournit un indice sur le degré d’organisation des troupes protestantes « réglées » sur un pied de guerre quasi-permanent depuis au moins 1615 :

L’armée protestante

Henri de Bourbon Malauze,

Pour l’infanterie :

-Régiment de Boyer 1000h, 10 compagnies en deux bataillons, On connaît les noms des capitaines des 5 compagnies survivantes d’un de ces bataillons , qui participe au « secours de Montauban » : Le Monnac, La chassagne, Villares, Croze et la Sagesse

-Régiment de Mazaribal , issu du Régiment de Malause, (milices de Réalmont ?) 500 à 1000h mais il est probable que Malause laissa au moins un bataillon à Réalmont,.

-Régiments de Saint Amans (milices) 500h et du Baron de Sénégas et la Nougarède (milices) un total de 10 compagnies, en deux bataillons de 400 à 600h enrégimentés ensemble, donc moins exercés que ceux de Réalmont et de Boyer.

Ce qui fait un total de 5 bataillons d’infanterie que nous retrouverons dans le déploiement décrit par Le Mercure

Pour la cavalerie :

La Compagnie de Saint Rome : 50 maîtres (chevaux légers) avec probablement 10 carabins ou arquebusiers à cheval comme il était d’usage

La Compagnie de Malause :  Une compagnie de 80 maîtres, peut-être une de gendarmes, probablement des chevaux légers organisée en deux escadrons de 40h (donc environ 10 à 20 carabins en support)

La Compagnie de Sénégas : 50 Chevaux Légers volontaires

La Compagnie de La Nougarède : 50 chevaux volontaires ou mousquetaires à cheval

La Compagnie de Saint Amans : 50 chevaux volontaires ou mousquetaires à cheval

Enfin, l’orgueil de l’armée : le « canon », c’est-à-dire une pièce d’artillerie lourde car capable d’ébranler les murailles du Fort.

L’armée royale

Pour Angoulême, nous avons des données plus précises, appuyées par les documents d’archives locales (ADT) : Ayant laissé Lombers, il rassemble les 1200-1500 hommes de sa cavalerie à « la Mire », l’actuelle Lamillarié : « et commande à quatre compagnies levées par l’évêque d’Albi se trouver au même lieu ». Il prend ensuite la route vers Fauch en passant par Denat, où il récupère des hommes, puisque certains seront tués au combat selon l’acte de sépulture du 3 et 4 septembre 1621 et inhumés à l’Eglise Notre Dame. En 1625, le consul de Dénat escortera 500 gastadours avec une compagnie de 150 soldats. On peut donc estimer qu’il a probablement été fourni autant à Angoulême.

Le réseau routier actuel nous donne une idée de son itinéraire, mais il ne faut pas oublier qu’il dispose d’une force presque entièrement formée de cavalerie, donc très mobile et que de nombreux chemins, notamment ceux « de crête » ont de nos jours disparu, victimes des remembrements de notre agriculture moderne. De ce fait, on verra qu’il ne semble pas arriver devant Fauch par le nord, mais l’est, probablement par le chemin dit « Pintre » et non par la D13 actuelle, c’est-à-dire la « route d’Albi ». Par contre les renforts d’Albi qui lui parviendront utilisent cet itinéraire.

Sur le papier, la « cavalerie légère de France » est constituée des compagnies suivantes :

« La cavalerie,détachée sous M. le duc d’Angoulême pour empêcher le secours de la place, comprenait:

La petite compagnie du Roi, avec M. de Coutenant fils. (50h) ou la compagnie du Roi, celle des chevaux légers de la Garde (200h ?)

La Compagnie de Monsieur, avec M. d’Elbène. (100 à 200h) soit trois escadrons dont un de gendarmes et deux de chevaux légers

La Compagnie de Vendôme1, avec M. d’Heurre. (1cie de gendarmes et sa compagnie de carabins)

La Compagnie Mestre de Camp ? avec la Curée (60h chevaux légers) 1 compagnie

La Compagnie du duc d’Angoulême. (1 compagnie)

La Compagnie La Colonelle. 50 h (chevaux légers)

La Compagnie de Loppez. (carabins, chevaux légers ?)

La Compagnie du prince de Joinville (charles 1er de guise). 1 compagnie

La Compagnie de Faudoas(Faudoy) 100 chevaux légers

Mais d’autres troupes sont aussi notées par les sources :

Mr de Vendôme : « Le duc de Vendôme était arrivé à l’armée avec beaucoup de noblesse, sa compagnie de gendarmes, une de chevau-légers et une de carabins. » (Thrésor de l’histoiregénérale.)

Les chevaux légers de la Curée

Il dispose, si l’on suit l’ordre de marche depuis donné par le Mercure :

  • De deux compagnies de Carabins commandés par Arnaud et Des Plans qu’il divise en « trois troupes » (une sur chaque flanc et un écran de douze carabins en avant, tous étant escortés par un guide)
  • De plusieurs compagnies de cavalerie royale :
  • La compagnie des chevaux légers de la garde par Mr de la Curée[6] (100h)
  • la compagnie de Monsieur le Grand Prieur (Cornusson ?) (100h)
  • La compagnie de Monsieur ( D’Elbène) (200h ?)
  • La compagnie du Prince de joinville (50 ?)
  • La compagnie de Faudoy  ou Faudoa (50 ?)

Elles forment l’avant-garde. Elles sont soutenues par :

  • la « compagnie colonelle (cornette blanche) commandée par le comte d’Alais (son fils secondé par un vieux capitaine l’Estelle) Colonel et capitaine de la cavalerie légère de France (donc des chevaux légers) 100h
  • La compagnie du Duc d’Angoulême (« mestre de Camp ?) commandée par lui-même au lieu de d’Heurre (chevaux légers ?) placées en support de Faudoy et du Prieur 100h
  • La compagnie du Roy commandée par Contenant (compagnie de chevaux légers du Dauphin, devenue celle du Roy) composée  surtout de gendarmes[7]
  • La compagnie de cavalerie légère de Loppez (arquebusiers ou chevaux légers)
  • Les mousquetaires à cheval des compagnies sous les ordres d’Heurre sont placées en queue, (d’ Heurre[8] et Loppez[9] « un des plus braves et vieux capitaines ») en un seul escadron « de réserve »

D’un seul régiment d’infanterie avec quelques volontaires :

  • Les quatre compagnies (Bouzac ou Bozat selon les ADT), Lavisanderie, La Crozette, cf. ADT C874,) du régiment d’Albi (350h) commandé par Cornusson, sont formée en deux troupes dont un d’enfants perdus, soit deux petits « bataillons » (que le Mercure qualifie plutôt de « troupe ». En effet, le régiment est surtout une unité administrative, à l’échelle tactique, le bataillon est l’unité de base. Ici il est de 150 hommes, soit environ 60 mousquetaires, et 80 piquiers si l’ont tenu compte des effectifs décrits par le Rolle de la Monstre de la compagnie de Bozat du régiment d’Alby dressée en 1621 « pour le siège de Montauban » et (ADT) qui compte 7 officiers et enseignes, 30 mousquetaires, 30 piquiers et 33 arquebusiers. Ce qui ferait pour le régiment : 90 mousquetaires, 90 piquiers et 100 arquebusiers, chiffre qui correspond et aux deux « troupes de 150 » mais qui semble supposer que les 5O enfants perdus soient des volontaires ou de surnuméraires.

A ces troupes vient s’ajouter un renfort venu de Grauhlet, de deux unités de cavalerie et d’un régiment d’infanterie qui arriveront :

« Au même temps il luy advint deux troupes de cavalerie. L’unc du Comte d’Aubigeoux qui estoit composée de cinquante maistres, &de soixante-dix carabins : & celle de Grandval, de quelque quarante chevaux : & de ceux d’infanterie l’une

De deux cents cinquante hommes, & l’autre de cent ».

Le comte d’Aubijoux étant seigneur de Graulhet et colonel des légionnaires du Languedoc, on peut supposer que cette troupe vient donc de cette ville, ayant répondu à l’appel du Duc d’Angoulême.

De même on doit aussi prendre en compte les « volontaires », dont le nombre est presque toujours inconnu, puisqu’ils surgissent à l’occasion. Ce sont souvent des nobles désargentés, mais réticents à toute discipline, assez mal armés, sinon de leurs épées et donc difficilement incorporables dans les bataillons, comme le dit Rohan : « et seroit la vraye place des volontaires et de force brave noblesse, de laquelle souvent on est bien empesché » c’est-à-dire encombré. Rohan préconise de s’en servir comme épéistes pour attaquer le flanc des formations de piquiers. Il souhaiterait les armer de targe comme les rodelleros espagnols mais cela ne fut pas réalisé, d’autres récits les montrent équipés d’hallebarde et formant une petite unité supportant les piquiers en attaque.

L’état de l’armement de ces troupes n’est pas donné en détail, mais d’autres récits du Mercure et les pièces des Archives du Tarn relatives aux régiments locaux permettent d’estimer, tout comme le « parfaict capitaine » d’Henri de Rohan qui précise : « Les armes les plus ordinaires de l’infanterie du temps présent sont pour sa défense, le pot , la cuirasse et les tassettes, et pour armes offensives , l’espée, la picque et le mousquet ». Mais ceci reste de la théorie, car à cette époque déjà , les soldats prennent l’habitude de délaisser les armes défensives, pendant la marche, et pire encore, lors des combats :

« Mais ce n’est pas, tout d’avoir bien armé vos soldats, si vous ne les obligez à porter leurs armes, étant une chose aujourd’huy insupportable de voir leur délicatesse et le mépris qu’il en font. Et pour couvrir celle faute ils disent que c’est manque de courage d’aller armer et ils iront en pourpoint aux lieux les plus périlleux , aussi bien que les arméz. Il ne suffit pas d’aller en un lieu pour se faire assommer, il faut y aller pour vaincre , et non pour estre battu »[10]

L’infanterie en Languedoc vers 1620:

Dans l’infanterie, les régiments de pied ont des compagnies dont les effectifs varient entre 50 à 200 hommes, 100 étant une moyenne courante. Les régiments levés dans l’albigeois (De Lescure dit de l’Albigeois, et de Mr D’Elbène dit de l’évêché) sont de 500 hommes en théorie, divisés en quatre compagnies. Ce sont, par rapport aux régiments royaux (1000à ou Suisses (1500-2000) de petits régiments que l’on forme souvent en un seul bataillon. Le chiffre de 500 étant celui préconisé à l’époque, selon le système hollandais, pour former un bataillon selon l’ouvrage de Jérémie de Billon, écrit en 1610, « principes de l’art militaire » : « Les 500 hommes du bataillon étant par files de dix hommes, il y aura cinquante hommes de front, et dix de file. Chaque homme tenant deux pieds en travers ou face, fera 100 pieds en tout, puis un pied et demi entre chacun feront 75 pieds, et ainsi pour toute la face, 175 pieds. (…)            Milices de Revel (fig seb Coels)

Il y a 200 mousquetaires en 20 files, 10 files à chaque flanc. Il y a 300 piques pour un corps, car je voudrais toujours s’il se pouvait que de cinq parties, les trois fussent piquiers, et les deux mousquetaires, et faut quatre ou cinq pas d’espace entre les piques et les mousquetaires. (…) »

La proportion piquiers/tireurs préconisée ici 3/5 ne correspond pas à la réalité, car on a de grandes difficultés à trouver des piquiers exercés. Seuls les régiments de Suisses, experts en cette arme, doivent avoir encore une telle proportion. La réalité est en Albigeois d’un pour deux, et dans le camp protestant cette proportion en faveur des mousquets peut avoir été encore plus forte. Les protestants semblent avoir aligné aussi, comme au temps des guerres de religion, des compagnies composées uniquement de mousquetaires.  L’ensemble est formé en un « bataillon » de 200 à 1000 hommes, la moyenne étant à cinq cent, les régiments « complets » comme celui de Boyer montant à 1000 (quinze enseignes), mais il sera organisé en deux, voire trois bataillons comme on le préconise alors : « Deux ou trois bataillons séparés en incommodent fort un gros, et puis l’on en peut joindre deux ensembles quand on voudra. Et dirais que pour plus de facilité il ne faut que deux sortes de bataillons, l’un de 500 hommes, à savoir 300 piquiers et 200 mousquetaires disposés 10 de file, 50 de front ; et l’autre forme serait de 1000 hommes, joignant deux bataillons de 500 »

On voit ici que les tireurs étant normalement divisés en deux manches, selon le système préconisé par Maurice de Nassau, l’une « d’arquebusiers » souvent détachée pour opérer en enfants perdus, par groupe de cinquante. C’est cette disposition est d’ailleurs adoptée dans la Monstre et revueue de la compagnie de Bouzac qui est rédigée en trois colonnes, celle de gauche pour les mousquetaires, au centre les piquiers et à droite les arquebusiers (les plus pauvres, donc les derniers). Les Mousquetaires portent une arme de fort calibre, lente à recharger et lourde puisqu’on doit l’appuyer sur une fourquine pour tirer. Ils restent sous la protection et soutiennent les piquiers. Les arquebusiers, plus légers sont souvent envoyés en avant, « détachés, qui tirent en flanc, et aillent aux mains par les flancs de l’ennemi » selon Billon. Mais les récits ne font souvent pas de distinction entre arquebusiers et mousquetaires.  C’est logique à cette époque puisque les « arquebuses » sont en fait des mousquets allégés, de petit calibre. Le règlement de Montmorency de 1628 pour l’albigeois nous précise que l’équipement de ces fantassins doit être : « d’un mousquet fourcherie et bandolière, ou d’une pique, bourguignotte et corselet selon qu’ils seront jugés plus propre à l’un ou à l’autre armement(..) et ceux qui seront armés des mousquets et dites armes blanches seront pourvus en tout temps de deux ou trois livres de poudre et autant de mèche » (ADT C207 p 4,5). La dernière remarque est intéressante, puisqu’elle indique que même les piquiers portent les munitions.

*La cavalerie languedocienne: chevaux légers, carabins et mousquetaires à cheval 

Les cavaliers de ligne ou « chevaux-légers » sont normalement tous « armés » c’est-à-dire avec une cuirasse ou plastron en métal et un casque, voire une demi-armure ou de trois quarts pour les « gendarmes ». « Le nom de Chevau-Léger, vient de ce que les Chevaux-Légers étoient armés plus légèrement que les Gendarmes. » précise du dictionnaire militaire de 1751, « mais leur service estoit le même ».

En effet, les lettres des médecins et bourgeois d’Albi, nous indiquent qu’il nomment « gendarmes » des maîtres issus des cornettes de chevaux -légers qui sont avec  Angoulême

En effet , les mémoires du Maréchal de Tavannes nous rappellent qu’en 1624 : « C’est pourquoy, maintenant, l’on entretient les chevau-légers et les paye-t-on en gendarmes, estant une erreur de les qualifier de chevau-légers, puisqu’ils tiennent la place de gendarmes. Mais aussy la gendarmerie n’estant payée et ne se fiant plus d’estre entretenue en temps de paix, s’en iront de l’armée comme les chevau-légers,i.P.349. quy n’estoient entretenus, faisoient. Mais ils sont entretenus en si petit nombre qu’ils n’empeschent pas dix fois une plus grande partie d’eux de prendre party dans les guerres civiles mesme contre Leurs Majestés. »

La Compagnie des gardes de la Curée, élite de la cavalerie royale (fig seb coels)

Le Mercure nous le confirme puisqu’il rapporte qu’au début de la bataille, les cavaliers royaux « mettent tous la cuirasse et changent de chevaux ». Les Protestants accusent un déficit en matière de protection, seulement la moitié des « mestres » sont « armés », mais ils disposent de « cottes » ou « pourpoints » en cuir (cuirasses de buffle), tous les « gendarmes » le sont, mais ils sont peu nombreux comme la « compagnie de gendarmes de Mr le Duc ». Leurs armes sont l’épée et le(s) pistolet(s) dont ils se servent lors des charges (contre la cavalerie ou une infanterie en désordre) ou des caracoles (feu continu des cavaliers rangs par rangs sur une troupe d’infanterie ou de cavalerie formée).

Les carabins et mousquetaires à cheval forment la cavalerie légère. Rohan , quant à lui précise                                                                      « ceux qui portent les carabines ont le pot et le cuirasse mais ceux qui ont les arquebuses à mèche n’ont nulle armes defensives ». Les mousquetaires n’ont donc pas de protections, car se sont d’abord des fantassins montés. Ils sont tous équipés de mousquetons dénommés « arquebuses » ou « mousquets ». Les carabins sont, mieux protégés : « Leurs armes défensives étoient une cuirasse échancrée à l’épaule droite, afin de mieux coucher en joue ; un gantelet à coude p

Les-gardes-de-Rohan-sont-des-mousquetaires-a-cheval-qui-supportentles gendarmes par lef eu

our la main de la bride, & un cabasset en tête ; & pour armes offensives, une longue escopette de trois pieds & demi pour le moins, & un pistolet ». En effet les mousquetaires à cheval interviennent à pied et se déplacent à cheval car ils sont les ancêtres des dragons du siècle suivant, leur rôle principal est d’éclairer la marche de l’armée, de « prendre langue » (capturer des prisonniers et trouver des « guides ») ou d’aller « à la picorée », c’est-à-dire fourrager et piller. C’est d’ailleurs ce que déplore Rohan, se souvenant de leur rôle dans ces années : « et pour l’arquebuse à mesche , on l’a aussi comme délaissée pour ce que dans les guerres civiles elle ruynoit l’infanterie , chacun voulant avoir un bidet pour mieux voler. Néant-moins quelques troupes bien rè

glées de cette espèce dans une armée font de très grand services ; ou à faire des exécutions, où à gagner de mauvais passaiges ; où à garder le logement de la cavalerie ou mesme un jour de combat à mestre pied à terre       Carabins de Rohan

comme enfans perdus devan sles escadrons de la cavalerie[11] ».

On remarquera que le terme bidet nous précise que les mousquetaires à cheval sont mal montés. Les carabins ont un rôle plus spécifique de soutien-feu des chevaux légers comme nous l’indique le dictionnaire pratique militaire portatif de 1751, T2 : Leur manière de combattre étoit de former un petit escadron plus profond que large , à la gauche de l’escadron de la compagnie des Chevaux-Légers ; d’avancer au signal du Capitaine , jusqu’à deux cens pas d’un escadron de lances ,& à cent , si c’étoit un escadron de Cuirassiers ; de faire leur décharge rang à rang l’un après l’autre , & puis de se retirer à la queue d’un escadron. Si les ennemis avoient de leur côté des Carabins, ils dévoient les attaquer, non pas en gros, mais en escarmouchant, pour les empêcher de faire feu sur les Chevaux-Légers. »  C’est exactement ce rôle de soutien qu’ils vont jouer activement dans le combat et le poste qu’ils occupent dans l’ordre de marche d’Angoulême.

Chez les arquebusiers et les mousquetaires à cheval, qui sont plutôt de l’infanterie montée, ceux-ci démontent pour tirer « en salve » selon Bouffard Madiane. Un autre texte, plus ancien, d’Agrippa D’aubigné sur la bataille de Coutras, nous décrit d’ailleurs leur formation :

« D’ailleurs, on tira 15o harquebusiers choisis pour garnir les estriers des escadrons (cad se porter sur les flancs); en chaque lieu, cinq de front et autant de file. Les premiers, le ventre à terre, les seconds le genou, les tiers penchez de ceinture et les derniers seuls debout. Cela résolut de ne tirer que de vingt pas et n’avoir espérance de leur vie qu’en la victoire, ce qui ne fut pas de petit effet. »

Dans la cavalerie, les enseignes (cornettes, guidons) sont d’au moins 40 hommes, la norme étant 50, mais peuvent monter jusqu’à 100 avec les volontaires. Elles évoluent alors par « escadrons » d’environ     50. Pour les carabins et mousquetaires à cheval , les compagnies sont de cinquante. Ces escadrons sont        Mousquetaires à cheval de Malauze

formés en trois à cinq rangs maximum, la préférence à cette époque étant à la profondeur qui favorise la caracole.

Le déploiement des troupes : Battleground Fauch !

Angoulême, venant de Lamillarié et Labastide Denat, par un « chemin de crête » comme on les préférait dans cette région de vallons et ruisseaux, déploie ses troupes depuis une « montagne à six cent pas de Fauch », à l’aube. Les royaux, ne disposent, pour l’instant ni d’infanterie (sinon des dragons), ni d’artillerie pour affronter des fantassins qui vont se retrancher et sont supportés par « Le » canon de Réalmont. Le Duc va donc attendre l’infanterie qu’il a

La cavalerie D’Angoulème se déploie

appelé « en diligence » alors que les protestants sortent de Fauch et se déploient dans les fossés, les haies et les vignes qui le bordent.

Cent cinquante arquebusiers en enfants perdus se déploient dans une « vigne close d’un fossé », cinquante mousquetaires s’alignent le long d’une haie bordée d’un fossé, en arrière et en soutien, un bataillon de piquiers « un peu estendu » (donc soutenu par deux manches de mousquetaires restants) de 400 hommes. Leur gauche est appuyée par « deux fortes maisons » de pierre dans lesquelles ils placent 100 mousquetaires, les 300 hommes restant du bataillon occupant l’espace entre les deux « piques et mousquets mêlées » soit au moins 100 mousquetaires dans la seconde ferme et probablement un rideau de mousquets, supportés par les piquiers au centre.

Le régiment Cévenol de Boyer couvre les « enfants perdus »

Derrière un bois de futaie et un marécage, bordé de fossés « difficile à la cavalerie » se loge un autre bataillon de six cents hommes sur un champ de 600 pas. Ce bataillon est flanqué de deux escadrons de cavalerie de 60 maîtres, soit 120 hommes en tout. En arrière, gardant le chemin qui monte au village, un autre bataillon se tient, ayant déployé ses mousquetaires dans les maisons et derrière une barricade. Au sommet du village, derrière les murailles du fort, un dernier bataillon avec piques et mousquets mêlés et sur le replat à droite, le long d’un chemin deux troupes de mousquetaires à cheval de 40 (1 escadron) et 100 (deux escadrons).

On ne sait pas où se trouve le canon, mais probablement sur une éminence du fort, probablement à proximité de l’église. Un renfort de cavalerie dirigé par Saint Rome, avec un escadron de 40 chevaux légers et 120 mousquetaires à cheval survient inopinément sur les arrières de royaux, pensant que Fauch n’était pas encore prise.  Les deux partis croient d’abord qu’il s’agit de soldats de leurs camps, les mousquetaires d’Heure et Loppe les laissent approcher, pensant qu’ils sont du régiment de Cornusson, en chemin. Heurre et Loppe s’avancent vers Saint Rome mais sur une remarque de Saint Rome « et notre canon, que faict-il ? », tous comprennent leur erreur. D’Heurre et Loppe, rejoignent leur troupe et s’écrient « à la charge ce sont les ennemis ! ». La furieuse mêlée qui s’en suit alerte Angoulême qui stoppe son avancée et se retourne vers cet ennemi imprévu. Loppe est tué, mais Saint Rome y perd 50 hommes (selon Rohan) pour se faire jour vers l’église contrairement à ce qu’affirme le Mercure « et tous ses gens tuez ».

Le « Canon  » de Réalmont

Angoulême est en train remettre ses gens en ordre lorsqu’il aperçoit enfin ses renforts d’infanterie d’Albi (4 compagnies pour 350 hommes) et Cornusson, « au lointain » qu’il fait ranger « hors la vue des ennemis » derrière l’éminence  en deux bataillons de 150 hommes, en gardant 50 en enfants perdus pour commencer l’escarmouche contre ceux embusqués dans les haies et la vigne qu’il fait soutenir par ses carabins  qui chargent en soutien(la cornette de la compagnie de Des Plans, Charles des Armands, sera tuée mortellement « a la charge que feu faicte par Mr le duc

Dugoulesme » et inhumée le 4 septembre « au cur » de l’église de Dénat). Les enfants perdus protestants, après une décharge esquivent vers leur bataillon supporté par les fermes. Angoulême fait alors charger les trois compagnies de chevaux légers de l’avant-garde (Curée, Monsieur, Faudoy) qui réussissent à chasser les mousquetaires d’une ferme et à faire replier le bataillon « en bataille et sans désordre » vers celui qui était dans le champ bordée d’une haie et d’un marécage. Les trois bataillons, visiblement du même régiment (probablement celui du Cévenol Boyer à 15 enseignes) se forment en hérisson et repoussent la cavalerie « là se fit un grand et furieux combat, capable d’arrester les troupes royales ». Cependant il semble que ces bataillons furent soit défaits, soit réduits à se replier sur le village avec de lourdes pertes.

Angoulême fait contourner cette zone par ses deux petits bataillons, sa compagnie de gendarmes, celle d’Alais, d’Elbène et de Cornusson pour attaquer la route et les barricades. Emportée par son élan où n’ayant pas vu la barricade, les cavaliers sont stoppés par l’obstacle et les piques. D’Elbène et La Curée y reçoivent « cinq coups de piques dans ses chausses » pour l’un « deux cous de piques et cinq de mousquets et deux chevaux tués sous lui » pour l’autre et nous dit le Mercure, pour louer leur courage plus que leur témérité « mettant tous les ennemis en admiration et estonnement de le voir vouloir forcer avec la cavallerie l’infanterie logée avec tel advantage ». Les fantassins, plus heureux s’emparent d’une maison et d’un drapeau. Néanmoins les pertes ont été lourdes comme l’attestent les documents des médecins et apothicaires d’Albi qui vont se charger du soin de pas moins de 15 gendarmes sur les 66 blessés dont ils ont la charge (ADT 874).

Depuis le village, le dernier bataillon protestant, épaulé par ses ailes de cavalerie contre-attaque et reprend la maison, malgré l’intervention des cavaliers du comte d’Alès. La mêlée est dès lors générale et indécise, le feu du « canon », à courte portée et donc à mitraille, amène Angoulème à replier ses troupes derrière le bois : « il retira ses troupes en la première position qu’il avoit gaignée fur les ennemis, remet ses gens en bon o

rdre, & se logea en lieu où leur canon ne luy pouvoit faire mal. » Les deux camps comptent leurs morts et blessés : 400 tués dont Boyer, 100 prisonniers et 240 blessés dont Sénégas, Saint Amans et la Nougarède et 40 « personnes de qualité » pour les protestants selon le Mercure, à peine 60 chez les royaux dont 40 fantassins « tuez ou blessez » et 20 chevaux légers « tuez » et « quinze ou seize blessés ». Ces pertes semblent correspondre à notre liste des blessés ; mais les chiffres des tués ont probablement été exagérés pour les uns (Boyer fut tué à l’assaut de Fauch et non dans le combat) et (où ?) fortement réduits pour les autres …

Angoulême, ne pouvant prendre un village fortifié avec une troupe de cavalerie, fait envoyer des messagers pour qu’Albi lui dépêche des pièces de canon et un régiment supplémentaire (celui de Lescure probablement), avec des vivres et des munitions. Il reçoit le renfort des troupes d’Aubijoux venues de Graulhet (250 fantassins soit deux à trois compagnies, 50 chevaux légers, 70 carabins et 40 cavaliers volontaires, soit 4 escadrons). Ce renfort démoralise Malause qui, plutôt que de tenter un repli difficile, mais faisable par un vallon, harcelé en arrière-garde par la cavalerie royale et une infanterie fraîche, préfère négocier sa reddition. Une retraite supposait l’abandon de son canon et surtout des nombreux blessés et prisonniers (voués à être achevés par les paysans selon les usages du temps). D’autre part Angoulême a subi des pertes et ne dispose probablement que de la cavalerie d’Aubijoux comme force mobile. Les protestants détiennent des prisonniers qu’ils pourraient eux-aussi exécuter. La défense acharnée des fantassins protestants pourrait lui faire payer un prix exorbitant. Or, en bon capitaine de son temps, il doit ménager son outil de travail. De plus, nous ne sommes plus au temps des guerres de religion, le fanatisme s’est largement émoussé. Entre gentilshommes de qualité, on trouve donc un accord acceptable pour l’honneur de tous.

Une convention est signée est « en deux heures » par l’intermédiaire de prisonniers des deux camps et de parlementaires (le Sieur de Pujol et celui de Mazaribal). Le Mercure nous en laissé la copie. Les protestants pourront partir avec armes et bagages, y compris leurs blessés et prisonniers, sous escorte royale, mais en contrepartie, ils abandonnent le canon et jurent de ne plus se battre pour 6 mois. De ce fait, près de la moitié des troupes protestantes de la région se trouvaient neutralisées, à moindre coût pour Angoulème. S’il n’est pas certain que les simples soldats et mercenaires aient respecté cette capitulation, les nobles, eux y étaient tenus sur leur honneur. Or cela suffisait puisqu’ils étaient les cadres de ces contingents.

Un impact retentissant en Albigeois :

La nouvelle du combat Fauch est aussitôt perçue comme une catastrophe pour Rohan alors que celui-ci recrute des troupes en Cévennes. Le 4, la nouvelle parvient à Castres. Rohan revenu en toute vitesse dès le 6 septembre, prend des mesures énergiques contre les « escambarlats », c’est-à-dire les partisans de la modération. Malauze est accusé de trahison et va devoir s’expliquer devant le colloque, mais il est protégé par Rohan. Il le conserve dans son commandement de « lieutenant de l’Albigeois », mais celui-ci, humilié, il ne participera pas à la seconde guerre où il ralliera le camp royal. Réalmont, quant à elle, ouvrira ses portes à Angoulême. Si Rohan peut néanmoins envoyer en décembre un « renfort » vers Montauban, commandé par Beaufort, celui-ci sera nettement plus réduit que prévu (1500 hommes) car il doit conserver les 1500 qu’il lui reste pour « tenir » la région. Par chance, l’échec de Montauban provoque le repli des royaux. Rentré à Toulouse, le jeune roi prépare sa revanche après l’échec de Montauban.

Dans le camp catholique, c’est au contraire l’euphorie, une sorte de « jugement de dieu » favorable. Une chanson sera très vite constituée pour célébrer l’évènement :

Petit couplet local :

« Perque may que de coustumo

Soun pallès les higounauts ?

Acos la malo fourtuno

Que les rend atals quinauts ;

Le botin moussu d’Angoulemo

Ben de lous balliar un toeh

En creban lonr apoustemo

A Fane\ Fauch ! »

Pourquoi plus que d’habitude

Sont pâles les huguenots ?

Du sort c’est la vicissitude

Qui les rend ainsi quinauds ;

Le bon monsieur d’Angoulême

Vient de leur donner un toc

En crevant leur aposthème

A Fauch à Fauch !

A Labastide Denat, on enterre respectueusement les hommes tués à Fauch, notamment Charles des Armands, Georges Cassan qui rejoignent ceux tués lors des guerres précédentes. On en profite même pour graver un épigraphe sur la muraille« ECCE CRUCEM DOMINI  FUGITE PARTES ADVERSE SIT NOMEM DOMINI BENENDICTUM » ( voici la croix du seigneur, fuyez vous qui êtes ses ennemis) sous l’abréviation IHS et la croix, avec la date du 3 septembre[12] afin de commémorer à la fois cette victoire et l’échec des huguenots devant Dénat le 18 avril 1586 cette phrase est extraite de l’office des vêpres et l’exaltation de la Sainte Croix, symbole antiprotestant par excellence dans la région. « Ainsi la pierre gravée fait barrage à l’hérésie »[13]

Pour autant, la zone ne sera pas apaisée, puisque le Curé de Dénat enregistre les « assassinats » de catholiques par les « parpaliols » en 1622 (24 avril, 17 juillet, 28 septembre la « planqua de massagro » où sept habitants de Dénat, dont le frère du Curé seront tués.

La fin de la guerre :

L’offensive royale de 1622, commandée par Vendôme, demi-frère du Roi, et Thémines est massive (8000 h, 600 chevaux), elle fait tomber Nègrepelisse, en présence du roi, dont les 689 habitants sont tous massacrés sur son ordre en punition du massacre des 400 blessés royaux abandonnés après le siège de 1621), Saint Antonin (13-06-26-06) et Lombers (24-07-30-07), puis Teilhet en juin et juillet 1622, mais Castres, quoique menacée, tiendra bon. Malgré les faiblesses de ses effectifs (3000 hommes) et des escarmouches malheureuses (22 janvier 1622 300 hommes sont tués entre Lavaur et Castres par le Sieur de Gachefel, premier consul de Lavaur, vers Villeneuve, au lieudit Daurin).

En effet, en août, le siège désastreux de Briatexte (18 août-18 septembre, 1500 tués chez les royaux) permet à Malause de se racheter et de stopper les royaux. Finalement, pour Rohan, les combats en Bas Languedoc s’achèvent par un match nul. La densité du système défensif de la région permet d’absorber les conséquences d’une victoire ou d’une défaite sur le champ. On préfère d’ailleurs les éviter. D’ailleurs, dans la région, le secours de Beaufort vers Montauban sera le seul autre exemple d’un « combat » en cette année 1621.

[1]Henri de Rohan, Le parfaict capitaine chVII p257, imprimé le 4 sep 1636.

[2] id

[3] Mémoires d’Henri de Rohan, de Bouffard Madiane et documents des archives municipales de la ville de L’Isle sur Tarn sur le butin pris à Rohan et les prisonniers royaux mis à rançon.

[4] Qui, pour cette raison, n’ont pas laissé beaucoup de traces visibles, si ce n’est dans les récits et quelques dessins d’archives. Rapidement construites, elles étaient tout aussi rapidement déblayées en temps de paix.

[5] Le parfaict capitaine p232

[6] Gilbert Filhet, seigneur de La Curée de La Roche-Turpin, conseiller d’État, capitaine-lieutenant des chevau-légers de la garde (1593), mestre de camp général (1620). Mort en 1633, âgé de 78 ans (cf Choppin)

[7] ADT C876 « Folio 17, soins aux blessés de Lombers et de Fauch

Pour Monsieur Abelle, gendarme de la compagnie du Roy blessé d’ung coup d’espée au cousté gauche et autre coup au bras gauche logé chez Madame de Peyrilles […]

Pour Monsieur de la Barmolieve, gendarme de la compagnie du Roy blessé d’ung coup d’espée à la teste et d’ung coup de pistolet à la main logé chez madame de Peyrilles »

[8] La compagnie de César Monsieur, plus connu sous le nom de duc de Vendôme, était commandée, depuis le siège d’Amiens, par

d’Heurre; il appartenait à une ancienne famille du Dauphiné, qui fournit de nombreux officiers à Lesdiguières. D’Heurre ne suivit pas son capitaine dans sa carrière d’intrigues désordonnées et demeura toujours fidèle au roi. Pour l’en récompenser, il devint, en 1616, capitaine de sa compagnie. Il mourut pendant le siège de La Rochelle (Choppin, histoire de la cavalerie française)

[9] La troisième compagnie conservée, celle du chevalier de Vendôme, avait pour lieutenant le sieur de Loppez, qui avait toujours

servi sur les frontières de Champagne, et en dernier lieu, sous les ordres du maréchal de Bouillon. Il devait être un des évangélistes,

comme ce capitaine La Tour dont parle Bassompierre. Il fut tué dans un combat livré par le duc d’Angoulême aux protestants

cherchant à délivrer Montauban (ibid)

[10] Le parfaict Capitaine p 233

[11] La parfaict capitaine p231

[12] Mais l’inscription fut altérée au XIX siècle et la date modifiée (1620)

[13] Article Dénat au XVI et XVIIe siècle, in revue du Tarn N°247 automne 2017 par Cédric Trouche Marty