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Les armées françaises de la guerre de Trente Ans (1610-1648)

Les armées françaises de la guerre de Trente Ans (1610-1648)

 

Henri IV, père de Louis XIII, avait utilisé toute son énergie à rétablir la paix à l’intérieur et à l’extérieur du royaume. Les conséquences s’en feront lourdement sentir : en 1600, la France est ruinée. Mais l’énergie conjuguée du Roi et de Sully, son surintendant des finances, va relever le pays. Depuis 1599, l’Europe est en paix, à l’exception de la guerre entre les Provinces-Unies et l’Espagne, mais celle-ci est fragile. En Allemagne et en France, l’équilibre entre catholiques et protestants est précaire. Alors que les Habsbourg règnent de Madrid à Vienne, les principautés protestantes tissent un réseau d’alliance, recherchant le soutien de la Hollande, de l’Angleterre ou de la France d’Henri IV.

C’est durant la première décennie du XVIIe siècle qu’entre en scène un jeune évêque, Armand-Jean du Plessis de Richelieu. Il a 25 ans en 1610, lorsque Henri IV est assassiné. C’est Concini, favori de Marie de Médicis qui le fait entrer au conseil du Roi, en 1616, comme ministre chargé des affaires étrangères. Luynes succède à Concini, assassiné le 24 avril 1617. À la mort de ce favori, le 15 décembre 1621, les entreprises espagnoles aux Provinces-Unies et l’occupation du Palatinat par les Impériaux en 1622 vont marquer le retour à une politique anti-Habsbourg de la France. Car Richelieu, voulant préserver les frontières du pays, va se révéler un ennemi implacable de l’Espagne et de l’Empire.

La bataille de Lützen, le 16 novembre 1632, voit la victoire de Gustave Adolphe sur le généralissime impérial. Cette seconde victoire sera chèrement payée puisque le « lion du nord » y trouve la mort. Poussés par la France et le chancelier suédois Oxenstierna, les généraux suédois Baner, Horn, Torstensson et l’allemand Bernard de Saxe Weimar continuent la guerre, malgré la lassitude des populations. Mais la défaite des Suédois à Nördlingen (1634) va redistribuer les cartes. Le 30 mai 1635, l’Empereur et l’Electeur de Saxe signent un traité de paix avec l’Empereur Ferdinand II  qui sera bientôt étendu à tous les princes allemands qui le souhaitent. La coalition montée par la Suède de Gustave Adolphe et la France de Richelieu mise à mal, l’Allemagne est maintenant sur le point de retrouver la paix, même si de nombreux princes protestants et villes libres d’Empire y restent hostiles. Mais le chancelier Oxenstierra n’a pas intérêt à une paix en Allemagne : son objectif est de prendre le contrôle de la côte continentale de la Baltique en instaurant un protectorat sur les états protestants d’Allemagne du nord. Le cardinal Richelieu, craignant que l’Espagne de Philippe IV puisse utiliser les troupes impériales ainsi libérées par la fin du conflit pour menacer les intérêts français, n’a pas plus d’intérêt à une fin des hostilités.

La situation est pourtant plus compliquée qu’elle n’y parait. L’Alsace était occupée depuis août 1632 par les suédois de Horn. Les cités Alsaciennes, lasses des déprédations, demandent alors l’aide de Louis XIII. Une convention négociée le 9 octobre 1634 entre Français et Suédois, suivie par un traité, autorise la France à occuper la région. Alors que les maréchaux Brézé et de La Force y affrontent les Impériaux, le Prince Thomas de Savoie, à la tête d’une armée espagnole, envahit l’Electorat de Trèves en mars 1635, faisant prisonnier l’Archevêque Electeur, protégé de Louis XIII. Les dés sont jetés. Le 8 février 1635, Richelieu, sentant la guerre inévitable, avait renforcé son alliance avec les Provinces Unies et avec la Suède. Le 19 mai, il déclare la guerre à l’Espagne. Cette entrée en guerre est suivie d’une première victoire française à Avins, en Wallonie, le lendemain même.

L’infanterie française avant 1635

A la mort d’Henri IV, la France est une des rares nations d’Europe à disposer d’une armée permanente. En 1613, l’infanterie française se constitue ainsi de cinq vieux régiments de 20 compagnies (Gardes Françaises, Picardie, Piémont, Champagne, Navarre) – Normandie ne sera créé qu’en 1616 – et deux petits-vieux, Bourg et Chappes (ancien Nerestang), de 10 compagnies chacun, le tout faisant 15 000 hommes.

De 1600 à 1615, les compagnies d’infanterie comptent, en temps de guerre, une centaine d’hommes, et la moitié en temps de paix. Les Gardes-françaises ont des compagnies plus importantes. Ses 20 compagnies sont à 300 hommes chacune en 1600, puis 120 hommes en 1606. Elles seront à 200 hommes en 1614 et enfin à 300 hommes en 1629. Les autres vieux corps sont à 20 compagnies de 100 hommes, ou 50 hommes les années de paix. En 1613, le régiment Bourg de l’Espinasse, envoyé pour secourir le duc de Mantoue contre le duc de Savoie, a ordre lui ai fait de faire recrue pour passer à 200 hommes par compagnie. L’effectif des compagnies des régiments étrangers au service de la France diffère notablement, 300 hommes pour les compagnies suisses et 200 hommes pour les compagnies liégeoises ou irlandaises. En pratique, les régiments français, autres que les vieux corps, dépasseront rarement 1 000 hommes, en dix compagnies de 100 hommes. Ainsi, des 14 régiments à la disposition de Lesdiguières, en Savoie, seulement deux ont 10 compagnies, les autres en ayant de 2 à 9.

Les troubles religieux reprennent en 1615. Les vieilles bandes qui forment les garnisons sont alors enrégimentées et des commissions sont données pour lever de nouveaux régiments. Mais pour différencier anciens et nouveaux régiments, le colonel général de l’infanterie ne possédera une compagnie colonelle, celle au drapeau blanc, que dans les anciens régiments. Début 1616, la régente à 16 régiments d’infanterie à son service, dont 3 étrangers : les Gardes françaises et Gardes suisses, les 4 vieux corps (Picardie, Piémont, Navarre et Champagne), les 5 petits-vieux (Nerestang, Rambures, Portes, Vaubecourt et Sault), Boniface, Ancre, Chastellier-Barlot, Ornano-Corse et Nesmond-Lorrain. Les Gardes-Suisses ont aussi été rétablis et resteront entretenues. En 1622, pour la campagne de Languedoc contre les rebelles protestants, les compagnies des petits vieux sont à 100 hommes, dont 36 piquiers. Mais  l’ordonnance royale du 14 août 1623 augmente dorénavant les compagnies des vieux régiments à 200 hommes. Ce sera le cas pour les régiments de Normandie, de Vaubecourt et de Coeuvres qui sont envoyés en Valteline.

Une compagnie d’infanterie française comprend vers 1600-1610, un capitaine, un commissaire, un lieutenant, un enseigne, deux sergents, des caporaux, ou cap d’escadre, des lanspessades et appointés pour soulager le camp d’escadre, et des soldats. Le caporal doit avoir un rôle (ou liste d’enrôlement) de ses soldats et il doit leur répartir les vivres, les balles, la mèche et la poudre. Le sergent doit savoir écrire, lire et compter, pour tenir compte de ses soldats, combien de piquiers & combien de mousquetaires, & mettre au premier rang les mieux armés, & les plus courageux. Au sein de sa compagnie, il doit faire observer la discipline aux soldats et les instruire à se tenir en rang et en file. C’est lui qui distribue la mèche & la poudre aux caporaux et qui pose postes de gardes et sentinelles. L’enseigne porte le drapeau de la compagnie partout où est son capitaine et il commande la compagnie en l’absence des deux autres officiers. Le lieutenant commande la compagnie en l’absence du capitaine. On trouve aussi, dans chaque compagnie, un ou deux tambours, un fourrier et un barbier, qui fait office de chirurgien.

L’état-major de chaque régiment compte un prévôt, un maréchal des logis et un sergent major. C’est ce dernier qui organise la marche du régiment, l’informe de sa place au sein du dispositif (à l’avant-garde, à la bataille ou à l’arrière-garde). C’est à lui que revient la tâche délicate d’ordonner le bataillon : former un bataillon parfait, est une préoccupation majeure des officiers du parti catholique. Et s’il se trouve des sergents majors qui ignorent la mathématique bien qu’elle leur soit du tout nécessaire – de nombreux traités possèdent des tables de racines carrées toutes prêtes ! Le sergent major doit aussi être équipé d’un bâton de trois pied qui lui permettra de former un bataillon carré de piques, pour lequel chaque soldat doit occuper un espace de trois pied par trois pieds.

Quant à l’apparence d’un régiment, voilà ce que nous dit Souvigny, de son régiment : Environ la fin de juin de l’année 1613, ledit régiment de Bourg (de l’Espinasse) partit de Sainte-Colombe en fort bon état : les mousquetaires armés de beaux mousquets avec des bandoulières de velours, moitié couvertes de clinquants ; les piquiers, de piques de Biscaye, fer doré et le bout de bâton, avec des corselets de Milan, bourguignotte, hausse-col, tassette et brassal. L’infanterie n’est pas encore, à cette époque, habillée d’uniformes. Mai en 1627, Louis XIII demandera à plusieurs villes de lui fournir une grande quantité d’habits complets pour vêtir tous les soldats de son armée. L’armée reçoit ainsi, le 11 janvier 1628, 5 329 habits et 5 198 paires de souliers envoyés par l’un des échevins de Paris dont 2 400 habits de bure grise (une étoffe grossière et de peu de prix, faite de laine), et 100 autres de serge (la serge est une étoffe de laine légère) rouge cramoisi. Déjà, le 27 octobre 1627, Louis XIII avait frappé les parisiens d’une réquisition d’habits pour les Gardes françaises. Ces habits consistent alors en un pourpoint, jupe à longues basques, haut & bas-de-chausses, de bure minime, teinte en laine. Les moines de l’ordre des Minimes portaient une bure de couleur noire mais l’habit est ici teint en laine donc probablement de couleur écru ou gris. Début décembre 1629, le cardinal de Richelieu aura soin de faire partir avec lui, en Italie, 20 000 habits que le roy a ordonné de faire faire pour vêtir les soldats de son armée cet hiver.

L’infanterie française à partir de 1635

En 1635, un régiment d’infanterie française nouvellement levé compte 10 à 12 compagnies de 120 hommes,  parfois 200 hommes pour quelques régiments étrangers. Les vieux corps, régiments permanents sont à 20 compagnies, voire 30 compagnies pour les Gardes françaises. Au sein de la compagnie, les hommes sont 60% de mousquets et 40% de piques. Ainsi, le 16 février 1635, une capitulation, équivalent aux commissions données pour la levée des régiments français, est signée avec le colonel Batilly pour la levée d’un régiment allemand à 8 enseignes, qu’il sera par la suite possible d’augmenter à 10 compagnies, de 100 hommes chacune. L’État-Major devra être composé d’un Colonel, d’un Lieutenant Colonel, d’un Commissaire, d’un Sergent-Major, d’un Adjudant ou Aide-Major, d’un Maréchal des Logis, d’un Secrétaire du régiment, d’un Aumônier, d’un Prévôt, d’un Chirurgien et d’un Tambour Major. Chaque compagnie devra compter un capitaine, un lieutenant, un enseigne, deux sergents, un capitaine d’armes, un caporal des appointés, un secrétaire, un fourrier, un chirurgien, un tambour et 89 hommes dont il y aura 3 caporaux, 3 anspessades, 36 piquiers armés de corselets, et 43 mousquetaires. L’ordonnance du 14 juillet 1636 oblige les gens de guerre à prendre leurs armes allants au combat savoir pour l’infanterie le corset. Ce n’est qu’à partir de 1642 que les ordonnances préciseront que les capitaines d’infanterie seront obligés d’avoir les deux tiers de leurs soldats armés de mousquets & le tiers de piques. Les piquiers, tout au moins ceux des vieux corps, garderont leurs cuirasses avec tassettes jusque vers 1641. C’est en tous cas ce que rapporte Puysegur dans ses Mémoires : En l’année 1636, l’armée du Roy venant de Hollande, débarqua à Calais dans le mois de mai. On la fit marcher dans des quartiers de rafraîchissement. Le régiment de Piémont qui était beau & fort, eut les deux Andilly dans la Généralité de Rouen, & était payé par les Èlections. Il n’y en avait point de compagnie au-dessous de 90 hommes, & j’en avais 130 dans la mienne. Ils étaient armés de bons mousquets & bandoulières de Hollande, les piquiers avaient des corselets de même que les Gardes, & dans tout le régiment, aussi bien que dans les autres vieux corps, on en a porté jusqu’après la bataille de Sedan. Mais dès juin 1639, le maréchal de Châtillon note que pour l’infanterie, il y a d’assez bons hommes, mais mal armés : car excepté le régiment des Gardes, tous les piquiers sont sans corselet. Par contre, les mousquetaires sont bien armés, ils ont de bons mousquets & de bonnes bandoulières.

L’équipement de cette infanterie s’use rapidement et Richelieu devra continuellement veiller à son remplacement. Nos Français sont tous nuds, il y a un an qu’ils roulent ; ils ne peuvent (vu leur nécessité) s’habiller, écrit le duc de Rohan à Servien, en octobre 1635. Si on les veut conserver, il faudrait envoyer quatre mille paires d’habits pour habiller les plus mal vêtus. Servien lui répond alors qu’il a donné ordre de délivrer à Lyon tous les habits qui y sont, pour être distribués dans votre armée. Cette pratique semble être courante. Ainsi, en 1644, alors qu’il prenait en charge le commandement de  l’armée d’Allemagne, le vicomte de Turenne fit remonter à ses dépends 5 000 cavaliers & habiller 4 000 fantassins (Histoire du Vicomte de Turenne par Ramsay).

En 1635, Louis XIII et Richelieu ont 118 régiments d’infanterie à leur service, dont 16 étrangers, pour un effectif supposé de 156 000 hommes. Mais Richelieu doute de ce chiffre lorsqu’il écrit à son intendant Servien, le 23 mars 1635 : Quand je considère les troupes que le Roy doit avoir sur le papier j’en trouve plus qu’il ne faut pour composer les armées qu’il fait état de mettre en campagne dans un mois ; mais tant plus je pense à ce qu’il a d’effectif, et ce qu’il  aura sur pied dans un mois, je ne vois point comme de tout cela on peut composer 25 000 hommes pour l’Allemagne, 25 000 pour la Flandre, 6 000 auprès du Roy, 10 000 pour la Lorraine, 8 000 pour la Valteline et 12 000 pour l’Italie. D’ailleurs, il écrit un mois plus tard à ce même Servien que le régiment de La Bloquerie, qui devait avoir 2 400 hommes, n’en ayant que 700, il ne faut plus faire état, à mon avis, de compter les compagnies qu’à 100 hommes chacune, tant parce que nous ne le donnons que pour cela, que par ce aussi je ne crois pas qu’il en puisse avoir davantage. Dans ses hypothèses, Richelieu ne compte donc pas systématiquement les compagnies au chiffre théorique de 120 hommes par compagnie, comme il le fait en janvier 1636 : 86 compagnies faisant 80 hommes à quoi je les réduis, y compris les 10 pour 100, 6 880 hommes. Mais il s’efforcera, entre deux campagnes, à porter ces compagnies à 100 hommes. Dans les années 1640, l’effectif théorique de la compagnie passera à des chiffres compris entre 50 et 70 hommes, selon l’année.

À côté des six prestigieux vieux corps que sont les Gardes françaises, Piémont, Picardie, Champagne, Navarre, Normandie puis, à partir de 1636, La Marine, sept régiments permanents appelés petits vieux, bénéficient aussi du drapeau blanc de la compagnie colonelle : Rambure, Maugiron, Nerestang, Sault, Vaubecourt, Chamblay et Bellenave. Les régiments à drapeau blanc sont alors tenus de compter 20 compagnies. Mais le Roi propose par ailleurs, le 11 juillet 1636, que l’on donne le drapeau blanc à tous les régiments qui ont 20 compagnies, augmentant de ce fait le nombre des régiments permanents. Ce sera par exemple le cas du régiment Hebron, régiment écossais ayant combattu sous Gustave Adolphe. Quelques mois plutôt (décembre 1635), Louis XIII avait souhaité que cinq des vieux régiments soient transformés en régiments de provinces : Nettancourt, Turenne, Rebé, Tonneins et Castelmoron deviennent les régiments des Trois-Évêchés, de Quercy, de Foix, de Vivarais et d’Armagnac. Puis, en janvier 1636, le Cardinal demande la création des régiments de Guyenne, de Béarn, de Bourbonnais, de Poitou, de Beauce, de Bourgogne, du Maine, et de Berry à partir de ceux de la Valette, Toulonjon, La Baume, Chastelier-Barlot, Aluye, Chalancé, Lavardin et Courtenay, ainsi que celui de Bretagne. Puis les régiments de Maugiron, de Chamblay, d’Alincourt, de Montausier et de Saint-Ossange sont transformés en régiments d’Auvergne, de Lorraine, de Lyonnais, d’Angoumois et de Touraine. Enfin, le 10 juillet 1636, le duc d’Halluin reçoit commission pour lever le régiment de Languedoc et, le 27 novembre de cette même année, Richelieu demande à la Valette de lever le régiment de Guyenne.

Lorsque Louis XIII disparaît, le 14 mai 1643, l’infanterie française compte 166 régiments dont 25 étrangers pour un total de 192 860 hommes, hors garnisons : les Gardes françaises sont à 30 compagnies de 200 hommes, 16 vieux régiments sont à 30 compagnies de 50 hommes, et 106 régiments sont à 20 compagnies de 50 hommes. Mais on compte aussi un régiment à 18 compagnies de 50 hommes, un régiment à 15 compagnies et 6 régiments à 12 compagnies de 80 hommes, 10 régiments à 10 compagnies de 80 hommes. L’infanterie étrangère comprend 7 régiments suisses en 83 compagnies de 200 hommes, 4 régiments irlandais en 50 compagnies de 100 hommes, 4 régiments écossais en 62 compagnies de 100 hommes, 8 régiments allemands en 107 compagnies de 100 hommes, un régiment liégeois à 20 compagnies de 100 hommes, et un régiment italien à 10 compagnies de 50 hommes. Sur le champ de bataille, chaque régiment à 30 compagnies forme 2 bataillons de 8 à 900 hommes et chaque régiment de 20 compagnies forme un bataillon de 1 000 à 1 200 hommes. Les régiments de 10 et 12 compagnies sont réunis ensemble pour former un bataillon.

Au début des années 1630, selon le duc de Rohan, les bataillons sont sur 10 rangs de profondeur et les escadrons sur 5 de profondeur. Selon Gamaliel de la Tour, qui écrit à la même époque, le bataillon ordinaire doit être sur 10 ou 12 rangs, les demi-files en auront 5 ou 6. Les bataillons ne doivent plus surpasser 400 ou 600 hommes, et rarement viennent jusqu’à 800 ou 1 000 hommes. Chaque homme tient environ 2 pieds de front en largeur et un pied et demi d’épaisseur. En réalité, en 1635, le bataillon français ne se déploie plus que sur 8 rangs, et ce probablement depuis 1632 ou 1633. En 1638, Louis XIII demandera à son régiment des Gardes, dans un règlement du mois d’avril, que les bataillons se forment sur 6 ou 8 de hauteur, car s’ils sont davantage, il y a la moitié des hommes inutiles, et le roi affectionne le plus la hauteur de 6. La Vallière, qui écrit vers 1644-45, prescrit des bataillons de 1 000 hommes à 6 de hauteur pour toute l’infanterie, mais les vieux corps avaient suivis les pratiques des Gardes françaises bien avant, tout au moins lorsque l’effectif du bataillon était réduit à moins de 1 000 hommes. C’est ce que témoigne Henri Campion, évoquant des files de 6 hommes au régiment de Normandie, lors de cette terrible attaque des lignes espagnoles, en 1639, du côté de Salces : Notre bataillon était de huit cents bons soldats et de trente-cinq officiers, desquels on commanda les deux capitaines, lieutenants et enseignes de tour pour la garde de fatigue de se tenir à la queue de la troupe pour empêcher que nul soldat se débandât. L’on détacha deux capitaines, deux lieutenants et deux enseignes, pour donner à notre gauche et à notre droite un peu avant nous, avec chacun cent hommes. En cet ordre nous descendîmes la montagne, et les autres régiments à peu-près de même. (…) Sitôt que nous fûmes au bas de la montagne, les Espagnols commencèrent à tirer et nous à marcher droit à eux, dans un terrain uni comme une salle. Ils nous tuèrent quelques soldats pendant cette marche, que nous exécutâmes, ainsi que le virent et le dirent après le Prince et toute l’armée, avec le même calme que s’il eût été question de faire l’exercice, observant les distances des rangs des files, enfin d’une manière qui marquait la résolution de tout le corps, quoiqu’il tombât toujours du monde. Quand nous fûmes au milieu de la plaine, quasi à la portée du pistolet, les ennemis tirèrent tous leurs canons chargés à balles, et firent en même temps une salve du premier rang de leurs mousquetaires. Un de leurs boulets donna dans le milieu de notre bataillon, et le coup, joint aux mousquetades, nous emporta six files ou trente-six hommes. Les autres régiments reçurent aussi un grand échec, et prirent tellement l’épouvante, qu’ils firent demi-tour à droite, et regagnèrent la montagne, malgré les efforts des officiers, dont la plupart de ceux qui combattaient près de notre régiment se vinrent mettre avec nous.

De 1629 à 1645, les ordonnances s’enchaînent pour réglementer le comportement des gens de guerre. Il y eut le code Michau de 1629, très complet mais qui ne suffira pas. Le règlement du cardinal de la Valette, datant d’avril 1638, codifie pour sa part les intervalles entre bataillons et escadrons lorsqu’ils marchent, ainsi que la place des officiers. Il précise aussi la taille des camps, chaque compagnie devant occuper une rangée de huttes et sera séparée par une rue de la compagnie voisine, ou encore que chaque régiment doit avoir son bagage réuni et indiqué par une banderole à sa couleur. Une ordonnance de mai 1639 ordonne que les capitaines d’infanterie qui n’ont amené à l’armée que des compagnies de trente hommes seront cassés à la tête de leur régiment, dégradés des armes et poursuivis en restitution des sommes qu’ils ont reçues pour faire les recrues. Les capitaines qui n’ont amené que des compagnies de quarante hommes devront compléter à leurs dépens leur compagnie pour la campagne prochaine. Chaque année, une ordonnance publiée au mois d’octobre ou de novembre précise les dispositions des quartiers d’hivers, comme celle du 24 novembre 1639 qui précise que les officiers et soldats seront logés avec place au feu et à la chandelle. Celle du 18 octobre 1640 demande que les régiments de 20 compagnies seront payés, pendant l’hiver, sur le pied de 600 hommes et que les anciens régiments, qui ont plus de 20 compagnies, seront payés pour tous leurs soldats effectifs. Cette ordonnance prescrit par ailleurs une augmentation de l’effectif de l’infanterie, pour la campagne de 1641 en portant toutes compagnies de 50 à 60 hommes.  Au mois d’octobre 1641 apparaît un nouveau règlement sur les étapes : On cherchera dans chaque localité dix ou douze granges, halles ou autres lieux couverts pouvant loger un régiment de 1 000 hommes. Il faudra que l’on puisse y faire du feu, et l’entrepreneur fournira deux fagots et six bûches par feu, du 1er novembre au 1er avril. On fournira la paille pour coucher les soldats qui ne pourront loger ailleurs qu’aux halles et bâtiments où il seront distribués compagnie par compagnie. (…) L’entrepreneur fournira la viande cuite. Le vin sera mis dans des seaux. Il donnera par quatre soldats une écuelle en bois pour manger et un pot en bois pour boire. Cette ordonnance sera bien sûr suivie par une sur les quartiers d’hivers. Celle d’octobre 1642 ordonne que les compagnies complètes des régiments d’infanterie seront payées à la première montre sur le pied de 56 hommes chacune, et que les capitaines d’infanterie seront obligés d’avoir les deux tiers de leurs soldats armés de mousquets & le tiers de piques.

Le 15 janvier 1643, le roi écrit à Le Tellier, alors intendant de l’armée d’Italie : Ayant considéré que la plupart des régiments d’infanterie que j’ai mis à 30 compagnies ne sont guère plus forts qu’ils n’étaient quand ils en avaient moins, j’ai décidé de les réduire à 20 compagnies, sauf les vieux corps, les petits vieux et ceux considérés comme tels. Dans chaque régiment, on ne conservera que les 20 compagnies les plus fortes et on y incorporera les soldats des compagnies supprimées. Comme je trouve que les enseignes sont inutiles dans l’infanterie, je ne conserve par régiment que deux enseignes, un à la compagnie mestre de camp, et un à celle du premier capitaine. On licenciera de suite les enseignes des régiments de 20 compagnies. Dans les vieux régiments qui restent à 30 compagnies, les enseignes qui existent seront conservés, mais on ne remplira pas les vacantes jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus que deux par régiment. L’ordonnance du 18 octobre 1643, sur les quartiers d’hiver, prescrit de licencier les compagnies ayant moins de 20 hommes à la fin de la campagne et que les compagnies complètes seront de 70 hommes chacune, l’infanterie étant armée pour les deux tiers de mousquets & le tiers de piques. Puis celle du 10 novembre 1644 ordonne que les compagnies soient payées pendant l’hiver à 30 hommes, alors qu’elles seront à 60 hommes en campagne. L’ordonnance du 6 avril 1645 évoque une gratification de 300 livres au capitaine qui aurait une compagnie de 60 hommes, y compris les officiers, et 600 livres à celui qui aurait 70 hommes. Les capitaines qui ne présenteraient que les 30 hommes entretenus durant l’hiver devaient être cassés, leurs soldats répartis entre les autres compagnies du régiment. Les ordonnances de novembre 1645 et 1646 ne modifient pas les précédentes sur les quartiers d’hiver, et laissent la compagnie à 60 hommes. Enfin de nombreuses ordonnances, comme celle du 20 janvier 1641, rappellent et ordonnent que les appointements des officiers majors des régiments tant de cavalerie que d’infanterie français & étrangers ne seront payés tant aux monstres qu’aux prêts, qu’à proportion de la force desdits régiments, & des compagnies dont ils seront composés.

Ci-dessus : Étendards et infanterie française (Aquarelles de K.A Wilke)

 

La cavalerie

Il existe encore, en France, comme en Espagne ou en Savoie, des compagnies de gendarmes. Mais il ne s’agit plus des anciennes compagnies d’ordonnance, qui disparaissent dans les années 1590. Au début du XVIIe siècle, selon Du Praissac, les compagnies de gendarmes ou d’hommes d’armes, sont divisées en compagnies de cent hommes d’armes, au moins celles du Roy, des Princes, du Connétable & des Maréchaux de France. Louis de Montgommery nous décrit des compagnies de gendarmerie plus fortes sous Henri IV (vers 1603) : nous laisserons les compagnies de gendarmes complètes de 200 maîtres pour les princes, officiers de la couronne et gouverneurs de provinces ; et les autres de 100 pour les seigneurs, et ceux auxquels il plaira au roi d’entretenir, effectif confirmé par l’ordonnance du 29 avril 1611.

Les chevaux légers sont plus légèrement armés que les gendarmes : une cuirasse, un pistolet à l’arçon et leur casque ou chapeau. Avant 1635, la seule unité permanente, en France, reste la compagnie franche d’une centaine de chevaux. En 1621, les troupes de carabins sont séparées des compagnies de chevaux légers, et forment un corps particulier sous un mestre de camp des carabins, Arnaud de Corbeville.

En 1634, alors que Louis XIII et le cardinal-duc de Richelieu préparent leur entrée en guerre, celui-ci ne cache pas son admiration pour la cavalerie étrangère : J’ai pensé cette nuit qu’il valait mieux lever de la cavalerie étrangère que française, parce que, bien que la dernière soit plus excellente pour les combats, elle est moins bonne pour les fatigues, qui est ce dont on a à faire. Cette cavalerie, principalement allemande et liégeoise, est équipée plus légèrement que nos chevaux légers, à tel point que le Roi les assimile à des carabins.  Jusqu’en 1636, les carabins seront la véritable cavalerie légère de Louis XIII, équipée uniquement d’une cuirasse et d’une bourguignotte, comme le répond Louis XIII au sieur de Ferron qui en veut lever un régiment de 500 chevaux : il faut des carabins bien montés avec cuirasses. En plus des compagnies de carabins, il existe alors quelques compagnies de mousquetaires à cheval. La première – la plus célèbre puisqu’il s’agit des mousquetaires du Roi – est apparue en 1622, après la prise de Montpellier. Mais en mars 1635, dans un de ses mémoires au Roi, Richelieu se prononce contre la levée de nouvelles compagnies de ces mousquetaires montés, craignant que cela porte préjudice à l’infanterie, dont on a besoin. En pratique, rien ne distingue le mousquetaire à cheval du dragon et le cardinal Richelieu changera d’avis lorsque le Roi lui donnera, en mai 1635, commission de lever son propre régiment de mousquetaires à cheval, dits dragons. Six régiments de dragons seront ensuite levés à partir de compagnies de carabins que le Cardinal fait dissoudre : Cardinal-duc, Alègre, Bruslon, Bernieult, Mahé et Saint-Rémy, régiments qui seront prêt le 30 juillet.

Il faudra attendre la fin de l’été 1635 pour que l’on voit la cavalerie française, c’est à dire les chevau-légers qui forment le corps de cette cavalerie, réellement alléger son équipement, comme nous le montre cette lettre du 11 août 1635, de Richelieu au cardinal de la Valette : nous levons 20 régiments & 4 000 chevaux, comme je vous ai mandé, & outre cela nous allons maintenant faire 2 000 chevaux de la nouvelle cavalerie, dont vous m’avez écrit, qui n’aura que la cuirasse, une bourguignotte qui couvre les joues, & une barre sur le nez, une carabine & un pistolet. Louis XIII et Richelieu donneront alors le nom de hongroise à ce type de cavalerie. Car jusqu’en 1636, la majorité de la cavalerie française est composée de chevaux légers qui sont, comme l’écrit Puysegur dans ses mémoires, tous gens bien armés de bonnes cuirasses, de bonnes tassettes, & le casque en tête. Dès 1636, les cavaliers semblent ne plus vouloir porter la cuirasse. L’ordonnance du 14 juillet 1636 insiste donc pour que les gens de cheval aient la cuirasse pour le moins. Et cette habitude va se poursuivre puisque l’ordonnance du 27 mars 1639, enjoint à tous mestres de camp, colonels, & capitaines de cavalerie, tant française qu’étrangère, de faire armer leurs cavaliers de la cuirasse devant et derrière, du pot, de deux pistolets, et de l’épée. Quant à la tenue, seuls les Gardes, tels que les mousquetaires du Roi ou les Gardes du Cardinal, portaient un semblant d’uniforme, sous la forme d’une casaque.  En voici un exemple, évoqué par Henri Campion dans ces mémoires : en 1635, le Maréchal (de la Force) reçut un renfort de quinze cents gentilshommes de Normandie bien montés et fort dorés, de deux mille dragons, tous vêtus de casaques aux couleurs du cardinal de Richelieu.

La cavalerie française ne sera formée en esquadres qu’en juillet 1635. Toute la cavalerie se forme jusqu’alors en compagnies. Mais, face à la résistance de la noblesse, le cardinal de Richelieu doit abandonner son concept d’esquadre dès 1636. Il n’abandonne cependant pas son idée et ordonne, en janvier 1638, la formation de 36 régiments de cavalerie française. Ces régiments sont tous à 9 compagnies, 8 de chevau-légers et une de mousquetaires. S’ajoutent à ce total 25 régiments étrangers, dont 10 régiments weimariens à 8 compagnies. Comme pour l’infanterie, le nombre de régiments de cavalerie augmentera d’année en année. Il reste quelques compagnies dites franches, aux côtés de ces régiments : il s’agit des compagnies de gendarmes et de gardes des maréchaux. La Maison du roi en compte quatre : les compagnies des gardes du corps, des gendarmes de la garde, des chevau-légers de la garde et des mousquetaires du roi.

Les compagnies de carabins sont théoriquement, en 1635, de 80 maîtres, celles de chevaux légers de 90, celles de gendarmes de 100 maîtres et 200 pour les compagnies du roi et des princes. Comme pour l’infanterie, l’effectif théorique des compagnies diminuera avec les années. En 1642, une nouvelle ordonnance rappelle que les capitaines de cavalerie seront obligés d’avoir leurs soldats armés chacun d’une cuirasse, d’un pot, & deux pistolets, le tout en bon état, et que les compagnies de gendarmes & chevaux-légers seront payées à la première montre sur le pied de 60 hommes chacune, & celles de carabins pour 50 chacune, le tout officiers compris. Puis l’ordonnance du 20 décembre 1643 prescrit des compagnies à 70 hommes et que chaque cavalier soit armé du pot, de la cuirasse devant & derrière & de deux pistolets. (…) Chaque compagnie de cavalerie qui aura moins de 30 hommes ne pourra avoir de cornette.

Selon Gamaliel de la Tour (1634), chaque cornette de cavalerie se dispose sur 5 rangs et les escadrons sont de 200, 300 ou 400 chevaux au plus haut, lesquels coutumièrement doivent être quadruples de front, comme de 20 à 5 pour être presque carrés de terrain. Dix ans plus tard, La Vallière prescrit des escadrons de 120 chevaux, 40 de front sur 3 de hauteur. Puysegur confirme que les escadrons se déploient alors sur 3 de hauteur. Héritière des « meuniers » huguenots, La cavalerie française semble avoir abandonnée relativement tôt le combat à la caracole. Ainsi à Leucate, en 1637, le duc d’Halluin suivi de Boissac & de Sainte-Croix donna sur cette cavalerie avec tant de vigueur qu’il la renversa & la contraignit de se retirer en désordre au galop. La cavalerie de l’armée d’Allemagne, sous Guébriant puis Turenne, privilégiera aussi clairement le choc à la caracole, suivant l’exemple des régiments de Saxe-Weimar. Face à des escadrons tenant fermes, la majorité des escadrons privilégie donc le choc à l’épée précédé une salve des pistolets, comme en témoigne cet exemple lors de la bataille de Lens, le 20 août 1648 : « Le prince de Salm s’avance au trot, avec sa première ligne de Wallons et de Lorrains contre celle de Condé, qui marche au pas pour le recevoir. Les deux lignes se joignent tête contre tête de cheval, bouche contre bouche de pistolet, et demeurent en cette posture assez longtemps, attendant, sans branler des deux côtés, qui tirerait le premier. Les ennemis plus impatients commencent la décharge ; on dirait que l’Enfer s’ouvre ! Tous nos officiers du premier rang sont tués, blessés ou démontés. Condé donne alors le signal du feu puis, l’épée haute, à la tête du régiment de Gassion, il enfonce l’escadron qui lui est opposé. Ses six autres escadrons le suivent et, à son exemple, chargent si rudement la première ligne ennemie qu’ils la renversent. »

Ci-dessus : Etat-Major et cavalerie française ; ci-dessous : Artillerie (Aquarelles de K.A Wilke)

Stéphane Thion

L’armée de la Ligue Catholique (1610-1632)

L’armée de la Ligue Catholique (1610-1632)

 

La Ligue Catholique a été constituée le 10 juillet 1609 par les États Allemands du Saint-Empire, à l’instigation du duc Maximilien de Bavière pour contrer l’Union Protestante. La majorité des troupes de la Ligue seront fournies par les Bavarois et les Wallons, avec l’appui de l’Espagne qui s’engageait à financer deux régiments d’infanterie et un de cavalerie. Le duc Maximilien de Bavière en était le chef ; il nomma Jean Tserclaes, Comte de Tilly, lieutenant-général des forces armées de la Ligue Catholique en avril 1610. Selon l’historien Villermont, « l’appel du trentième et du dixième donna 14 000 hommes qui furent classés par régiments, habillés et armés d’une manière uniforme. Ils devaient former le noyau d’une armée toujours prête à entrer en campagne. Ce fut le premier essai d’une véritable armée permanente en Allemagne. (…) La noblesse équipa 2 000 cavaliers, auxquels on donna des instructeurs capables et habiles. Le chiffre de 20 000 hommes, indiqué par l’assemblée de Munich, fut complété par l’enrôlement de régiments étrangers. » À ces troupes s’ajoutaient, pour artillerie, 6 gros canons de 40, 12 canons de 24, 8 canons de 8 et 14 fauconneaux d’un calibre inférieur ou égal à 4.

Le 27 août 1619, les États de Bohême déclarent la déchéance de Ferdinand II : les princes Catholiques demandent alors à Maximilien de reprendre la direction de la Ligue et ordonnent la mobilisation d’une armée de 21 000 fantassins et 4000 cavaliers, ainsi que l’organisation d’une milice. Tilly en reprend la charge de lieutenant-général.

C’est avec cette armée que Tilly aligne une série impressionnante de victoires : face à l’électeur palatin Frédéric V, en 1620 à la Montagne Blanche ; face au margrave de Bade-Durlach, renforcé par les Espagnols du duc Gonzalo de Cordoba, à Wimpfen en 1622 ; face à Christian de Brunswick à Höcht, en 1622, et à Stadtlohn, en 1623 ; enfin, face aux Danois de Christian IV à Dessau et à Lutter am Barenberg en 1626. Mais il finira par connaître la défaite face à Gustave-Adolphe de Suède à Breitenfeld en 1631.

Jusqu’à la mort de Tilly, les régiments impériaux sont le plus souvent au service de l’armée de la Ligue. Ainsi, une armée type de la ligue catholique alignera des unités de recrutement varié : unités italiennes, wallonnes, espagnoles, allemandes de haute-Allemagne, bavaroises, saxonnes, westphaliennes ou du Wurzburg se côtoient.

Jusqu’en 1631, les régiments d’infanterie comptent théoriquement 3 000 hommes en 10 compagnies de 300 hommes. Mais en réalité, la plupart des régiments comptent à peine 2000 hommes. Ces régiments se forment en tercios ou battalia sur 20 à 30 rangs de profondeurs. Ainsi, un régiment de 2 000 hommes se forme en un bataillon de 78 files sur 26 rangs avec un bloc de piquiers, au milieu, en 44 files sur 22 rangs. Les mousquetaires forment deux manches de 17 files sur 26 rangs et un rideau de 44 files sur 4 rangs sur le front des piquiers. En pratique, entre 1622 et 1631, les régiments atteignent rarement 1000 hommes. Les compagnies sont alors regroupées pour former de gros bataillons ou tercios. A la montagne blanche, il y aura ainsi un bataillon wallon regroupant trois régiments (Bucquoy et Verdugo , 45 compagnies pour un total estimé de 3000 hommes), un bataillon napolitain (Brigata Spinelli, 31 compagnies regroupant 2500 hommes), un bataillon regroupant de régiments allemands (régiments Tiefenbach et Breuner, 20 compagnies totalisant 1700 hommes), le bataillon allemand formé par le régiment Fugger (8 compagnies totalisant 1400 hommes), un bataillon Saxon et wallon (régiments Saxon et Nassau, 20 compagnies totalisant 2200 hommes), un bataillon lorrain (régiment Florinville ,10 compagnies totalisant 3000 hommes), un bataillon du Wurzburg (régiment Bauer, 8 compagnies totalisant 2000 hommes), un bataillon autrichien et bavarois (régiments Schmidt et Rouville, 10 à 20 compagnies totalisant 2000 hommes), et deux bataillons bavarois (le premier composé du régiment  Herliberg de 10 compagnies totalisant 1250 hommes, le second composé des régiments Hasslang et Sulz regroupant 20 compagnies pour un total de 2000 hommes). A partir des années 1625-28, les régiments de vétérans dépasseront rarement les 1000 hommes (comme les régiments Reinach et Comargo en 1631), alors que la plupart des nouveaux régiments comptent toujours de 2 à 3000 hommes. À Breitenfeld (1631), les régiments de la Ligue comptaient en moyenne de l’ordre de 2 000 hommes.

Ci-dessus : officier saxon du régiment Löser, arquebusier de la ligue et chasseur bavarois (Aquarelle de K.A. Wilke)

Ci-dessous : piquiers, mousquetaires et double-soldes de la Ligue et/ou de l’Empire(Aquarelles de K.A. Wilke)

Les régiments de cavalerie comptent de 250 à 1000 chevaux, en 5-10 compagnies, celles-ci étant théoriquement à 50-100 chevaux. Ces régiments se déploient sur 10 rangs de profondeurs, pour adopter la tactique de la caracole, cuirassiers devant et arquebusiers derrière.  Entre 1610 et 1630, la doctrine d’utilisation des arquebusiers à cheval était de préparer la charge des cuirassiers en joignant leur feu à celui de la cavalerie lourde. Les régiments de cuirassiers impériaux, qu’ils soient allemands ou wallons, comptaient ainsi un certain nombre de compagnies d’arquebusiers à cheval (en général, 2 compagnies d’arquebusiers à cheval pour 3 compagnies de cuirassiers).  Ainsi, un régiment de cavalerie de 1000 chevaux se composent habituellement de 600 cuirassiers et 400 arquebusiers montés. En pratique, les arquebusiers pouvaient être regroupés en escadrons séparés. Ainsi, lors de la bataille de la Montagne Blanche, la cavalerie de la ligue aurait aligné 3 régiments de cuirassiers (Marradas, Wallenstein et Eynatten de 4-6 escadrons chacun), 8 régiments d’arquebusiers (Dampierre, Gauchier, La Croix, Meggau, Lobel, Histerle, Areyzaga et Montecuccoli, de 2-10 escadrons chacun) et 5 régiments mixtes ou non apparentés à un de ces deux groupes (Cratz, Marcossay, Pappenheim, Bonninghausen et Herzelles, de 5-6 escadrons chacun). A ces types de cavalerie s’ajoutent quelques Cosaques polonais (400 à La Montagne Blanche) ou Croates (de l’ordre de 200 à Wimpfen et à Wiesloch en 1622 et à Stadtlohn en 1625),

Les vieux régiments de cavalerie sont théoriquement à 1000 chevaux, 800-900 chevaux en pratique, comme les régiments de Schoenbourg et de Cronenbourg en 1631, mais les régiments nouvellement levés sont souvent à 500 chevaux (Erwitte, Bongars, Merode et Gehoy) voire à 800 (Eynaten). Les escadrons comptent 250 à 500 chevaux.

Ci-dessous : cuirassiers en armure 3/4, tambour et arquebusier (Aquarelles de K.A. Wilke)

L’artillerie se scinde en batteries de canons légers ou lourds. La ligue aligne ainsi 12 canons, à la Montagne Blanche, en 6 batteries de 2 pièces. Ces canons sont de calibre 12-24 livres et seront nommées, ce jour-là, les « 12 apôtres ».

Ci-dessous : étendards de la Ligue Catholique (Bavarois, en haut, régiment de Tilly)

Stéphane Thion

Deux listes d’armées, Suédois et Impériaux, avec des aides de jeu, par Christophe Henry

Deux listes d’armées, Suédois et Impériaux, avec des aides de jeu, par Christophe Henry

La mort de Gustave Adolphe à la bataille de Lützen par Carl Wahlbom's
La mort de Gustave Adolphe à la bataille de Lützen par Carl Wahlbom’s

Deux listes d’armées, Suédois et Impériaux, accompagnées des cartes d’unités à placer en bord de table et, en bonus, de pions désordre.

L’armée suédoise (1545 points):

  • Commandant en Chef : Gustave Adolph (100 points)
  • Commandant aile droite (50 points)
  • Commandant aile gauche (50 points)
  • Commandant centre (50 points)
  • 4 Escadrons modernes (4 x 155 points)
  • 2 Cuirassiers (2 x 140 points)
  • 1 Arquebusier monté (1 x 80 points)
  • 3 Artilleries légères (3 x 105 points)

L’armée impériale (1560 points) :

  • Commandant en Chef : Wallenstein (100 points)
  • Commandant aile droite (50 points)
  • Commandant aile gauche (50 points)
  • Commandant centre (50 points)
  • 3 Tercios (3 x 160 points)
  • 1 Arquebusier monté (3 x 100 points)
  • 1 Cuirassiers (2 x 150 points)
  • 2 Artilleries moyennes (2 x 115 points)

Télécharger les cartes d’unités

L’armée danoise de Christian IV (1624-29)

L’armée danoise de Christian IV (1624-29)

Christian IV du Danemark a initié des réformes comparables à celles de Gustave Adolphe mais en restant plus proche du modèle hollandais. Son infanterie est organisée en régiments de théoriquement  12 compagnies de 200 hommes, soit 2 400 hommes, . Au combat, ces régiments doivent idéalement former deux bataillons de 1 200 hommes avec une proportion de deux mousquets pour une pique. Les régiments danois, comme ceux de l’Union protestante, étaient colorés. On distingue ainsi le régiment rouge et le régiment bleu.

La cavalerie danoise du roi Christian IV est organisée en régiments. Chaque régiment compte théoriquement 6 compagnies de 106 chevaux. Une compagnie se divise en quatre troupes, trois de 27 cuirassiers et une de 25 arquebusiers. Les régiments comptent donc  3/4 de cuirassiers et 1/4 d’arquebusiers qui se forment derrière les cuirassiers. La cavalerie se déploie en escadrons de 300 chevaux sur 6 rangs de profondeur et 50 chevaux de front.

L’artillerie est composée de canons, de demi-canons, de couleuvrines, de faucons, de fauconneaux et de petits mortiers de 8 livres, avec une proportion théorique de un à deux pièces pour 1 000 hommes.

Le déploiement souvent adopté par les armées danoises est celui en forme de losange (ou diamant), comme représenté par le sieur du Praissac : deux bataillons en première ligne, puis deux couples de deux bataillons, décalés à gauche et à droite en seconde ligne, et enfin un couple de deux bataillons, derrière les deux premiers, en troisième ligne. Ces huit bataillons sont flanqués d’escadrons de cavalerie, ceux-ci pouvant aussi être déployés en losange, et plusieurs de ces brigades peuvent être déployées côté à côté. C’est la forme déployée par l’armée danoise à Lutter am Barenberg en 1626.

Ainsi, l’armée se déploie théoriquement sur 3 lignes de 3 régiments d’infanterie, ces régiments disposés par paires de bataillons  avec des intervalles entre chaque paire de bataillon. Le second échelon couvrira les intervalles du premier échelon. Le troisième échelon sera déployé comme le premier échelon avec des régiments de cavalerie comblant les intervalles. Le gros de cavalerie sera disposé sur chaque aile, en échiquier. Comme l’infanterie, les régiments de cavalerie seront scindés et alignés en paires d’escadrons.

 

Ci-dessus : déploiement d’une armée selon Du Praissac (in Discours Militaires)

Ci-dessous : déploiement de l’armée de Christian IV à Lutter am Barenberge, 1626 (en bleu, à droite)

Christian IV, de même que Gustave Adolphe, conduira des expérimentations en ce qui concerne l’artillerie. Il rationalisera les calibres en les limitant à 5 calibres différents : fauconneau de 3 livres, double-fauconneau de 6 livres, demi-couleuvrine de 12 livres, demi-canon de 24 livres et canon de 48 livres.

L’armée « idéale » de Christian IV totaliserait 32000 hommes dont 25000 fantassins et 6000 cavaliers, 6 canons, 12 demi-canons, 6 demi-couleuvrines, 6 double-fauconneaux, 6 fauconneaux et 3 mortiers de 8 livres

Les danois ne composaient qu’une part de l’armée du roi Christian. La majorité des troupes étaient des mercenaires allemands, anciens régiments de Mansfeld et de Brunswick. En réalité, après que Christian IV déclara la guerre, il ne put emmener que  régiments danois avec lui. Le reste de son armée était composée principalement de protestants allemands, aux côtés d’écossais, anglais, français et hollandais.

Unités danoises de l’armée de Christian IV de Danemark (1625-26) :

Compagnie d’infanterie de la Garde (Leib) :                           1 compagnie estimée à 400 hommes

Régiment d’infanterie de la garde (Leib, régiment bleu) :  20 compagnies pour un total estimé de 2800 hommes

Régiment d’infanterie Kruse (régiment rouge) :                  20 compagnies pour un total estimé de 3000 hommes (3 bataillons)

Compagnie de cavalerie de la Garde (Leib) :                          1 compagnie estimée à 300 hommes en 1 escadron

Régiment de cavalerie de la Garde (Leib) :                           10 compagnies pour un total estimé de 1000 hommes en 2 escadrons

A ces unités, s’ajoutent les régiments des armées de Mansfeld, de Christian de Brunswick du Landgrave de Hesse-Cassel, du Rhingrave (…).

Source principale : Battles of the Thirty Years War, from White Mountain to Nördlingen 1618-1635  de W.P. Guthrie

 

Ci-dessus et ci-dessous : Arquebusier à cheval et drapeaux danois (Aquarelles de K.A. Wilke)

Ci-dessous : drapeau danois (Armémuseum de Stockholm, taille : 100x100cm)

 

Ci-dessous : cornette de cavalerie

 

Stéphane Thion

L’armée espagnole à la bataille d’Avins (1635)

L’armée espagnole à la bataille d’Avins (1635)

Selon le Mercure Français, l’armée espagnole de Flandre comptait, à la mi-1634, 23 000 hommes de pied et 7 000 chevaux. L’infanterie était composée de quatre régiments d’Espagnols des Maîtres de camp Alonso Ladron, Marquis de Celade, Dom Francisco Capate, et dix compagnies d’Espagnols nouvellement venus d’Espagne, comptés pour un quatrième régiment ; trois régiments d’Italiens des Maîtres de camp duc Doria, marquis Sfondrato, dom Andrea Cantelmo ; sept régiments de Wallons des Maîtres de camp les comtes de Fresin et de Fontaine, le sieur de Ribaucourt, le baron de Wesemal, les sieurs de Triest, de Custrines & de Crequy ; quatre régiments de hauts Allemands des comtes d’Isembourg, de Hoochstrate, du colonel Rouvrois (ou Rouvroy) & du prince de Barbançon ; deux régiments de bas Allemands du marquis de Lede et du colonel Brion ; un régiment d’Anglais du Maître de camp Tresan ; et deux régiments d’Irlandais du comte de Tirconel et de dom Eugenio Onel, qui faisaient en tout vingt- trois régiments. La cavalerie qui était sous la charge du comte de Nassau, était composée de soixante huit compagnies, & des cinq régiments des comtes Buquoy, d’Isembourg, de Salms, du marquis de Celade et du prince Barbançon. En juillet 1634, le marquis d’Aytonne demande au prince Thomas de lever de l’infanterie et de la cavalerie.

Le corps du prince Thomas de Savoie qui va affronter l’armée française ne comptait qu’une partie de ces forces : 10 000 fantassins en 120 enseignes, 3 000 chevaux en 45 cornettes et 16 canons selon Richelieu, 8 000 fantassins et 2 000 chevaux selon Gualdo Priorato. Le comte de Feira en était maître de camp général, le comte de Buquoy y commandait la cavalerie et le comte d’Hoochstrate, l’infanterie. Si on en croit le Mercure Français, les meilleurs régiments ne faisaient pas partie de ce corps puisque, après la bataille, le Cardinal Infant s’était retranché le long du Demer vers Tillemont, avec une armée composée des restes de celle du Prince Thomas, et de ses autres forces où étaient les meilleurs et plus vieux régiments.

La relation du Mercure Français évoque le tercio espagnol d’Alfonso de Ladron de Guevara, le tercio italien de Sfondrato, le régiment anglais de Brons, le régiment allemand d’Hoochstrate et le régiment du prince Thomas. Ce dernier régiment est probablement celui levé fin 1634 et était probablement Lorrain, le Prince ayant été colonel d’un régiment de cette origine lorsqu’il était en Savoie. J.L Sanchez, cité par Pierre Picouet, évoque aussi le régiment wallon de Frezin. Le tercio espagnol d’Alfonso de Ladron de Guevara est un vieux corps puisqu’il s’agit du tercio viejo de los Estados de Brabante.

En 1635, un tercio espagnol compte en pratique rarement plus de 1 500 hommes, même si l’effectif théorique est de 3 000 hommes. Ainsi, la montre de mai 1636 donne 166 officiers et 946 soldats pour le tercio de Ladron de Guevara. La carte de Melchior Tavernier montre 7 escadrons espagnols ce qui donnerait bien 7 à 10 000 hommes pour l’infanterie. Le tercio de Ladron de Guevara et celui de Sfondrato ont peut-être formé 3 ou 4 escadrons à eux deux.

La cavalerie comptait 45 cornettes selon Richelieu, jusqu’à 40 compagnies selon Pontis. En ne comptant ces compagnies qu’à 50 chevaux, cela nous donne un minimum de 2 000 chevaux. Tavernier a représenté 17 gros escadrons sur sa carte, ces escadrons faisant au moins le double de la taille des escadrons français. L’estimation de Richelieu, soit 3 000 chevaux, parait donc tout aussi plausible. Une bonne partie de cette cavalerie était formée par le régiment de Bucquoy. Il s’agissait probablement d’un régiment de cuirassiers à dix compagnies, faisant de 700 à 1 000 chevaux.

L’infanterie espagnole en 1635

L’Espagne dispose, à l’aube de la guerre de Trente ans, d’une infanterie qui inspire le plus grand respect. Bien commandée, solide et disciplinée, cela fait un siècle et demi qu’elle s’impose sur les champs de bataille d’Europe. Sa force principale repose sur les terribles tercios viejos.

Le tercio compte, depuis 1632, 12 compagnies de 250 hommes, ou 15 compagnies de 200 hommes pour un tercio levé en dehors de la péninsule ibérique, soit un effectif théorique de 3 000 hommes par tercio. L’ordonnance de 1632, légèrement modifiée en 1633, ne souhaite pas, sans l’interdire, que les tercios soient à 20 compagnies. En pratique certains auront jusqu’à 26 compagnies. Une compagnie au complet doit compter, selon cette ordonnance, 11 officiers (un capitaine et son page, un alférez, un enseigne ou abanderado, un sergent, deux tambours, un fifre, un fourrier, un barbier et un chapelain) et 239 soldats dont 90 coseletes (piquiers en cuirasse), 89 arquebusiers et 60 mousquetaires. Parmi les soldats, on compte 10 cabos de escuadra, c’est à dire chefs d’escadre ou caporaux. La compagnie de 200 hommes doit compter, pour sa part, 70 coseletes, 90 arquebusiers et 40 mousquetaires. Cette ordonnance prévoit aussi, pour l’état-major des compagnies, un alferez et deux sargentos (sergents) réformés, c’est à dire de remplacement. L’état-major permanent du tercio comprend 8 officiers supplémentaires : le mestre de camp, le sergent major, le capitaine de campagne, le tambour major, l’auditeur militaire, le fourrier principal, le chapelain principal et le chirurgien principal. L’ordonnance de 1632 tente par ailleurs d’endiguer la mauvaise habitude prise par les coseletes de se débarrasser de leurs cuirasses et de raccourcir leurs piques. Elle prévoit cependant que les piquiers moins biens armés ne soient pas placés aux deux premiers rangs. Cette tendance à allègement se retrouve bien sûr chez toutes les nations d’Europe.

Certains tercios sont permanents, ou fixes, comme les régiment entretenus français. Et parmi eux, les plus redoutés sont les tercios viejos. Les principaux tercios fixes de l’armée de terre sont (avec le nom de leur mestre de camp en 1635), les tercio viejo de los Estados de Flandes (Villalobos), ter-cio viejo de los estados de Brabante ( Ladron de Guevara), tercio viejo de los Estados de Holanda (marquis de Celada), tercio fijo de Napoles (Ascoli), tercio fijo de Lombardia (Aragon y Tafalla), tercio fijo de Sicilia (Toledo), tercio de Saboya (Coronado y Mendoza), et la Coronelia de la Guardia del Rey. À ces unités s’ajoutent les tercios de la Marine répartis en Espagne, à Naples et en Sicile.

Les tercios espagnols sont par ailleurs épaulés par l’infanterie des nations, provenant des territoires appartenant à la couronne d’Espagne : Flandre, Bourgogne (qui se limite, à cette époque, à la Franche-Comté), Sicile, Naples et Lombardie (limitée au Milanais). Si l’infanterie italienne et bourguignonne est organisée sur le même pied que l’infanterie espagnole, en tercios de 12 compagnies totalisant 3 000 hommes, les tercios wallons sont organisés comme les tercios espagnols des Flandres, en 15 compagnies de 200 hommes, totalisant aussi 3000 hommes. Mais chaque compagnie compte, sur le papier, 12 officiers, 46 piquiers et 142 mousquetaires. Les régiments allemands ou lorrains au service de l’Espagne comptent pour leur part 10 compagnies de 250 ou 300 hommes.

Bien sûr, il s’agit d’effectifs théoriques, correspondant à un régiment nouvellement levé ou ayant fait recrue. En pratique, les effectifs fondaient rapidement. Ainsi, pour la bataille de Nördlingen, en 1634, le tercio d’Idiaquez compte 1 800 hommes en 26 compagnies et le tercio de Fuenclara, 1 450 hommes en 17 compagnies. Le tercio napolitain de San Sivero compte 1 900 hommes en 24 compagnies, celui de Toralto, 750 hommes en 10 compagnies et celui de Cardenas, 950 hommes en 13 compagnies. Enfin le tercio lombard du prince Doria compte 1 000 hommes en 12 compagnies alors que celui de Lunato en compte 1 300 en 15 compagnies.

 (Aquarelles de K.A. Wilke)

Face à l’ennemi, les tercios se forment en escadrons (escuadrones), équivalent des bataillons français. L’escadron, qui se forme maintenant couramment à partir d’un seul tercio, se déploie dans les années 1630 sur un maximum de 12 rangs, probablement 8 ou 10 comme les bataillons français. Les piquiers forment le bloc du centre alors que les arquebusiers forment les garnisons sur les deux flancs de ce bloc. Des manches (mangas) de mousquetaires viennent alors se déployer sur les ailes de l’escadron, mais peuvent aussi opérer indépendamment. Contrairement à une idée reçue, à partir de 1635, un escadron comptera rarement plus de 1 000 hommes. Sur le terrain, rien ne le distingue donc de son homologue français, hollandais ou allemand.

La cavalerie espagnole en 1635

Si l’infanterie espagnole bénéficie d’une forte réputation, il n’en est pas de même pour la cavalerie. Et de fait, le roi d’Espagne recrutera une grande partie de sa cavalerie en Lombardie, à Naples, en Wallonie, en Franche-Comté, en Lorraine, ou encore en Allemagne. Ainsi, l’armée du Cardinal-Infante qui se dirige vers Nördlingen, en 1634, compte 700 cavaliers napolitains, 590 cavaliers bourguignons et 500 cavaliers lombards pour seulement 230 gardes à cheval espagnols, en deux compagnies.

Il existe alors trois grands types de cavaliers au service du royaume d’Espagne : le lancier (caballo-lanza), le cuirassé (caballo coraza qui a remplacé le reître ou herreruelo) et l’arquebusier à cheval (arcabucero a caballo).

La cavalerie l’espagnole est la dernière à utiliser des lanciers, en Europe, mais ceux-ci ne sont plus qu’en faible nombre, formant principalement des compagnies de Gardes. Ludovic Melzo, dont les Règles militaires pour le gouvernement et le service de la cavalerie furent publiées en 1619, affirmait que la principale utilisation de ces lances consiste à suivre les arquebusiers, lesquels, après avoir délivrer leur charge sur les troupes ennemies de face et par les côtés, les ayant décomposées et mises en confusion, seront suivies par la charge des lances par le côté ou de face en fonction de l’occasion ou de l’opportunité qui se présente. Mais il soulignait déjà qu’il fallait quatre conditions pour bien utiliser des lanciers : un terrain favorable, un cheval de qualité, un cavalier bien entraîné et une formation de combat adaptée, c’est à dire de petites troupes d’une trentaine de lances. Enfin, l’auteur espagnol liste l’équipement théorique du lancier : la cuirasse (plastron et dossière) à l’épreuve des balles, les cuissards (quixotes), les garde-reins, les brassards, la salade (celada, un casque à visière) et un gantelet à l’allemande à la main gauche. La lance du capitaine devra porter sa banderole de manière bien voyante. Les soldats peuvent remplacer les cuissards par des tassettes, plus pratiques pour le travail de la lance. Ils devront porter un pistolet d’un côté de l’arçon et la salade ou bourguignotte de l’autre.

(Aquarelles de K.A. Wilke)

Les caballos corazas sont, en cette première moitié du XVIIe siècle, similaires aux chevaux légers français. Ils forment à cet égard la plus grande part de la cavalerie espagnole. Melzo décrit ainsi leur équipement : les soldats des cuirasses doivent être armés d’un plastron et d’une dossière à l’épreuve du pistolet, et des autres armes que portent les soldats des lances, et de plus ils doivent porter des cuissards (quixotes). Ils doivent porter des pistolets d’arçon, et derrière, à droite, ils attachent d’ordinaire la salade (celada). Comme pour la cavalerie française, sous l’influence des Suédois et des Hongrois, cet équipement va progressivement s’alléger, à partir des années 1634-36, pour ne garder que la demi-armure et un casque de type bourguignotte ou capeline.

L’arquebusier à cheval est l’équivalent du carabin français. Melzo affirme que les arquebusiers à cheval furent inventés par les français, lors des dernières guerres du Piémont qui les appelèrent dragons, nom qu’ils gardent encore. Ayant appris l’avantage et l’utilité de cette nouvelle sorte de soldatesque, les Espagnols commencèrent aussi à les utiliser au sein de leur armée. Et lorsque le duc d’Albe passa dans les Flandres, il amena avec lui quelques une de ces compagnies. Elles servirent d’abord à pied, puis elles servirent à cheval, avez des arquebuses à rouet, et elles continuèrent à servir ainsi. Quand à son équipement, il écrit qu’il serait convenable d’armer les arquebusiers à cheval d’un plastron et d’une dossière (cuirasse), mais cela reste à prouver ; parce que embarrassés de ces armes, ils ne peuvent servir en les oc- casions où il est nécessaire de mettre pied à terre. (…) En aucun cas ils ne doivent mettre des cuissards, ni des garde-reins, parce qu’ils sont excessivement embarrassants lorsqu’il faut mettre pied à terre. Ils doivent porter une arquebuse légère… Les soldats devront porter un mousquet à rouet, de onze livres et demi de balle, le canon long de quatre palmes, qu’ils devront porter du côté droit avec la bandoulière ; et y ajouter un morion de même qualité et forme que celui du capitaine.

Dragons espagnols (Aquarelle de Wilke)

Enfin, les généraux possèdent fréquemment deux compagnies de gardes, une de lanciers et une autre d’arquebusiers à cheval. Les deux compagnies de gardes du Cardinal-Infante seront ainsi présentes à la bataille de Nördlingen. Melzo les évoquait déjà dans son traité, vers 1615.

La cavalerie espagnole est organisée en compagnies de théoriquement 100 chevaux. Chaque compagnie, commandée par un capitaine, doit aussi comprendre deux trompettes, un maréchal des logis, un fourrier, un chapelain, un armurier et un barbier. Melzo précise que les cuirassiers devront toujours se déplacer au trot, pour ne pas se désunir, et qu’ils devront être ordonnés en gros escadrons de 200 à 400 chevaux. Plus l’escadron sera renforcé, mieux ce sera, et la rencontre plus galante, et on pourra en attendre le meilleur effet, ajoute t-il.

L’Artillerie

Depuis 1609, selon Diego Ufano Velasco, l’artillerie espagnole n’utilise plus, théoriquement, que quatre calibres : le canon tirant 40 livres de balles, le demi-canon tirant 24 livres de balles, le quart de canon tirant 10 livres de balles et le quint de canon – ou octave et auquel on peut substituer la quart de couleuvrine – tirant 5 livres de bal- les. Seuls les deux derniers sont utilisés en campagne, les deux premiers étant réservés aux sièges.

Le déploiement de l’armée

Selon Brancaccio, une armée espagnole des années 1620 dispose sa cavalerie de chaque côté de l’infanterie, les troupes d’arquebusiers à l’extérieur, et les troupes de cuirassiers entre l’infanterie et les arquebusiers à cheval. Une troupe de près de 200 cuirassiers sera placée en avant, suivie de deux troupes de 300 cuirassiers de chaque côté et à 60 pas derrière, suivies de trois autres troupes à 60 pas derrière, dans les intervalles, puis enfin, un dernier échelon de deux troupes à 60 pas derrière, dans les intervalles. Au centre, l’infanterie est aussi disposée en échiquier, chaque escadron à 200 pas l’un de l’autre, pour laisser au second échelon la place de passer dans les intervalles. Le second échelon se positionne 20 pas derrière leur premier et les manches de mousquetaires et arquebusiers se dispo- sent entre les troupes de cavalerie et entre les escadrons d’infanterie.

Une relation du voyage du Cardinal- Infante en 1633-34, nous précise le déploiement réel d’une l’armée espagnole : début septembre 1634, peu avant la bataille de Nördlingen, toute l’infanterie se mit en escadrons, chaque tercio à côté l’un de l’autre, ainsi bien fixés, occupant un front de plus d’un quart de grande lieue (soit 1,5 kilomètre), ils étaient neuf tercios en tout, deux d’Espagnols, quatre de Napolitains, trois de Lombards et deux régiments d’Allemands. Chaque tercio constituait alors un escadron occupant un front de près de 170 mètres.

À Avins, le prince Thomas déploiera son infanterie sur deux lignes, les sept escadrons d’infanterie disposés en échiquiers. La cavalerie, dans un premier temps placée en un rideau pour masquer les lignes espagnoles, sera ensuite déployée sur les ailes et en seconde ligne.

Drapeaux espagnols (Aquarelle de K.A. Wilke)

Stéphane Thion

 

L’armée impériale de Wallenstein (1632-1634)

L’armée impériale de Wallenstein (1632-1634)

Avant 1632, l’infanterie de la ligue catholique se formait en bataillons de 2 000 hommes sur 26 rangs. Les bataillons impériaux étaient de 1 000 hommes combattant sur 19-20 rangs. La cavalerie combattait en escadrons de 500 à 1 000 chevaux sur 8 à 10 rangs. Après le désastre de Breitenfeld, Wallenstein va réorganiser l’armée Impériale. Selon Gualdo, il déclara de quelle manière il voulait être obéi, & prescrivit à un chacun ses devoirs. Entre autres ordonnances il régla que l’armée dorénavant porterait des écharpes rouges, & défendit toute autre couleur sous peine de la vie. (…) Il défendit, sous peine d’encourir sa disgrâce, à la cavalerie depuis le soldat jusqu’au colonel d’être jamais sans bottes ni éperons, aux officiers d’infanterie d’en porter (…). Puis il se préoccupa du recrutement : Isolani fut en Croatie & dans la Hongrie lever de la cavalerie, & pour ce service il fut fait à son retour général de toutes les troupes légères. Les capitaines chargés de recruter se partagèrent : les uns furent en Moravie, d’autres en Silésie, dans l’Autriche, la Styrie, la Carinthie, enfin partout où ils comptaient de trouver des hommes désoeuvrés & enclins au métier des armes. (…) La plupart venaient tout équipés se rendre aux enrôleurs, perçant la foule du petit peuple qui les entourait & dont les cris de joie passaient alors pour le présage assuré de la ruine des Suédois. Une grande partie de la cavalerie était sans cuirasses & les avait perdues dans les déroutes passées, & surtout à la journée meurtrières de Lepzig. Walstein en tira quantité de Lombardie. Wallenstein commanda effectivement 4 000 armures complètes pour ses cuirassiers, dont la moitié avec des armets (casques fermés) et la moitié avec des Zischägge (pots hongrois), et plus de 6 000 armures pour arquebusiers (cuirasse complète ou demi-cuirasse frontale plus pot hongrois). Enfin, au même moment (juillet 1631), la Ligue Catholique ordonne la levée de 9 000 fantassins en 3 régiments et 2 000 cavaliers en 4 régiments.

Wallenstein va par ailleurs adapter ses formations : son infanterie se déploiera dès lors en bataillons de 500 à 1 000 hommes, les ⅔ de mousquetaires, sur 10 rangs. Le bloc de piquiers, au centre, comprendra 7 rangs de piquiers et 3 de mousquetaires sur le front. La cavalerie combattra en escadrons de 500 à 800 chevaux sur 6 rangs, 8 rangs selon Folard. Puis la profondeur des escadrons passera à 4 ou 5 rangs à partir de 1636, et enfin à 3 rangs dans les années 1640, selon Montecuccoli, pour 50 chevaux de front. Selon Schildknecht, les cuirassiers impériaux privilégient la caracole, chargeant serrés à rangs ouverts, faisant une décharge de pistolet si l’ennemi tient ferme, puis défilant à droite et à gauche pour laisser la place au rang suivant, le premier rang se reformant derrière l’escadron. Mais Gualdo rapporte qu’à Breitenfeld, les cavaliers saxons ne s’attendaient ni au feu ni au choc réitéré de cette cavalerie de l’avant-garde menée par Schaumbourg & Cronenberg, qui tous deux l’épée à la main chargeaient en furieux à la tête des escadrons. Attaqués de front & pris en flanc les Saxons se replièrent avec précipitation sur les escadrons de l’électeur qui dans cette confusion s’ouvrirent. Les impériaux en profitèrent pour entrer dans cette cavalerie (saxonne) le sabre à la main.

Les régiments de cavalerie sont toujours théoriquement à 10 compagnies de 100 chevaux, plutôt à 7 ou 9 compagnies de 65 à 80 chevaux en pratique. Certains régiments continueront longtemps à mixer des cuirassiers et des arquebusiers. Ainsi, en août 1645, l’Obristleutnant Graf Boussu, qui est en charge du régiment Piccolomini, commande 200 cuirasses et 300 carabines pour son régiment, qui compte 500 hommes. L’armée impériale comprend, en avril 1633, trois corps de cavalerie. Le corps de cavalerie de Piccolomini compte 50 compagnies et 3 900 chevaux (régiments Piccolomini, Matthias von Toscana, Franz von Toscana, Terzka et les deux compagnies de Leibgarde de Wallenstein ; le corps de Schaffgotsch, compte 72 compagnies pour 4 700 chevaux (régiments Woschiz, Strozzi, Gonzago, Bornewall, Trost, Schaffgotsch, Marradas, Götz, Hassenburg et Lobkowitz) ; enfin le corps de Sparr, compte 70 compagnies pour 4 600 chevaux (régiments Lindlow, Eichstedt, Colloredo, Sparr, Lintersheim, Morocini, Götz et Wintsch). Dans la seconde partie des années 1640, les régiments passeront à 750 cavaliers selon Montecuccoli.

Il faudra attendre les années 1640 pour que la cavalerie impériale commence réellement à s’alléger, à l’image des Suédois ou des Français. Auparavant, Wallenstein ne paraît pas avoir autorisé cette évolution, comme le sous-entend Montecuccoli : les arquebusiers ou carabiniers ne peuvent faire un corps solide, ni attendre de pied ferme le choc de l’ennemi, parce qu’ils n’ont point d’armes défensives : c’est pourquoi il ne serait pas à propos d’en avoir un grand nombre dans une bataille, parce qu’on ne saurait les placer qu’ils ne causent de la confusion en tournant le dos. Comme leur emploi est de tourner en caracolant, et de faire leur décharge, puis de se retirer si l’ennemi les presse par derrière et qu’ils se retirent si vite que cela ait l’air de fuite, ils ôtent le courage aux autres, ou bien ils les heurtent, et se renversent sur eux. C’est ce qui détermina Wallenstein général, des troupes de l’Empereur, de les proscrire de l’armée après la funeste expérience qu’il en fit à la bataille de Lutzen l’an 1632. Mais en janvier 1645, l’abandon de l’armure complète est proposée à Piccolomini, tout au moins pour son régiment. Le lieutenant-colonel Graff écrit ainsi que les lourdes et encombrantes cuirasses complètes, qui distinguent les cuirassiers des arquebusiers, soient remplacées par le casque et la cuirasse en deux parties et à l’épreuve des tirs. Il argumente que, lorsqu’il gèle, les hommes se plaignent des brazallen (armures de bras avec gant de fer) qui ne se peuvent porter, et peuvent se casser. Il précise enfin que, comme le souhaite Piccolomini, nous mettrons en place les carabiniers au nombre de 20 par compagnie, qui seront du plus bel effet. On retrouve là le régiment de cavalerie impérial des années 1640 et 1650, décrit par Montecuccoli : les régiments de cavalerie sont armés aujourd’hui de demi-cuirasses, qui ont le devant et le derrière, de bourguignottes composées de plusieurs lames de fer attachées ensemble par derrière et aux côtés pour couvrir le col et les oreilles, et de gantelets, qui couvrent la main jusqu’au coude. Les devants de cuirasse doivent être à l’épreuve du mousquet, et les autres pièces à l’épreuve du pistolet et du sabre. Leurs armes offensives sont le pistolet et une longue épée qui frappe d’estoc et de taille. Le premier rang pourrait avoir des mousquetons. (…) Les cuirasses entières sont admirables pour rompre et pour soutenir ; mais après avoir reconnu que si ces armes ne sont à l’épreuve, elles servent de peu, et que même, le fer venant à se rompre, les morceaux rendent les blessures plus grandes ; et qu’au contraire si elles sont à l’épreuve, elles sont trop pesantes, et embarrassent tellement la personne, que le cheval étant tombé, le cavalier ne saurait s’aider ; que d’ailleurs les brassards et les cuissards rompent les selles et les harnois, blessent les chevaux sur le dos, et les fatiguent beaucoup, on a jugé à propos de s’en tenir aux demi-cuirasses.

Enfin, selon Montecuccoli le rôle du dragon impérial n’est guère différent que celui de son homologue suédois : les dragons ne sont autre chose que de l’infanterie à cheval armée de mousquets légers, un peu plus courts que les autres, de demi-piques et d’épées, pour se saisir d’un poste en diligence, et pour prévenir l’ennemi dans un passage. On leur donne pour cela des hoyaux et des pelles. On les met à cheval au milieu et dans les vides des bataillons pour tirer de là par dessus les autres ; d’ailleurs ils combattent d’ordinaire à pied.

Les régiments d’infanterie comptent en pratique de 6 à 9 compagnies de 115 hommes, pour une moyenne de 1 000 hommes par régiment. Puis ces régiments seront regroupés en brigades à partir de 1633, au nombre de 6 : Grana (27 compagnies des régiments Alt-Sachsen, Alt-Brenner et Grana), Von Waldt (32 compagnies des régiments Beck, Tieffenbach et von Waldt), Schaffenberg (23 compagnies des régiments Harrach, Terzka et Schaffenberg), Dietrichstein (30 compagnies des régiments Kehraus, Wallenstein et Dietrichstein), Manteuffel (25 compagnies des régiments Hardeck, Mansfeldt, Stranz et Manteuffel) et Funk (37 compagnies des régiments Lichtenstein, Funk, Illo et Gallas). Le tout fera 174 compagnies d’infanterie pour 20 000 fantassins. De sorte que l’armée impériale devait compter de l’ordre de 40 000 hommes, en comptant les Croates et l’artillerie.

À la mort de Wallenstein, un an plus tard, l’armée impériale compte 22 régiments de cavalerie (Alt-Piccolomini, Neu-Piccolomini, Strozzi, Lamboy, Rittberg, Breda, St Martin, Cronberg, Wildtberg, Rauchhaupt, Biesinger, Mülheimb, Alt-Sachsen, Marradas, Gonzaga, Nicolai, Ulfeldt, Morzin, Torneta, Streithorst, Hatzfeld, Willich), 21 régiments d’infanterie (von Waldt, Wallenstein, Wangler, Adelshofen, Mariame, Tieffenbach, Thun, Webel, Kehraus, Morzin, Hatzfeld, La Fosse, Jung-Breuner, Suis, Berch, Alt-Sachsen, Diodati, Jung-Wallenstein, Alt-Breuner, Gordon, Goltz), 4 régiments de dragons (Piccolomini, Buttler, Hennerson, Gallas), 7 régiments de Croates (Isolani, Cosetzky, Loysy, Corpus, Forgatsch, Prziowsky, Revai) plus des cosaques polonais, pour un total de 40 à 45 000 hommes.

Dans les années 1640 et 1650, les bataillons d’infanterie devront être composés, selon Montecuccoli, de 500, 1000 et 1500 hommes à 6 de hauteur, les deux tiers de mousquetaires et un tiers de piquiers. Si les compagnies font 150 hommes, un régiment de dix compagnies sera de 1500 hommes, nombre suffisant pour être conduit et gouverné par les officiers qu’on a coutume de lui donner, comme on a remontré depuis peu. Il propose ensuite de former des bataillons ayant en leur centre un bloc de 480 piques à 6 de hauteur et 80 de front, au devant desquels on met une rangée de 80 mousquetaires, qui étant couverts par les piques peuvent tirer en sûreté tantôt debout, tantôt un genou à terre, et un rang de 80 rondaches, qui couvrent tout ce qui est derrière. Les piques sont garnies de chaque côté, de deux manches de 400 mousquetaires (10 escouades de 40 hommes), dont une partie peut être placée derrière les piquiers et une autre postée480 par pelotons entre la cavalerie la plus proche, d’où elles font un feu continuel, jusqu’à ce que la mêlée commence : et alors elles se retirent dans les bataillons d’où on les a tirées.

Le bataillon idéal de Montecuccoli compte donc 1440 hommes, répartis en 480 piques, 880 mousquetaires et 80 rondaches

La pique et le mousquet n’ont pas évolué depuis le début du siècle. On ne se sert plus d’arquebuses dans les troupes allemandes, nous dit Montecuccoli, parce que le mousquet porte plus loin, et que l’homme qui porterait une arquebuse peut porter un mousquet. Les mousquetaires doivent porter une fourchette pour mieux ajuster leur coup. Quant aux piques, elles doivent être fortes, droites et longues de quinze, seize et dix-sept pieds, avec des pointes en langue de carpe. Les piquiers doivent être armés de casques et avoir des cuirasses, qui les couvrent devant et derrière. (…) Le mousqueterie seule sans piquiers, ne peut pas faire un corps capable de soutenir de pied ferme l’impétuosité de la cavalerie qui l’enveloppe, ni le choc et la rencontre des piquiers ; ainsi ils sont obligés de lâcher pied.

Ci-dessus : tambour, arquebusiers à cheval, et cuirassés impériaux (aquarelles de K.A. Wilke)

Ci-dessous : Polonais et Croates au service de l’Empire (aquarelle de K.A. Wilke)

 Ci-dessous : infanterie impériale (aquarelle de K.A. Wilke)

 

Les Gardes du Corps de Wallenstein (1628-1632) :

Ottavio Piccolomini est nommé, vers 1627-28, commandant de la Garde du corps de Wallenstein. L’établissements des Gardes du corps à cheval est alors de 4 compagnies : une de lanciers cuirassés, une d’arquebusiers à cheval, une de dragons et une de Croates. Chaque compagnie compte 100 à 150 chevaux. En septembre 1630, lorsque Wallenstein quitte le commandement, ses Gardes du corps comptent 10 compagnies. À Lützen, en 1632, Les deux compagnies restantes seront jointes au régiment des cuirassiers de Piccolomini.

Fin 1628, les lanciers sont revêtus une casaque à revers noirs et garnitures de soie rouge, et de gros boutons filés de soie. Ils portent l’armure complète et une lance arborant un étendard de couleur or, et une houppe au bout de la lance. Les casaques des 14 sous-officiers sont ornées de garnitures en or et de boutons ouvragés ; les parements des manches sont rouge carmin. Les quatre trompettes portent des lacets de soie rouge.

Les arquebusiers ont un uniforme similaire. Ils ne portent ni l’armure ni la lance, mais seulement un casque de fer, une carabine, un poulverin, un sac à balles et une bandoulière rouge. Cette compagnie comprend aussi 14 officiers et quatre trompettes.

Les dragons portent le mousquet et sont équipés pour le reste comme les arquebusiers.

Les Croates portent des casaques à gros boutons ronds et avec franges et passementeries, un chapeau de fourrure rouge, une bandoulière rouge, et sont armés de carabines.

Chacune des quatre compagnies de Leibgarde à sont propre étendard :

– Le premier porte un soleil éclairant de ses rayons un croissant de lune, avec la devise : Mutuando splendorem, stellis splendidior.

– Le second représente un lion attaquant des animaux qui s’échappent, avec la devise : “omnia vincit” ou “omnia cedant”.

– Le troisième étendard représente un lion pointant sa patte vers une roue ou une boule, symbole du bonheur; avec la devise : “mea haud luditur unguis”.

– Le quatrième représente Énée qui délivre son père Anchise des ruines fumantes de Troie avec la devise : “per tela per ignes”.

– Il existe un cinquième étendard représentant un navire pourvu de soldats, qui s’approche d’une étoile au-dessus d’une montagne.

Ces étendards arborent de plus les signatures AFD ou VDF (Albertus Friedlandie Dux ou Alberto Vallestein Duca di Fridlandt), et FS (Ferdinand II).

Ci-dessous : gardes de Wallenstein et Wallenstein (aquarelles de K.A. Wilke)

Stéphane Thion

La cavalerie à l’aube du XVIIe siècle

La cavalerie à l’aube du XVIIe siècle

Lance contre pistolet

Depuis le début des guerres de religion, les folles charges de cavalerie ont marqué les esprits. Dreux, Saint-Denis, Moncontour, La Roche l’Abeille, Coutras… autant de champs de bataille dont la terre raisonne encore du galop des chevaux. Mais en cette fin de siècle, la question de l’armement du cavalier lourd est sujet à débat.

A l’aube du XVIIe siècle, pour la majorité des théoriciens militaires (Basta, Walhausen, Melzo) il n’existe plus que trois catégories de cavaliers : les lanciers, les cuirassiers (qui englobe les reîtres allemands, les herreruelos espagnols et les chevaux légers huguenots) et les arquebusiers à cheval ou carabins. Walhausen y ajoute les dragons. Alors que l’arquebusier à cheval et le carabin sont des cavaliers qui démontent, le dragon apparaît tout d’abord comme une infanterie montée. Mendoza, qui écrit quelques années auparavant, puis Montgommery et Billon utilisent pour leur part une autre classification : plutôt que de distinguer les cavaliers par leur armement, ils le font par leur façon de combattre : gendarmes (hombres de armas), chevaux légers (cavalleria ligera) et arquebusiers à cheval ou carabins (arcabuzeros a cavallo), Mendoza évoquant encore les reîtres (herreruelos). La raison en est simple : avec l’avènement d’Henri IV, la lance a été abandonnée par la noblesse française. Gendarmes et chevaux-légers utilisent maintenant le même armement, les seconds plus légèrement armés et protégés, alors que les arquebusiers à cheval et carabins sont pour leur part armés d’une arquebuse. Mais en Espagne, le débat sur l’intérêt de la lance fait rage.

Bernardin de Mendoza, dans sa Théorie pratique de la guerre, écrite en 1596, affirme que les lances sont plus efficaces que les reîtres ou herreruelos. Les escadrons de lances n’ont pas besoin d’être plus nombreux que 100 ou 120 au plus, alors qu’il faut 400 ou 500 herreruelos dans un escadron. Les succès des chevaux légers huguenots des guerres de religion, armés de pistolets, et des cuirassiers de Nassau ne feront pas changer d’avis les principaux théoriciens militaires du début du XVIIe. Comme le dit George Basta, comte du Saint-Empire Romain germanique et gouverneur Général de Hongrie et Transylvanie sous Rodolphe II, l’introduction des cuirasses en la France, avec un total bannissement des lances a donné l’occasion de discourir quelle armure serait la  meilleure. Lui aussi était convaincu du pouvoir de la lance : la lance inventée pour percer & diviser un escadron, demande vélocité & force pour le choc. Mais il ajoute que, pour obtenir l’impact escompté, l’utilisation de la lance nécessite quatre conditions : un bon cheval, un terrain plat, un cavalier parfaitement entraîné à son maniement et enfin, qu’elle soit répartie en petits, & non pas en gros escadrons, qu’il nomme escadronceaux, les établissant à vingt & cinq ou trente chevaux. La même année, Jean-Jacques Walhausen consacre le premier chapitre de son ouvrage « De l’instruction et gouvernement de la cavalerie» au lancier. Son opinion rejoint celle de Basta, et il propose que les lanciers soient réunis en petites compagnies de 40 à 60 chevaux, et celle de l’Espagnol Ludovic Melzo, qui écrit en 1619 un ouvrage sur le service de la cavalerie. Enfin, tous ces auteurs se rejoignent lorsqu’ils affirment que le cuirassé est plus facile à recruter et à former que le lancier.

L’historien Davila illustre bien ces débats lorsqu’il relate les combats de cavalerie prenant place devant Amiens en 1597 : durant les différentes escarmouches qu’on livra continuellement dans la plaine, plusieurs remarquèrent que quand le combat se passait entre cuirassiers ou carabins de part et d’autre, l’avantage demeurait pour l’ordinaire aux Français, mais que lorsque les gendarmes flamands ou franc-comtois entraient en lice, la cavalerie française ne pouvait soutenir le choc de leurs lances. Pour obvier à cet inconvénient qui causait beaucoup de perte et de chagrin à la noblesse, le Roi s’avança à la tête de ses escadrons, ordonnant de ne point se serrer en escarmouchant, mais de laisser beaucoup de vide entre eux. On en fit l’essai plusieurs fois, et l’on vit que le choc des lances ne rencontrant rien de solide, demeurait presqu’entièrement inutile. Cette manœuvre produisit un grand avantage, tant parce qu’on escarmouchait par pelotons dans une vaste plaine, où il était aisé de s’étendre, que parce que les lances des Espagnols étaient en très-petit nombre, en comparaison de la cavalerie française.

La cavalerie hollandaise va suivre l’exemple français en abandonnant la lance au cours des années quatre-vingt-dix. En 1591, à Knodsenbourg, le prince Maurice de Nassau dispose de quatre cornettes de lanciers et deux cornettes de carabins alors qu’en 1597, la cavalerie hollandaise n’est plus composée que de cuirassiers : à la bataille de Tielsche-Heyd, près de Turnhout, en 1597, la cavalerie portant des grandes pistoles avait l’avant-garde, et était divisée en six troupes (Les lauriers de Nassau, par Jean Orlers et Henry de Haestens, 1612). À Nieuport, en 1600, la cavalerie est uniquement formée de cornettes de cuirassiers, accompagnées de quelques-unes de carabins alors que les Espagnols possèdent plusieurs cornettes de lanciers. L’armée du Cardinal Albert qui se porte au secours de la ville d’Amiens, en 1597, compte ainsi 1 500 lanciers, soit la moitié de la cavalerie espagnole. Les Espagnols seront les derniers à aligner des escadrons de lances, ne les abandonnant que vers 1633.

 

Officier et lancier espagnols vers 1620-1630 (Aquarelle de K.A. Wilke)

Gendarmes, chevaux légers et carabins

Il existe encore, en France, comme en Espagne ou en Savoie, des compagnies de gendarmes. Mais il ne s’agit plus des anciennes compagnies d’ordonnance, qui disparaissent dans les années 1590. Au début du XVIIe siècle, selon Du Praissac, les compagnies de gendarmes ou d’hommes d’armes, sont divisées en compagnies de cent hommes d’armes, au moins celles du Roy, des Princes, du Connétable & des Maréchaux de France, les autres ne sont pas si fortes. Louis de Montgommery nous décrit des compagnies de gendarmerie plus fortes sous Henri IV (vers 1603) : nous laisserons les compagnies de gendarmes complètes de 200 maîtres pour les princes, officiers de la couronne et gouverneurs de provinces ; et les autres de 100 pour les seigneurs, et ceux auxquels il plaira au roi d’entretenir, effectif confirmé par l’ordonnance du 29 avril 1611. Et il décrit en détail leur équipement : leurs armes seront complètes, et useront de grèves et genouillères, dedans ou dessus la botte ; la cuirasse à l’épreuve de l’arquebuse devant et derrière ; ils porteront au lieu de la lance une escopette de celles que l’on fait maintenant, lesquelles tirent à 500 pas, car elles ne sont guère plus longues ni plus empêchantes que les pistolets de l’autre côté de l’arçon, ils y mettront un pistolet chargé d’un carreau d’acier, d’une flèche acérée.  (…) Pour l’ordre de combattre, chaque brigade (une compagnie se décompose en quatre brigades) se mettra cinq à cinq, qui fera pour la compagnie de 200 hommes d’armes 20 de front et 10 rangs, au troisième rang le guidon, et l’enseigne au cinquième. (…) Pour entrer au combat, ils doivent allé au pas, jusqu’à 100 pas de l’ennemi, puis au trot jusqu’à 25 ou 30, cela se juge à l’oeil, gardant toujours soigneusement leurs rangs, l’escopette sur la cuisse et le pistolet avec le chien couché dans le fourreau : lors les trompettes sonneront la charge, et les enfants perdus feront leur salut (feront feu), et eux tenant à demi bride, tireront leurs escopettes, les appuieras sur le poing de la bride au moins des premiers rangs, et lors chargeront à toute bride le pistolet à la main lequel ils ne tireront point qu’appuyé dans le ventre de l’adversaire, au dessous du bord de la cuirasse dans la première ou seconde lame de la tassette (s’il est possible).

Concernant les chevaux légers, Montgommery les décrit comme des gendarmes plus légèrement armés : quant aux chevaux légers, les troupes seront toutes de 100 maîtres, feront 3 quadrilles, et en useront comme nous avons dit des gendarmes ; ils s’armeront d’armes complètes, ayant une cuirasse à preuve et le reste léger ; ils auront un pistolet à l’arçon sous la main de la bride, et à l’autre leur salade ou habillement de tête. Leur apparence ne se modifie guère entre les années 1590 et 1620 comme nous le montre cette description des chevaux légers du Roi en 1614 : suivaient les chevaux légers de la compagnie (du Roy), armés & cuirassés le casque en tête, les guidons en main, avec les écharpes & livrées de sa Majesté.

Mais si Montgommery prescrit que la cavalerie combatte sur 10 rangs, le sieur Du Praissac, qui écrit dix ans plus tard et est plus imprégné des théories de Maurice de Nassau,  préconise que des compagnies de 108 chevaux se déploient sur 6 rangs.

Montgommery donne la paternité des carabins aux Espagnols et les décrit ainsi : les carabins sont institués pour entamer le combat, pour suivre la victoire, pour les retraites, et pour les escarmouches : ils sont nommés carabins par les Espagnols qui en ont été les auteurs. Melzo affirme pour sa part que les arquebusiers à cheval furent inventés par les Français, lors des dernières guerres du Piémont qui les appelèrent dragons, nom qu’ils gardent encore. (…) Les Arquebusiers à cheval sont de grand profit si on les emploie avec raison : parce qu’ils sont bien utiles pour les gardes des quartiers, pour les escortes (surtout lorsqu’on escorte des voitures) pour battre l’estrade et pour aller prendre langue. Il décrit plus loin les carabins et la manière de combattre qu’ils doivent adopter : leurs armes doivent être, une cuirasse échancrée à l’épaule droite, afin de mieux coucher en joue, un gantelet à coude pour la main de la bride, un cabasset en tête, et pour armes offensives une longue escopette de 3 pieds et demi pour le moins ; les plus longues se porteront mieux en écharpe. Il doit porter aussi un pistolet comme les autres. Les carabins doivent être prompts à recharger, et pour cet effet porter des cartouches à la reître, et quantité de poudre et de plomb sur eux, chacun un bon cheval et vif, mais non pas des petits bidets. Pour leur manière de combattre étant dans l’ordre que j’ai dit ci-devant, seront 15 de front et 7 à 8 rangs ; les 2 quadrilles de carabins à main gauche, trois à trois, celle du maréchal des logis s’avancera la première conduise par son caporal, lequel aura une longue arquebuse au poing. Jérémie de Billon nous dit, vers 1610, que la compagnie de carabins serait de soixante hommes (…). Ils auraient la cuirasse à l’épreuve et un pot ou salade sans autres armes défensives. Et pour armes offensives, une grosse arquebuse à rouet de trois pieds ou un peu plus, ayant fort gros calibre, et l’épée au côté, et un pistolet court, c’est comme le roi les a lui-même institué.

Ces carabins, armés, selon Davila, pour la plupart de plastrons & de casques, & montés sur de petits chevaux vifs & exercés à toutes les évolutions, sont redoutés de l’ennemi.

Gendarme/Cuirassier vers 1630 (Aquarelle de K.A. Wilke)

 

De la compagnie au régiment de cavalerie

Au début du XVIIe siècle, les impériaux lèvent déjà des régiments de cavalerie comptant de 5 à 10 compagnies de 100 chevaux. Beaucoup de ces régiments  joignent compagnies de cuirassiers et d’arquebusiers. Ainsi les trois régiments wallons, de 500 chevaux chacun, envoyés au Palatinat en 1620, comptent 3 compagnies de cuirassiers et 2 compagnies d’arquebusiers chacun. Cette même année, plusieurs régiments de la Ligue catholique comptent 600 cuirassiers et 400 arquebusiers. Une compagnie comprend le plus souvent un capitaine (Rittmeister), un lieutenant, un cornette, un fourrier, 3 caporaux, 3 trompettes, un maréchal-ferrant, parfois un secrétaire (mustershreiber), un armurier (plattner), un maréchal des logis, un quartier-maître et un prévôt. Walhausen propose que les compagnies de cuirasses soient de 100 hommes pour le moins, les compagnies d’arquebusiers, qu’il appelle aussi carabins ou bandeliers à cheval, de 50 à 60 chevaux et les compagnies de dragons de 200 hommes.

La cavalerie danoise du roi Christian IV, qui combat pour la cause protestante de 1625 à 1629, est aussi organisée en régiments. Chaque régiment compte 6 compagnies de 106 chevaux. Une compagnie se divise en quatre troupes, trois de 27 cuirassiers et une de 25 arquebusiers.

La seule unité permanente, en France, en Hollande et en Espagne, reste la compagnie franche d’une centaine de chevaux. Louis de Montgommery propose, à l’aube du XVIIe siècle, que chaque compagnie de chevaux légers ait une troupe de 50 carabins avec elle, en deux quadrilles de 25, sous la charge d’un lieutenant.  Mais, en 1621, les troupes de carabins seront séparées des compagnies de chevaux légers, et formeront un corps particulier sous un mestre de camp des carabins, Arnaud de Corbeville. Et il faudra attendre 1635 pour voir en France la première tentative de formation en régiments, que ce soit de carabins ou de chevaux légers. Hollandais et Espagnols font aussi combattre leurs compagnies d’arquebusiers à cheval de concert avec les cuirassiers. Ainsi, à Nieuport, le comte Louis-Günther de Nassau commande à 3 compagnies d’arquebusiers de s’avancer et faire leur décharge alors qu’il les suit de près avec 5 ou 6 compagnies de cuirassiers.

Quand à la manière de faire combattre, le cavalerie combat en escadrons de 200 à 700 chevaux sur une dizaine de rangs de profondeur. Certains généraux privilégient de gros escadrons, d’autres, comme le prescrit Montgommery, de petits escadrons, plus faciles à commander. C’est effectivement ce que fit Henri IV à Ivry, selon Palma de Cayet : le Roy, qui avait expérimenté en d’autres batailles et combats qu’il était plus avantageux de faire combattre la cavalerie en escadron qu’en haye. Le Roi juge donc, selon Davila, à propos de partager sa cavalerie en plusieurs escadrons, pour affaiblir le choc des lances, & afin que dès qu’elles auraient chargé, deux ou trois escadrons moins gros pussent les attaquer de toutes parts, & ne pas exposer toute sa cavalerie à essuyer de front la violence de leur première charge. Chacun de ces escadrons comptent 250 à 400 chevaux, à l’exception du sien qui en fait 600. Espagnols et Hollandais forment aussi des escadrons de 200 à 400 chevaux en regroupant 2 à 4 compagnies. Les Espagnols les appellent trozos, les Hollandais, troupes.

Au début de la guerre de Trente ans, les escadrons comptent en moyenne 400 chevaux, que ce soient ceux de Tilly ou ceux des protestants. Les catholiques forment leurs escadrons sur 10 rangs alors que les protestants adoptent des formations moins profondes, sur 6 rangs. Ces formations étaient bien adaptées à la tactique de la caracole, privilégiant le feu à la charge épée en main. Chaque rang de cavalier avance alors à 30 ou 50 pas de l’ennemi, fait feu puis se retire à l’arrière de l’escadron pour recharger. La caracole en «limaçon» est similaire, à la différence que le tir se fait par file : la file de gauche s’avance, tourne sur sa droite de façon à présenter son flanc gauche à l’ennemi, fait feu, fait le tour de l’escadron et vient se replacer à sa position d’origine pour recharger.

L’allègement de la cavalerie lui permet par ailleurs de démonter, comme c’était le cas durant la guerre de cent ans. Montgommery termine ainsi son ouvrage par les mots suivants : toutefois la cavalerie généreuse, pleine de noblesse, comme la nôtre, peut en partie intervenir à ces défauts, car elle est si volontaire & prompte au service de son Roy, & encline à l’honneur, que volontiers une partie, voire tous mettront pied à terre pour quelque grand effet, chose que nous avons vu souvent exercer durant nos dernières guerres civiles. Car quand nous mettrons dans chaque régiment français 200 gentilshommes & 100 carabins à pied, la pique à la main, & le pistolet en écharpe, il n’y a bataillon d’Espagnols ni même de Wallons, lesquels je crois être des meilleurs fantassins du monde qui n’en fut sauvé, témoin le convoi de Lan. Cet épisode est décrit en détail par Sully dans ses mémoires. Il s’agit de l’attaque, par le maréchal de Biron, d’un convoi espagnol défendu par 100 chevaux et 1 600 à 1 800 fantassins espagnols, wallons et allemands : le combat tirant en longueur, Biron ordonna donc pour dernière ressource, que les 100 gentilshommes missent pied à terre, qu’ils joignissent à leurs armes, qui étaient l’épée et le pistolet, la pique (il en avait fait apporter en quantité), et qu’ils remmenassent à la charge nos gens de pied français et suisses, qui n’avaient encore pu entamer les Espagnols. Les Espagnols cédèrent enfin et se sauvèrent dans les bois et sous les chariots, après avoir jeté leurs armes. Cette pratique n’est pas propre à la cavalerie française puisque Tilly, qui combat alors, en 1600, en Hongrie sous le comte de Mercoeur, fait aussi démonter ses cuirassiers au moins en une occasion, pour repousser une bande de 3 000 Tartares.

Stéphane Thion

Les formations d’infanterie à l’aube du XVIIe siècle

Les formations d’infanterie à l’aube du XVIIe siècle

À l’aube du XVIIe siècle, l’infanterie va se transformer. Les formations profondes espagnoles, suisses et allemandes, carré d’hommes ou carré de terrains, vont progressivement s’affiner.

L’infanterie de toutes les nations est maintenant organisée en régiments. Imitant le tercio espagnol, composé de 12 compagnies de 250 hommes, le régiment d’infanterie impérial est organisé en régiments de 10 compagnies de 250 ou 300 hommes soit, théoriquement, 2 500 ou 3 000 hommes. Le régiment wallon et bourguignon est aussi à 3 000 hommes, en 15 compagnies de 200 hommes. Ce sont ainsi 6 000 Wallons, en deux régiments, celui de Bucquoy et celui de Miraumont, que le Roi d’Espagne envoie à l’Empereur pour renforcer son armée, en 1619. Les régiments protestants des premières années de la guerre de Trente ans étaient de taille comparable, comptant 2 à 3 000 hommes. J.J. Walhausen, qui écrit son Art militaire pour l’infanterie vers 1606-1615, évoque, en parlant de la Haute-Allemagne, des régiments de 3 000 hommes à dix compagnies de 300 hommes, chaque compagnie comptant 150 mousquetaires et 120 piquiers plus l’encadrement : un capitaine, un lieutenant, un porte-enseigne, trois sergents, un capitaine des armes, un caporal des appointés, trois caporaux, trois lanspessades, les appointés, trois ou quatre tambours, un chirurgien et un prévôt.  Les vieux régiments français, comme on le verra plus loin, comptent plutôt 2 000 hommes en 20 compagnies de 100 hommes.

Pour combattre, l’infanterie se forme en bataillons ou escadrons. L’infanterie espagnole du Cardinal Albert, qui se porte au secours d’Amiens en 1597, compte quatre bataillons faisant de l’ordre de 4 000 hommes chacun, plus différentes manches d’arquebusiers : l’avant-garde était un bataillon carré, deux autres bataillons carrés formaient le centre, (…) et un corps d’infanterie d’élite fermait la marche, alors que 500 arquebusiers sont distribués dans les intervalles des charrettes. En pratique, un tercio de 3 000 hommes, composé de 1 324 corselets (coseletes en espagnol), 1 526 arquebusiers et 150 mousquetaires, se forme en un seul escadron, les corselets en formant le corps, disposés en 36 files de 36 hommes. Arquebusiers et mousquetaires forment alors les garnisons,  une à chaque angle du carré de piquiers. Martin Eguiluz, qui écrit en 1595, propose encore d’énormes escadrons de plus de 10 000 hommes et Lelio Brancacio qui écrit 30 à 40 ans plus tard, préconise de gros escadrons carré d’hommes, composés d’un ou plusieurs tercios. Un escadron composé d’un tercio complet sera de 2 500 hommes (1 000 piquiers, 1 050 arquebusiers et 450 mousquetaires), plusieurs tercios pourront composer un gros escadrons de plus de 6.000 hommes. Mais dès 1600, les escadrons espagnols, manches comprises, comptent moins de 2 000 hommes : 1 500 à 1 800 hommes pour chacun des quatre tercios aligné à la bataille de Nieuport, chaque tercio formant un escadron, et 1 300 hommes pour les escadrons alignés à Fleurus, en août 1622. Un mois plus tard, Gonzalvo de Cordova présentera son infanterie à l’Infante en 5 escadrons de 1 000 hommes

Durant la guerre de Trente ans, le bataillon impérial ou de la Ligue catholique dépasse rarement les 2 000 hommes : à la Montagne Blanche, cinq bataillons comptent 1 250 à 1 700 hommes, quatre font 2 000 à 2 500 hommes alors que les Wallons, vétérans des Flandres, forment un bataillon de 3 000 hommes. Le comte de Tilly est un adepte de l’escadron espagnol avec garnisons de mousquetaires. À la bataille de la Montagne Blanche, il dispose son aile droite, commandée par Bucquoy, en cinq gros d’infanterie avec leurs mousquetaires, aux pelotons des quatre coins et aux deux manches et les piquiers au milieu. Les quatre en forme carrée de pareille distance et le cinquième au milieu (Mémoires de Du  Cornet). Alors que les bataillons impériaux et liguistes se forment sur 20 à 30 rangs, en bataillon doublé, de façon à obtenir un bataillon deux fois plus large que profond, les bohémiens et les protestants scindent leurs régiments en bataillon de 800 à 1 000 hommes sur 10 rangs.

Selon le sieur du Praissac, ordinairement on fait cinq sortes de bataillons, à savoir carrés d’hommes, carrés de terrain, doublés – quand le front est au fond selon quelque proportion donnée, et de grand front. L’espace que quelque soldat occupe, marchant en bataille, est de 3 pieds en front, et 7 en fonds. (…) Les bataillons carrés d’hommes ou de terrain, sont faibles de front, et ceux de grand front sont fort faibles de fonds. Les Espagnols se servent le plus souvent des bataillons doublés, et les Hollandais de longs, car ils ne font leurs files que de 10 hommes. Walhausen propose de faire, avec un régiment de 3 000 hommes, de 3 à 12 escadrons, les formant en 50 files de 5 hommes, soit 250 hommes, ou en 100 files de 10 hommes, soit 1 000 hommes. Il s’inspire ainsi de Maurice de Nassau, qui scinde, à Nieuport, ses 9 régiments en 16 bataillons de 600 à 650 hommes chacun. Dans ses Principes de l’Art Militaire, Henry Hexham décrit le bataillon hollandais en files égales de 10 hommes. Pour lui, la meilleure façon de former une division est de réunir 500 piquiers et mousquetaires et d’en faire 25 files de chaque. Au début de la guerre de Trente Ans, de nombreux princes protestants s’inspireront de l’école hollandaise. Ainsi, l’armée du Margrave de Bade, qui affronte Tilly à Wimpfen les 5 et 6 mai 1622, est bien encadrée et bien entraînée, ses régiments organisés en 10 compagnies de 200 hommes. Chaque régiment est déployé en un bataillon de 1 400 hommes, le reliquat formant les enfants perdus, de 140 files sur 10 rangs, moitié mousquetaires, moitié piquiers. Les armées de Mansfeld et de Christian de Bunswick semblent être organisées en régiments d’une dizaine de compagnies de 200 hommes, effectif théorique bien sûr, combattant en bataillons de 1 000 hommes sur 10 rangs. L’infanterie danoise du roi Christian, qui combat de 1625 à 1629, s’inspire aussi de ce modèle, formant ses régiments à 12 compagnies de 200 hommes, en deux bataillons de 1 200 hommes, avec une proportion de deux mousquets pour une pique.

L’infanterie française, influencée par les pratiques des protestants, privilégie les bataillons faisant moins d’un millier d’hommes sur 10 rangs. Dès la bataille d’Ivry, Henri IV fait former de petits bataillons de 500 arquebusiers pour encadrer ses escadrons de cavalerie. Dans son sillage, Jérémie de Billon préconise, vers 1610, des bataillons de 500 hommes, disposés en 50 files sur 10 rangs, soit 300 piquiers flanqués de dix files de 10 mousquetaires de chaque côté. En cas de besoin, deux bataillons peuvent se réunir en un gros bataillon de 1 000 hommes. Mais cet auteur innove un peu plus en proposant de les déployer en brigades de trois bataillons : il y en aura deux en face qui ne sembleront n’être qu’un corps et un autre derrière ces deux là ; ou alors, on mettra un bataillon seul en front et deux autres derrière, et quand on en viendra aux mains avec l’ennemi, ils partiront et iront charger de flanc. Le sieur du Praissac, qui écrit à la même époque (vers 1610-1612), propose aussi de scinder les régiments en petits bataillons de 690 hommes comptant chacun cinq compagnies, moitié piquiers et moitié mousquetaires. Le maréchal de Créquy s’inspire sans doute des recommandations de ces deux auteurs, lorsqu’en 1620, au combat de Pont-de-Cé, il forme chacun de ses trois régiments (dix compagnies des Gardes-Françaises, Picardie et Champagne) en cinq bataillons de deux compagnies : cas régiments ayant détaché 100 à 150 enfants perdus, chaque bataillon ne compte guère plus de 300 hommes. Fin 1628, le régiment d’Estissac, qui compte alors 1 400 hommes, défile devant le Roi en deux bataillons.

La proportion de mousquetaires ou arquebusiers et de piquiers va rapidement passer d’une majorité de piques vers 1600 à deux tiers d’armes à feu dans les années 1620. En 1600, une compagnie wallonne de 200 hommes compte déjà 50 piquiers, 50 mousquetaires et 100 arquebusiers. En France, la proportion de piques, qui était de l’ordre de 7 piques pour 3 mousquets dans les vieux régiments, va diminuer à partir de 1610.  À cette époque, Jérémie de Billon rapporte que quelques étrangers observaient qu’ayant de vieux soldats, les deux tiers étaient piquiers et l’autre tiers mousquetaires. Et si c’étaient nouveaux soldats, les deux tiers étaient mousquetaires et l’autre tiers était piquiers. Dans le même temps, Du Praissac affirme que la force de l’infanterie à la campagne est la pique, & aux forteresses est la mousqueterie : afin donc de subvenir à l’un & à l’autre, la compagnie sera composée moitié piques, moitié  mousquetaires.

Vers 1615, une compagnie suisse de 300 hommes comptait 40 mousquetaires, 15 arquebusiers et 245 piquiers (dont 50 corselets). En 1624, une compagnie suisse de 200 hommes ne compte plus que 125 piques (dont 60 corselets) pour 60 mousquets, 15 arquebuses et 3 officiers, soit un peu plus de 60% de piques. Les compagnies françaises passeront à 40 piques pour 60 mousquets vers 1630.

Selon Montgommery, tout soldat piquier doit se styler et exercer à manier dextrement une pique, laquelle doit être de dix-huit pieds. Il la portera couchée sur l’épaule, la main contre le brassal, le bout regardant le jarret de celui  qui marche devant lui, et le faire trois pieds plus haut que la tête de celui de derrière ; il faut en marchand prendre la cadence du tambour, avec le plus de grâce, et de gravité, qu’il sera possible, car la pique est une arme honorable, et qui mérite d’être portée avec geste brave et audacieux : l’espagnol l’appelle reine des armes.

Les arquebusiers et mousquetaires servent comme manches d’un bataillon, sur les flancs et le front des piquiers, mais aussi comme enfants perdus, écran de tirailleur qui se déploie sur le front de l’armée. L’arquebuse se fait de plus en plus rare dans les années 1620. En France, elle disparaît complètement en 1627, pendant le blocus de la Rochelle.

Stéphane Thion

 

Infanterie de l’Union Protestante vers 1620 (Aquarelle de K.A. Wilke)

Exemples de listes d’armées polonaises par Riton34140

Exemples de listes d’armées polonaises par Riton34140

Exemple 1 d’armée polonaise :

  • 1 C in C Rang 3
  • Regt Cavalerie
    • 1 Gen Rang 2
    • 1 Hussards Ailés Large
  • Battle Group
    • 1 Gen Rang 2
    • 3 Haiduk Vet Vangard
  • Regt infanterie
    • 1 Gén Rang 1
    • 3 Bataillon
  • Regt Cavalerie
    • 1 Gén Rang 2
    • 2 Pancernis
  • Regt Cavalerie
    • 1 Gén Rang 2
    • 2 Pancernis
  • Regt Cavalerie
    • 1 Gen rang 1
    • 3 Tatars

Une armée sans artillerie pour jouer sur la rapidité, l’infanterie pour « occuper » un peu le terrain et les Haiduks avec leur 1er mouvement « gratuit » prennent le terrain difficile et harcèlent par leurs tirs.

Les Hussards ailés pour leur côté psychologique. Ils deviendront une cible prioritaire. Soit l’adversaire va tout faire pour les éviter, soit il va tout mettre pour les éliminer.

Il me faut juste augmenter le commandement des tatars pour être plus réactif et amener une menace dans le camp adverse vu leurs vitesse de déplacement et leur capacité à réagir. 

Exemple 2 d’armée polonaise :

  • 1 Gén Rang 3
  • Cav Regt
    • 1 Gén Rang 3
    • 3 Pancernis
  • 1 Gen Rang 2
    • 2 Tatars
  • Cav Regt
    • 1 Gén Rang 3
    • 3 Pancernis
  • Cav Regt
    • 1 Gen Rang 2
    • 3 Lisowczycy
  • Cav Regt
    • 1 Gén Rang 2
    • 3 Arquebuse Monté Vétéran

Une armée uniquement constituée de cavalerie. Difficile à jouer pour la prise d’objectifs mais très rapide.